La 21e Conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP21/CMP11), présidée par la France, se tient au Bourget (Seine-Saint-Denis), du 30 novembre au 11 décembre. Plus de 40 000 participants y sont attendus. Aux délégations des 195 pays et de l’Union européenne s’ajoutent celles de nombreux autres participants : société civile, entreprises, organisations non gouvernementales (ONG), scientifiques, collectivités territoriales, populations autochtones, syndicats et bien sûr médias du monde entier.
L’échéance est cruciale, puisque les États doivent s’entendre pour entériner un nouvel accord international sur le climat qui remplacera, dès 2020, le protocole de Kyoto, en vigueur depuis 2005. Cet accord se veut contraignant et universel, c’est-à-dire conclu par tous et applicable à tous les pays autour d’un objectif très ciblé : limiter le réchauffement climatique à 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle d’ici à 2100. Un accord qui par ailleurs devra faire l’objet d’un suivi précis pour vérifier l’adoption des mesures prises et leur efficacité réelle.

Les États semblent aujourd’hui presque unanimes : le doute n’est plus permis sur la responsabilité humaine dans le réchauffement de la planète. Et si l’on maintient la trajectoire actuelle en terme de production et de consommation des énergies fossiles, le dérèglement climatique sera l’horizon des générations futures.
Les activités humaines, essentiellement depuis le XIXe siècle, génèrent des gaz à effet de serre (GES) dits « anthropiques », lesquels cumulés aux GES présents naturellement dans l’atmosphère, sont à l’origine du réchauffement progressif de la Terre.
Mais ce n’est pas tout. Les émissions des GES ont bondi de 80 % depuis 1970 et de 30 % depuis 1990. Si le rythme actuel se poursuit – c’est-à-dire +2,2 % par an de 2000 à 2010 –, on doit s’attendre à une hausse des températures moyennes mondiales comprise entre 3,7 et 4,8 °C d’ici à 2100. Si ce scénario se réalise, les conséquences néfastes du réchauffement planétaire qui se font déjà sentir s’amplifieront.

Objectif 2°C

Pour atteindre une hausse maximum de 2 °C à cette date et rester en-deçà du seuil critique, il faut limiter les concentrations atmosphériques de C02 et réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 à 70 % en 2050 (par rapport au niveau de 2010), afin d'atteindre finalement des niveaux proches de zéro émission de CO2 en 2100. 
Le cœur de l’accord qui est âprement négocié lors de cette COP21 consiste à créer une sorte d’alliance entre toutes les parties afin de maintenir l’élévation de la température moyenne de la planète sous 2 °C d’ici 2100 et d’adapter nos sociétés aux dérèglements existants. Le volet financier en est la cheville ouvrière. Grâce au Fonds vert, une manne de 100 milliards de dollars par an d'ici à 2020 est prévue pour soutenir les pays en développement... si les États du monde entier réunis au Bourget signent cet accord.

Pour comprendre les enjeux de la COP21, rendez-vous à la Cité des sciences et de l'industrie pour l'exposition "Climat, l'expo à 360°".

La COP21 au jour le jour

Lundi 30 novembre 2015 : ouverture de la COP21

150 chefs d’État et de gouvernement sont accueillis au Bourget par le président François Hollande, le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon et le président de la COP21 Laurent Fabius. Selon un ordre protocolaire, chacun d'eux prononcera un discours de moins de trois minutes, avant de laisser place aux négociations.
« Mission Innovation »
C'est le jour du lancement de plusieurs projets, notamment de l’initiative « Mission Innovation » (« Clean Tech ») portée par le cofondateur de Microsoft, Bill Gates, et les États-Unis. Il s’agit de la mise en place d’un fonds de financement, le « breakthrough Energy Coalition », de plusieurs milliards de dollars, en faveur du développement des technologies bas-carbone. C’est à dire de technologies qui émettent moins de CO2 (GES) que celles provenant de la combustion des énergies fossiles, responsables en grande partie du réchauffement de la planète.
Cet engagement financier, le plus important jamais envisagé pour un tel projet, regrouperait dix-neuf pays. Ceux-ci sont invités à doubler leurs budgets en recherche et développement d’ici à 2020. Ils seraient rejoints par au moins vingt-sept investisseurs privés parmi lesquels des poids lourds comme Mark Zuckerberg  de Facebook, Jeffrey Bezos d’Amazon ou bien encore le fondateur du groupe Virgin, Richard Branson. Quant à Bill Gates, il a déjà annoncé il y a quelques mois qu’il comptait investir entre 1 et 2 milliards de sa fortune personnelle sur les cinq prochaines années dans la recherche sur les énergies renouvelables. Cette annonce pourrait peut-être avoir des retombées positives sur les négociations de la COP21. A suivre...
Deux autres projets d’envergure sont aussi lancés : celui de l’« Alliance Solaire Internationale », coopération de 120 pays pour soutenir la promotion de l’énergie solaire. Et le « Panel des leaders mondiaux sur le prix du carbone » présidé par la Banque mondiale et le FMI, qui vise à développer une tarification du carbone à l’échelle internationale.

Mardi 1er décembre : 2 milliards d’euros pour les énergies renouvelables en Afrique

Poursuivant son soutien aux énergies renouvelables, la France promet des fonds pour leur développement en Afrique.
Aujourd’hui, lors du sommet « Défi climatique et solutions africaines »  qui se déroule avec des dirigeants africains au Bourget, le président François Hollande a annoncé que la France investira deux milliards d’euros au développement des énergies renouvelables en Afrique.

Mercredi 2 décembre : le Canada et la Chine montent en puissance

Alors que les négociations continuent dans l’ombre, l’organisation non-gouvernementale britannique OXFAM rappelle les inégalités mondiales en matière d’émissions de GES. Elle affirme dans un rapport rendu public aujourd’hui que la moitié des émissions de CO2 sont émises par les 10 % des habitants les plus riches de la planète, 50 % des habitants les plus pauvres n’étant à l’origine que de 10 % des rejets de CO2
Dans ce contexte et malgré une volonté affichée des chefs d’État de conclure un accord lors de la COP21, celui-ci est encore loin d’être acquis. En effet, si la plupart des participants sont arrivés à Paris avec des propositions et des engagements chiffrés pour limiter les émissions de CO2, tous ont leurs exigences. 

Cette carte interactive réalisée à partir de données du World Resources Institute propose une synthèse pour chaque pays des engagements de réduction des GES, en se basant sur leur part dans les émissions mondiales en 2012.
La question de la « responsabilité historique » des pays industrialisés dans le dérèglement climatique associée à celle des aides financières à attribuer aux pays les plus démunis pour s’adapter aux effets du réchauffement sous-tend les négociations. D’emblée, les États-Unis, le plus grand pollueur de la planète après la Chine, refusent un cadre juridique contraignant. Par contre, le Canada, longtemps mauvais élève, change de cap et s’engage par exemple à limiter l’expansion de l’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta, très émetteurs de gaz à effet de serre.
L’Inde, troisième pollueur mondial, a dès l’ouverture de la COP21 clairement rappelé, par la voix de son Premier ministre Narendra Modi, son refus de signer l’accord s’il n’est pas accompagné d’aides financières suffisantes. L’effort entre les pays avancés et les pays pauvres doit être équitable, a-t-il averti. Il renvoie ainsi le Nord et le Sud à leur désaccord historique sur le partage des responsabilités et des efforts à accomplir pour lutter contre le réchauffement climatique.
De son côté, la Chine, deuxième économie mondiale et premier pollueur de la planète, semble jouer le jeu. Plus grand producteur et consommateur de charbon au monde, elle a annoncé aujourd’hui une réduction de 60 % de ses rejets de CO2 dans les centrales au charbon d’ici à 2020.

Jeudi 3 décembre : vers le pré-bouclage du projet d’accord

Hier, le président de la COP21 Laurent Fabius a appelé les 195 pays et l’Union européenne à « accélérer » leurs travaux. Un message qui semble aujourd’hui avoir été entendu. Les délégués chargés de négocier l’accord sur le climat ont publié sur le site de la Convention des Nations Unies sur les changements climatiques (CNUCCC) un nouveau projet de texte qui doit être encore peaufiné demain. Mais c’est samedi midi qu’un projet d’accord, « le plus lisible possible avec un maximum d’options tranchées », devra être rendu définitivement, afin que lundi les ministres puissent à leur tour prendre le relais. En effet, toute la difficulté réside en l’obtention d’un projet suffisamment restreint pour qu’un accord contraignant soit signé par tous à la fin de la COP21.

Vendredi 4 décembre : les points d'achoppement

Pour mieux comprendre où en sont les négociations sur le climat aujourd’hui : décryptage sur la façon dont s’opèrent leurs avancées à travers la presse.
COP21 : tensions sur le texte de l’accord (Le Monde)
COP21 : l’effroyable casse-tête des « options » et des « crochets » (Le Monde)
Un point de » friction » : « [sous 1,5 °C [ou] [bien] au-dessous de 2 °C] »
Dans la version du 3 décembre, deux options de l’article 2  sont encore en discussion : il ne s’agit rien de moins que de l’objectif de l’accord. Une option définit entre autres, le seuil limite du réchauffement à ne pas dépasser (« [sous 1,5 °C [ou] [bien] au-dessous de 2 °C] »). Une seconde option propose de la supprimer.
Ce point de désaccord est loin d’être anodin. En effet, il cristallise les tensions de certains pays. Les plus vulnérables considèrent, comme l’indique le dernier rapport du GIEC, que l’objectif des 2 °C est encore trop élevé et ils se battent pour que la limite de 1,5 °C soit mentionnée dans l’accord. Alors que d’autres pays, gros émetteurs de gaz à effet de serre, font barrage.
Réchauffement : le seuil limite des 2 °C est trop élevé (Le Monde)

Réchauffement climatique : +2°C, la ligne rouge à ne pas franchir (Sciences et avenir)

Lundi 7 décembre : une mi-temps encourageante


Une nouvelle version du projet accord a été adoptée samedi midi, après une semaine d’intenses tractations. Ce texte de 43 pages sert de base de négociation pour la semaine à venir. Place aux ministres qui prennent donc le relais, afin que vendredi un accord universel soit signé. Ces 14 « facilitateurs » devront trancher parmi de très nombreuses options, et lever des points d’achoppement comme le financement de l’aide climatique aux pays du Sud, la répartition des efforts entre pays développés, émergents et les plus vulnérables.

Mardi 8 décembre : pour la première fois, une baisse des émissions de CO2 en période de croissance économique

Une nouvelle plutôt positive pour le climat. Malgré une croissance économique continue, les émissions de CO2 provenant des combustibles fossiles et de l’industrie se sont stabilisées en 2014. Elles devraient même être en légère baisse d’environ 0,6 % en 2015, indique une étude parue dans la revue Nature Climate Change. Les émissions avaient déjà baissé par le passé lors des périodes de crise économique, par exemple celle de 2009. Mais c’est la première fois qu’une telle baisse est constatée en période de croissance économique mondiale (+3,4 % en 2014). Selon cette étude, outre la diminution de l’utilisation du charbon en Chine, une croissance mondiale plus lente dans le pétrole et une croissance plus rapide des énergies renouvelables expliqueraient cette rupture de tendance.
En complément : COP-21 : 36 gigatonnes de CO2 émis en 2014 (Blog de Sylvestre Huet-Libération)

Mercredi 9 décembre : MicroCarb, une solution spatiale pour mesurer le CO2

Ségolène Royal, ministre de l’Écologie, a annoncé hier à la COP21, le financement d’un projet baptisé MicroCarb. Ce microsatellite est destiné à cartographier à l’échelle planétaire, les sources et les puits de CO2, principal gaz à effet de serre.
Vingt-cinq millions d’euros seront alloués dans un premier temps à ce projet, développé par le CNES, pour un coût total d’environ 175 millions d’euros.
Étonnamment, on ne sait pas mesurer précisément le dioxyde de carbone (CO2) absorbé ou rejeté dans l’atmosphère par les villes, la végétation, les océans, ni sa variation au fil des saisons, du fait d’un manque de stations de mesures terrestres. Pour pallier ce déficit de données, la Nasa a déjà envoyé en 2014 dans l’espace un satellite : OCO-2. MicroCarb pourrait donc prendre la relève dès 2020. Il sera alors capable de mesurer la teneur en CO2 sur l’ensemble de l’atmosphère avec une grande précision.

Jeudi 10 décembre : J-2 avant la signature de l’accord

négociateurs au travail

Vendredi 11 décembre : l’accord final repoussé à samedi matin


« Nous sommes extrêmement proches du but, il est temps de conclure. Il reste à faire les derniers mètres, et comme dans un marathon, ce sont souvent les plus compliqués », a déclaré Laurent Fabius hier soir avant d’entamer avec tous les négociateurs une nouvelle nuit blanche. Le texte définitif devait être adopté vendredi soir, mais la version finale sera présentée samedi matin. Un délai nécessaire aux ultimes négociations pour parvenir à un accord ambitieux et universel, selon le président de la COP21.

Samedi 12 décembre : un accord « historique » enfin scellé

L’accord pour lutter contre le réchauffement climatique est enfin entériné. Ce texte de 39 pages, loin d’être parfait aux yeux de beaucoup et particulièrement des ONG environnementalistes, est tout de même considéré comme « historique ». C’est en effet la première fois que 195 pays et l’Union européenne s’engagent, notamment, à limiter la hausse des températures « bien en deçà des 2 °C » et « à poursuivre les efforts pour limiter la hausse de la température à 1,5 °C », à atteindre l’objectif « zéro émission nette » – c’est-à-dire baisser les émissions de gaz à effet de serre avec pour objectif qu’elles puissent être compensées par les puits de carbone (forêts, océans, techniques de capture et stockage du carbone) à partir de 2050 –, à « éviter et de réduire au minimum les pertes et préjudices associés aux effets négatifs du changement climatique (…) ». Et, point essentiel pour les États du Sud, les États du Nord font la promesse de verser annuellement au moins 100 milliards de dollars, pour leur permettre de faire face aux impacts du dérèglement climatique.