Les baleines sont les championnes du monde toutes catégories du gigantisme. Ce fait paraît aujourd’hui assez évident, mais à l’échelle de leur histoire évolutive, longue de 30 millions d’années, il est plutôt récent : ce n’est qu’il y a trois à quatre millions d’années, en effet, que sont apparus les spécimens dépassant dix mètres, alors que disparaissaient ceux de petite taille. Et ce constat vaut pour toutes les espèces de baleines étudiées. C’est la conclusion tirée par Nicholas Pyenson, le conservateur du muséum d’histoire naturelle Smithsonian, à Washington, aux États-Unis, qui abrite la plus grande collection de fossiles au monde de baleines. Menée avec des chercheurs des universités de Chicago et de Stanford, cette recherche a fait l'objet d'une publication dans la revue Proceedings of the Royal Society B en date du 24 mai 2017. 

Pourquoi donc les baleines ont-elles atteint de telles dimensions ? Sans doute, répondent les chercheurs, à cause de changements climatiques ayant modifié la distribution alimentaire dans les océans. L’allongement de ces animaux aquatiques coïncide en effet avec l’apparition de grandes calottes de glace dans l’hémisphère nord. Aux saisons chaudes, ces calottes fondent et déversent des nutriments dans les eaux côtières proches, provoquant un afflux de nourriture à certains moments de l’année et en certains endroits du globe. Ces sites étant distants de milliers de kilomètres, ce sont les animaux de grande taille, capables de voyager sur de longues distances, qui en profitent le plus. Quant aux animaux de plus petite taille, ils se trouvent désavantagés et disparaissent donc progressivement.

Sur cette vidéo (sans texte), le conservateur Nicholas Pyenson procède à la mesure des crânes des baleines détenues dans la collection du musée Smithsonian. © Musée Smithsonian  
Pour ce trio de chercheurs, l'évolution des baleines illustre bien l’interaction étroite entre les changements climatiques à l’échelle géologique et le destin de certains animaux. Et ils s’inquiètent de la capacité des grands mammifères marins à s’adapter au réchauffement de grande ampleur actuel que connaît la planète, concentré sur une période de temps si courte.