Aux termes de la nouvelle loi bioéthique, les embryons surnuméraires issus de la fécondation in vitro et ne faisant plus l'objet d'un projet parental ne pourront plus être utilisés pour des recherches scientifiques, sauf par dérogation et si le projet parental a été abandonné avant la date de promulgation de la loi. Les importations de cellules embryonnaires, qui avaient été autorisées de manière transitoire pendant le débat parlementaire, devront dorénavant obtenir l'autorisation de l'Agence de la biomédecine, créée officiellement le 5 mai 2005 sous l'impulsion de la nouvelle loi.

Entre promesses et risques

Face à la pénurie d'organes à greffer, les cellules souches embryonnaires, qui permettraient de fabriquer toutes sortes de tissus, pourraient être une solution pour réparer les organes malades.

Depuis quelques années, les essais se multiplient chez l'animal mais aussi chez l'homme pour explorer cette nouvelle voie de recherche, appelée thérapie cellulaire, qui consiste à remplacer des cellules anormales ou disparues par des cellules saines. Ainsi, des neurones fœtaux ont déjà été greffés chez des patients atteints de la maladie de Parkinson ou de Huntington et des cellules souches musculaires ont été greffées dans le cœur d'un patient atteint d'insuffisance cardiaque.

Mais, pour le moment, il ne s'agit que d'un terrain d'expérimentation. On ne sait toujours rien du gain médical que représentent ces cellules souches. Il existe un risque que les cellules transplantées provoquent des anomalies ou des tumeurs. Les cellules souches partagent en effet avec les cellules cancéreuses la capacité de se diviser indéfiniment. Or, des tests chez la souris ont montré qu'elles peuvent parfois se transformer en tumeurs.

Différents types de cellules souches

Les cellules souches pluripotentes Les cellules souches pluripotentes sont prélevées sur des blastocystes (embryons âgés de cinq à sept jours) puis mises en culture. Leur différenciation est orientée “in vitro“ vers un type particulier de cellules adultes puis réimplantées dans l’organe à réparer, ici le cœur. © Science actualités (CSI) 2005 d'après University of Wisconsin-Madison

D'une manière générale, les cellules souches sont des cellules indifférenciées, capables de se diviser infiniment et de donner naissance à des cellules différenciées. Il en existe quatre types :

Les cellules souches unipotentes

Elles ne peuvent former qu'une sorte de cellules différenciées. Exemple : les kératinocytes de la peau.

Les cellules souches multipotentes

Elles sont à l'origine de plusieurs types de cellules différenciées. Exemple : les cellules souches de la moelle osseuse qui sont à l'origine de toutes les cellules sanguines (globules rouges et blancs, plaquettes, etc.).

Les cellules souches pluripotentes, ou cellules souches embryonnaires

Elles sont issues de l'embryon âgé de plus de 4 jours et peuvent engendrer tous les tissus de l'organisme, mais pas un être humain dans son entier.

Les cellules souches totipotentes

Ce sont les seules cellules capables de régénérer un être humain dans son entier. On les trouve uniquement dans l'embryon au cours des quatre premiers jours de son développement.

Des cellules à la carte

Vers la production de cellules souches à la carte par la technique de clonage? Jacques Samarut, directeur de recherches au CNRS, laboratoire de biologie de l'École normale supérieure de Lyon. © Science actualités (CSI)

Par ailleurs, tout comme les greffes d'organes, les greffes de cellules embryonnaires poseraient des problèmes de rejet.

Pour pallier cet obstacle, certains scientifiques envisagent d'utiliser le clonage thérapeutique, une technique ouvrant la voie à la fabrication de cellules souches ''sur mesure''. L'embryon sur lequel seraient prélevées ces cellules proviendrait de la fusion du noyau d'une cellule de la personne malade avec un ovocyte receveur énucléé. Les cellules embryonnaires seraient donc parfaitement compatibles au plan immunologique et leurs greffes parfaitement tolérées.

Une étape importante franchie par des chercheurs sud-coréens

Publiant ses résultats le 12 février 2004 dans l'édition en ligne de la revue ''Science'', une équipe de l'université nationale de Séoul a, pour la première fois, réussi à produire par clonage un embryon humain et à en tirer des cellules souches. Une “révolution biomédicale'' qui soulève une importante question éthique non résolue à ce jour : peut-on créer un embryon à des fins médicales ? En France, la loi adoptée le 11 décembre 2003 interdit le clonage thérapeutique. La transgression de l'interdiction sera passible d'une peine de sept ans de prison et de 100 000 euros d'amende.

La solution se trouve-t-elle chez l’adulte ?

Face aux obstacles éthiques dressés par l'utilisation des cellules souches chez l'embryon, les chercheurs se tournent vers d'autres types de cellules : des cellules souches isolées cette fois chez l'adulte. De nombreux tissus et organes d'un sujet adulte renferment des cellules souches qui contribuent à leur réparation. Celles-ci ont une spécificité de tissu ou d'organe mais elles peuvent changer de vocation.

Les cellules souches embryonnaires sont-elles encore indispensables à la recherche médicale ? Jacques Samarut, directeur de recherches au CNRS, laboratoire de biologie de l'École normale supérieure de Lyon. © Science actualités (CSI)

Ainsi, des chercheurs ont montré que, chez la souris, une cellule souche de moelle osseuse était capable, dans certaines conditions expérimentales, de donner naissance à des cellules d'autres tissus (foie, peau, poumons, tractus gastro-intestinal). Une équipe française a réussi à obtenir, toujours chez la souris, des cellules cardiaques fonctionnelles à partir de cellules de tissus adipeux.

Chez l'homme, des chercheurs de l'Université de Californie (San Francisco) ont obtenu, à partir d'échantillons de tissu cérébral, des cellules souches qui pouvaient se multiplier in vitro et se différencier en neurones dans certaines conditions. Mais cette capacité ne semblait pas fonctionner in vivo (''Nature'', 19 février 2004). Enfin, une équipe de chercheurs coréens a annoncé, le 9 juin 2005, avoir « amélioré de manière significatives » la guérison de 64 patients souffrant d'attaques cérébrales en leur injectant dans leur cerveau des cellules souches issues de leur moelle épinière.