Image légendée
Une seiche portant des lunettes 3D © Rachael Feord

Sacré look pour une seiche ! Mais si le mollusque est ainsi affublé de lunettes 3D, c’est pour tenter de répondre aux questionnements d’une équipe anglo-américaine : à l’instar d’un grand nombre de vertébrés, les céphalopodes sont-ils dotés de « stéréopsie », c’est-à-dire d’une vision binoculaire leur permettant de percevoir les reliefs ?

L’œil des céphalopodes a en effet une origine évolutive différente de celle des vertébrés. Il en possède pourtant de nombreuses caractéristiques : une cornée, un iris, un cristallin et une rétine. Partant de ce constat, des biologistes des universités de Cambridge (au Royaume-Uni) et du Minnesota (aux États-Unis) ont cherché à savoir si la seiche était capable, comme l’Homme, d’utiliser ses deux yeux simultanément pour obtenir une vision en trois dimensions.

Séance de cinéma

L’expérience est assez simple. Des lunettes anaglyphes sont accrochées sur l’animal par un système de velcro. La seiche est ensuite plongée dans un aquarium dans lequel est diffusée une vidéo. Sur l’écran, une crevette s’active : l’un des aliments préférés du céphalopode. Plusieurs films sont ainsi présentés à l’animal, reposant tous sur le principe du cinéma en relief, consistant à juxtaposer deux images de couleurs différentes.


Réponses de la seiche face à des images de crevettes diffusées de manière superposée ou en décalé © Feord et al.

Les résultats sont probants. Lorsque les images de la crevette perçues par l’œil gauche et l’œil droit sont décalées, la seiche ajuste sa distance avant d’attaquer sa proie. Plus ce décalage est important, plus la seiche se déplace.

Ces travaux aboutissent ainsi aux mêmes conclusions que celles obtenues par l’équipe de Nityananda sur la mante religieuse en 2016 : les vertébrés ne sont définitivement pas les seuls animaux à utiliser la stéréopsie pour évaluer les distances. Néanmoins, les auteurs soulignent dans leur étude que, si la seiche et l’Homme utilisent tous les deux la vision stéréoscopique, les mécanismes neuronaux sous-jacents – qui sont peut-être différents – restent à découvrir.