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Photo d’archives de Vénus, réalisée par la Nasa à partir de données des sondes Magellan et Pioneer © Nasa/JPL-Caltech/AFP/Archive

La vie telle qu’elle est connue sur Terre est impossible sur Vénus, faute d’eau suffisante dans son atmosphère, selon une étude parue lundi, qui constitue une nouvelle réfutation de la détection d’un gaz possiblement lié au vivant. « Il n’y a pas de vie active possible » dans les nuages de Vénus, a déclaré lors d’un point de presse le microbiologiste John Hallsworth, principal co-auteur de l’étude parue lundi dans Nature Astronomy. 

La plus proche voisine de la Terre lui ressemble à bien des égards, par sa taille et sa masse, mais s’en distingue par une température de surface infernale, 470 C°, et une atmosphère de gaz carbonique à 97 %. Autant dire peu propices à la vie. 

La planète est de surcroît couverte d’une couche épaisse de nuages constitués de gouttelettes d’acide sulfurique. C’est dans celle-ci qu’en septembre dernier, l’astronome britannique Jane Greaves a annoncé la découverte de phosphine. La phosphine provenant, sur Terre, d’une activité humaine ou microbienne, l’annonce a mis la communauté scientifique en ébullition. Avant d’être contestée par des spécialistes qui ont mis en cause l’observation et la méthode utilisée pour conclure à la présence de ce gaz.

« Distance infranchissable »

Cette fois, l’objection vient sur la possibilité même qu’un organisme vivant puisse exister dans de telles conditions. Un des sujets d’étude de John Hallsworth, de la Queen’s University de Belfast, est « la quantité minimale d’eau dont les microbes les plus extrêmes (les plus résistants, ndlr) peuvent se satisfaire sur Terre pour rester actifs et se développer ». 

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Première photo prise à proximité de Vénus, avec ses nuages bien visibles, par la sonde américaine Mariner le 5 février 1974 © Nasa/AFP Handout

Son jugement est sans appel : la quantité d’eau disponible dans les nuages de Vénus est « plus de cent fois trop faible » pour la survie des micro-organismes les plus résilients connus. Autrement dit, « à une distance infranchissable avec ce que la vie exige pour fonctionner ». Il enfonce le clou en ajoutant : « Le microbe le plus tolérant à la sécheresse n’aurait pas eu une seule chance dans les nuages de Vénus, et le plus tolérant à un milieu acide encore moins ».

L’équipe de Jane Greaves avait d’ailleurs revu à la baisse la quantité de phosphine qu’elle pensait avoir détectée. Pour Chris McKay, astrophysicien de la Nasa et co-auteur de l’étude parue lundi, « il n’y a pas de consensus ferme dans la communauté scientifique que le signal détecté soit de la phosphine ». Mais même s’il y a bien de la phosphine, on connaît suffisamment bien l’atmosphère de Vénus, grâce aux sondes qui l’ont survolée, voire traversée, depuis les années 1960, et aux observations depuis la Terre, pour « dire s’il y a assez d’eau pour la vie », selon Chris McKay. Et « sur Vénus ce n’est pas le cas, et de loin ».

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Vue de Vénus fournie par la Nasa le 7 janvier 2011 réalisée avec des données de plus de dix ans d’observation de la sonde américaine Magellan, et des données du radiotélescope d’Arecibo et des sondes soviétique Venera et américaine Pioneer © Nasa/AFP HO

« Royaume de l’imagination »

Pour cet expert de la Nasa, les trois sondes qui exploreront Vénus aux alentours de 2030 confirmeront les données de température, pression et mesure d’eau déjà acquises, en permettant par ailleurs de retracer l’histoire de cette voisine « qui a pu être habitable il y a trois milliards d’années ».

Mais l’étoile du Berger, comme on l’appelle, pourrait-elle abriter une autre forme de vie que celles que nous connaissons ? À cette question « philosophique », Chris McKay répond qu’alors, « on quitte la biologie telle que nous la connaissons, et on entre dans le royaume de l’imagination ». 

Si la vie n’est pas possible sur Vénus, elle l’est peut-être sur Jupiter, la deuxième planète de notre Système solaire à posséder, Terre mise à part, une atmosphère nuageuse. Ils offrent « une combinaison de bonne température et d’activité de l’eau (sa disponibilité) pour supporter une vie active », selon M. Hallsworth. Ce qui ne suffit pas, évidemment, à affirmer qu’elle y soit présente.

Avec Chris McKay, ils misent sur le prochain télescope spatial James Webb, qui décollera à l’automne, pour explorer la possibilité d’autres planètes pouvant abriter le vivant, en étudiant leur atmosphère.