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Les dommage causés par un insecte ravageur d'Asie, Adelges tsugae © Kathie Hodge/Flickr

Venus d’autres continents, certains insectes, comme les pucerons, peuvent dévaster des espèces entières d’arbres en quelques décennies seulement. Un enjeu réel en Amérique du Nord qui s’accompagne d’un coût exorbitant : plus de 70 milliards de dollars déversés par an. Alors, comment éviter de tels ravages ? Et, plus judicieux peut-être, comment parvenir à prédire l’invasion de ces insectes pour mieux s’y préparer ?

C’est le projet – digne d’une enquête policière – qu’ambitionnent des chercheurs en écologie de l’université de Washington. Dans un article publié le 17 octobre, ils répertorient une cinquantaine d’insectes herbivores en tenant compte de certains de leurs attributs – stratégie de reproduction, distance qui les sépare de leur lieu d’origine, etc. Ils notent également les caractéristiques des arbres victimes de leurs attaques (dans cette étude, il s’agit essentiellement de conifères). La base de données qu’ils élaborent inclut toutefois un élément nouveau par rapport aux anciennes études : les différences qui existent entre le nouvel arbre « hôte » (en Amérique du Nord) et celui d’origine. Un ajout indispensable, selon les chercheurs, pour répondre à une question longtemps restée en suspens : comment un insecte devient-il nuisible ?

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Le puceron lanigère de la pruche à l'état larvaire © Gilles San Martin/Flickr

Aux États-Unis, l’arrivée de pucerons originaires de continents lointains est un produit de la mondialisation : commerces d’importation, voyages… autant de portes d’entrée pour envahir les écosystèmes locaux. D’après les chercheurs de l’université de Washington, six, parmi les 58 insectes étudiés, seraient particulièrement coriaces. Une fois sur le sol américain, ils s’installent sur des conifères « hôtes » qu’ils reconnaissent grâce aux similarités que ces derniers partagent avec les hôtes de la région native (densité en bois, niveau de tolérance à la sécheresse, etc.). Le hic : les arbres en Amérique du Nord n’ont pas acquis, de la même manière que leurs congénères outre-mer, les mécanismes de défense pour pallier la toxicité de ces insectes qui ont récemment conquis le continent. Alors qu’un insecte comme le puceron lanigère de la pruche (Adelges piceae) n’endommage pas le sapin d’Europe (Abies alba), il a un effet dévastateur sur le sapin américain.  

Avec cette nouvelle base de données, les chercheurs devraient ainsi être en mesure d'évaluer avec précision l’impact qu’ont certains insectes ravageurs sur leurs proies résineuses. Ce faisant, les forestiers pourront allouer les moyens nécessaires afin d’esquiver certains dommages irréversibles.