Jour de marché à Saint-Georges-de-l'Oyapock, une bourgade morne de 3 600 âmes plantée sur le rebord est de la Guyane. En arrière-plan s'étalent une brume matinale et l'Oyapock, un fleuve large et paisible parcouru par quelques pirogues motorisées. Au-delà, c'est l'autre rive, sombre, sauvage, verdoyante : le Brésil.
Il faut remonter un peu le fleuve pour trouver un réel point d'activité sur cet horizon brésilien. Des échafaudages, des grues, des bruits de moteurs et des hommes en combinaison orange qui s'affairent : le chantier d'un pont. Un ouvrage imaginé en novembre 1997 par les présidents Jacques Chirac et Fernando Henrique Cardoso et qui, treize ans plus tard, devrait pour la première fois relier la Guyane française au Brésil. Lors de notre passage, il y a quelques mois, seuls les pylônes étaient sortis de terre. Ils se faisaient face telles des tours de garde.
Des tours qui gardent une autre enclave humaine, une tache pâle dans la végétation : Oiapoque, une ville bruyante, bouillonnante de 21 000 habitants dont un nombre indéterminé de chercheurs d'or attirés sur cette frontière par la promesse de l'Eldorado guyanais. Quand on s'approche de cette rive, on découvre une inscription gravée sur une stèle grisâtre : « Aqui começa o Brasil ». Ici commence le Brésil et plus précisément, l'Amapa, le plus jeune des États fédérés du Brésil.