Une forêt vierge et hostile, peuplée de serpents, de grenouilles venimeuses et de jaguars. Des peuples primitifs, isolés, belliqueux et parfois même cannibales... L’image que l’on se fait de l’Amazonie est empreinte des fantasmes que cette terre inspire depuis sa découverte à la fin du XVe siècle. 
Pourtant, au fil des études, l’Amazonie se dévoile, laissant notamment apparaître qu’elle a accueilli, avant l’arrivée des Européens, bien plus d’habitants qu’on ne l’imaginait. C’est la principale conclusion de l’archéologue Jonas Gregorio de Souza, de l’université d’Exeter, au Royaume-Uni, qui vient de mettre au jour des traces d’habitations dans le haut bassin de la rivière Tabajos au Brésil, et dont les travaux sont parus dans la revue Nature Communications.

Près de 1 million d’habitants

À la faveur de la déforestation, l’équipe du chercheur a pu étudier des images satellites de la région à la recherche de traces d’habitations et de terrassements. Résultat : 81 nouveaux sites ont été découverts sur une distance de 1800 kilomètres d’est en ouest. Parmi ceux-ci, 24 ont été explorés, permettant de mettre au jour des céramiques, des outils ou encore des systèmes d’évacuation, prouvant que ces sites étaient habités entre 1250 et 1500 ans après J.C., avant l’arrivée des Européens.

Selon les archéologues, entre 500 000 et 1 million d’habitants, principalement des fermiers, vivaient dans ces villages, parfois fortifiés et de taille très variable. Ces villages étaient répartis sur une surface de 400 000 km², soit 60 % de la superficie de la France. À l’exception de quelques grandes villes qui avaient probablement une influence sur les villages alentour, chaque cité fonctionnait a priori de façon indépendante.

L’Amazonie redécouverte

Cette découverte montre que l’Homme a modifié et modelé la forêt de façon bien plus importante que nous ne l’avions envisagé. Elle remet également en cause les estimations courantes selon lesquelles 1,5 à 2 millions d’habitants seulement peuplaient l’ensemble de l’Amazonie à l’ère précolombienne. Reste à vérifier que des vestiges similaires existent bien dans les régions amazoniennes situées plus au nord.

L’archéologue Stéphen Rostain commente cette découverte.
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