Il y a 160 millions d’années, alors que les dinosaures régnaient sur Terre, les mammifères disposaient-ils de niches écologiques suffisamment variées pour pouvoir se diversifier ? À l’université de Chicago, le Pr Zhe Xi Luo tend à penser que oui, comme le montre une étude parue dans la revue Science en date du 13 février 2015. Le chercheur et son équipe ont en effet mis au jour, en Chine, deux fossiles de mammifères primitifs de la famille des docodontes présentant des évolutions très différentes.

Le premier d’entre eux, baptisé agilocodon, est clairement adapté à une vie arboricole, comme en témoignent les proportions de ses membres ou bien les griffes courbes à l’extrémité de ses pattes. Sa dentition, semblable à celle de certains singes du Nouveau Monde, laisse penser qu’il était capable d’attaquer l'écorce des arbres pour se nourrir de leur sève.

Le second mammifère, baptisé docofossor, partageait un tout autre milieu : il vivait sous terre. Ses pattes étaient adaptées à une vie fouisseuse, caractérisées notamment par des phalanges plus larges et plus courtes, certains segments osseux étant soudés : une adaptation connue d’ailleurs chez certains mammifères contemporains comme la taupe dorée que l’on peut trouver dans certains déserts africains. Cette adaptation est due à la mutation des gènes BMP et GDF-5, et selon le Pr Luo, ce sont sans doute les mêmes gènes qui ont permis au docofossor d’évoluer vers une vie souterraine.
Quoi qu’il en soit, ces deux nouveaux fossiles montrent que, bien avant la fin des dinosaures, les mammifères avaient déjà tout le potentiel pour conquérir le monde.