Pour discuter des cas Covid-19 les plus graves, Andreas Bootsveld n'est pas seul. En plus des collègues de son unité de soins intensifs, il peut s'appuyer sur l'avis de plusieurs experts. Ce collège de spécialistes ne se trouve toutefois pas dans l'enceinte de la clinique mais à une vingtaine de kilomètres de distance. Une télémédecine qui se fait via des visites en visioconférence et connaît une accélération avec la pandémie.

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Gernot Marx (g), directeur du département des soins intensifs de l'hôpital universitaire d'Aix-la-Chapelle, en visioconférence avec Andreas Bootsveld (sur l'écran), lors d'une téléconsultation pour le traitement des patients atteints du Covid-19, le 20 janvier 2021 à Aix-la-Chapelle © AFP/Ina Fassbender

Depuis mars, cet « hôpital virtuel » a permis de répartir la vague de patients qui aurait pu submerger les grands centres médicaux en Allemagne. Sur le long terme, la technologie pourrait améliorer l'accès à des soins spécialisés, aujourd'hui inégalement répartis entre grandes villes et périphérie.

« Des patients souffrant de défaillance pulmonaire sont normalement des cas pour de grands hôpitaux » pluridisciplinaires et hyper-équipés, explique Gernot Marx, directeur du département des soins intensifs de l'hôpital universitaire à Aix-la-Chapelle, un des centres d'expertise de l'hôpital virtuel. « Les cliniques communales et régionales ne faisaient pas ça », dit-il.

Grâce aux conseils en mode virtuel, « désormais, nous pouvons faire des choses qui auraient absolument nécessité un transfert avant », confirme M. Bootsveld. Le médecin supervise 14 lits de réanimation dans le petit hôpital de Stolberg - cinq fois moins que le docteur Marx.

Depuis mars, la télémédecine a ainsi permis « d'assurer les capacités de soins intensifs » en temps de pandémie, ajoute Sandra Dohmen, responsable médicale du projet. « Jusqu'ici, 90% de nos patients ont pu rester dans des hôpitaux proches de leur lieu de vie. »

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Sandra Dohmen, responsable médicale du projet de consultation de télémédecine pour les patients atteints de la Covid-19, le 20 janvier 2021 à Aix-la-Chapelle, en Allemagne © AFP/Ina Fassbender

- Concile virtuel -

Depuis 2012, un projet de « conciles virtuels » existe entre 17 cliniques de la région Rhénanie-du-Nord-Westphalie connectés à deux centres universitaires. Mais « le coronavirus en mars était l'occasion pour étendre l'offre » à tous les hôpitaux de la région, explique Mme Dohmen. « On avait la grande crainte de voir en Allemagne une situation comparable à celle de Italie », se souvient M. Marx.

Avec plus de 1 800 visioconférences au compteur, 300 patients ont été ou sont toujours suivis. Dans le cadre du projet européen « ICU4Covid », un système comparable doit désormais être déployé dans plusieurs pays pour la prise en charge de 30 000 patients par an.

A Stolberg, où tout le département de réanimation a été équipé en WiFi, la visite virtuelle se fait à l'aide d'un caddie roulant équipé d'un ordinateur et d'une caméra. Avec lui, M. Bootsveld peut rejoindre chaque lit. Mais pour accélérer le déploiement face au Covid-19, il suffit désormais d'un ordinateur portable équipé d'une webcam pour effectuer une demande de consultation en quelques clics.

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Gernot Marx (d) avec des collègues examinent un patient atteint de la Covid-19 à l'hôpital universitaire d'Aix-la-Chapelle, le 20 janvier 2021 © AFP/Ina Fassbender

- « Savoir spécialisé » -

« Face au Covid-19 et les multiples inconnues, l'hôpital virtuel permet de créer un réseau de partage d'expertise pour aider les patients sur place », note Mme Dohmen, qui y voit une « grande plus-value. » Ce lien virtuel a également permis de rassurer des proches, inquiets de ne pas avoir accès à un hôpital universitaire.

La satisfaction d'avoir l'appui de spécialistes d'hôpitaux universitaires est identique pour les soignants des cliniques locales : « quand ils nous confirment qu'on a pensé à tout », ce deuxième avis « soulage », dit-il. Toutefois, « il faut que cela reste une concertation, il ne faut pas que ça devienne du traitement à distance. »

« Ça ne veut clairement pas dire qu'on a fait de la mauvaise médecine intensive avant » mais « on a accès à un savoir spécialisé que nous n'avions pas dans un hôpital communal », note le médecin en chef à Stolberg.

Toutefois le transfert automatique des données médicales laisse parfois encore à désirer, dans un pays en retard en matière de numérisation. Il faut encore prendre des notes pendant de longues minutes à la main au début de chaque conférence. Et il arrive que des listes de médicaments sont transmises par fax.