Image légendée
Quentin Helaine, ingénieur de recherches à l’école des Mines de Nancy, commande le robot « Scar », le 23 septembre 2020 à Nancy © AFP Jean-Christophe Verhaegen

C’est un robot à quatre pattes déambulant dans les couloirs de l’École des Mines de Nancy et répondant au doux nom de Scar : cette merveille de technologie se prépare à acquérir les capacités qui lui permettront d’aller explorer des endroits trop dangereux pour l’homme. Ce « toutou électronique », que professeurs ou élèves de l’école caressent parfois « comme un véritable animal », a des qualités étonnantes : sur une zone précise il descend seul les escaliers, ausculte un objet puis remonte, évitant les obstacles s’il y en a. « C’est la pointe de la science », s’émerveille Paul Lecomte, élève ingénieur en troisième année, télécommande avec écran en main pour guider et programmer ce robot-toutou qu’il fait avancer, monter, descendre ou se mettre sur le dos comme s’il voulait des caresses... Scar est alors capable de se remettre sur ses pattes. « C’est marrant, il ressemble à un animal et on ressent des sentiments. C’est de l’anthropomorphisme », sourit Quentin Helaine, ingénieur de recherches à l’école et « maître » de Scar. Scar, le méchant dans le « Roi Lion » pour les élèves, mais aussi acronyme de « Système complexe d’assistance robotisée », a été acheté 80 000 euros à la société américaine Boston Dynamics.

« C’est bien moins cher qu’un robot destiné à la recherche, 600 000 euros », constate Pascal Vaxivière, maître de conférences et un des responsables du domaine robotique de l’école où Scar côtoie ses congénères humanoïdes « Pepper », « Nao » et « Minoxide ».

« Rupture technologique »

« Le chien est le meilleur ami de l’homme. Un robot-chien, mobile à quatre pattes est la meilleure solution pour le rendre polyvalent dans les terrains très accidentés » par comparaison avec les « robots humanoïdes qui entraînent d’autres contraintes », souligne M. Helaine. Pour les enseignants qui veulent à la fois « garantir l’excellence à leurs étudiants et créer des liens avec les entreprises », Scar marque une « rupture technologique dans la robotique ». D’autant qu’il pourra « faire des choses innombrables » si on « développe les applications ».

Image légendée
Le robot-chien Scar, télécommandé, se déplace dans les jardins de l’Ecole des Mines de Nancy, le 23 septembre 2020 © AFP Jean-Christophe Verhaegen

L’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) a été la première à vouloir s’appuyer sur les capacités de Scar, dont elle finance le développement à hauteur de 200 000 euros sur trois ans. Pour son projet controversé d’enfouissement souterrain de déchets nucléaires à Bure (Meuse), le robot sera envoyé entre le front de taille et la tête du tunnelier qui creuse les galeries, ce qui est interdit à l’homme car trop dangereux. L’opérateur pourra rester derrière, explique le professeur Laurent Garletta, autre « maître » de Scar.

Au programme, de la surveillance grâce aux cinq caméras, mais aussi de la télémétrie, des tests, de la cartographie, des prises de mesures...

« Petit Poucet »

Scar fonctionnant à partir du réseau wifi, l’idée est qu’il installe lui-même ses bornes dans « les galeries, à la manière du petit Poucet », expliquent les chercheurs. Quant à l’autonomie, il s’agira de renforcer les batteries pour dépasser les 1 h 30 à 3 h disponibles selon les applications. Le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) veut aussi voir les capacités de Scar : il va lui apporter 30 000 euros pour effectuer des essais dans son centre du Valduc (Côte d’or).

Image légendée
Le robot-chien Scar, télécommandé par l’ingénieur Quentin Helaine, monte un escalier de l’Ecole des Mines de Nancy, le 23 septembre 2020 © AFP Jean-Christophe Verhaegen

Conçu pour l’armée américaine, ce robot peut désormais recevoir une foule d’applications civiles. Deux exemplaires ont d’ores et déjà été acquis au Luxembourg par des sociétés de BTP, selon l’école. « Tout dépend des applications qu’on lui installe », note M. Vaxivière. A Bangkok, c’est l’un d’eux qui a distribué du gel hydroalcoolique dans un centre commercial sous le regard médusé des clients. « Il pourrait aussi aider les personnes mal-voyantes », imagine Paul Lecomte. L’appareil de couleur jaune, d’un poids de 32,5 kg et d’environ 1 m de long, dessiné un peu comme un Labrador haut sur pattes, a toutefois un défaut : il n’a pas de tête. Mais ce défaut pourrait être corrigé dans les mois à venir. Les ingénieurs ont des projets artistiques et veulent même le faire danser.