La théorie selon laquelle la recette prébiotique de la vie viendrait en partie de l’espace a trouvé un nouvel écho. Dans un article publié par Science, des chercheurs des universités de Nice et de Paris-Sud, du CNRS, de l’IAS et du synchrotron Soleil annoncent avoir obtenu du ribose et d’autres molécules de sucre de la famille des pentoses, en fabriquant artificiellement de la glace de comète bombardée de lumière solaire (UV).
L’obtention de ces premiers éléments de support de l’information génétique vient s’ajouter à l’inventaire des autres briques de la vie qui naîtraient dans les glaces cométaires. En 2012, des acides aminés – des molécules qui permettent de composer les protéines du vivant – avaient été obtenus dans les mêmes conditions. En 2015, la même équipe avait également trouvé deux molécules entrant dans la composition des sucres. « Nous pensions trouver ces deux molécules et des acides aminés, confie Cornelia Meinert, chercheuse à l’institut de chimie de Nice (CNRS), mais le ribose était une surprise parce qu’il est très difficile à obtenir ». Jusqu’ici, les chimistes parvenaient à le synthétiser en laboratoire, mais son origine naturelle première restait mystérieuse.

Tester pour savoir quoi chercher

L’ARN (acide ribonucléique) est considéré comme le premier matériel génétique connu chez les êtres vivants. Il ne comporte qu’un seul brin. L’ADN à doubles brins (acide désoxyribonucléique) serait apparu plus tard. Cette étude suggère que les sucres qui composent le squelette du génome pourraient être créés à bord des comètes. « La chimie du milieu interstellaire permet de tester l’hypothèse selon laquelle les premiers éléments de la vie viendraient de l’espace », commente l’un des auteurs, Louis Le Sergeant d’Hendecourt, astrochimiste à l’IAS (CNRS/Université Paris-Sud).

La présence d’acides aminés dans plusieurs échantillons de météorites appuie les résultats obtenus en laboratoire. Reste maintenant à détecter du ribose ou d’autres sucres de cette famille sur des corps célestes. « La chimie de laboratoire permet de savoir quoi chercher, explique Cornelia Meinert. Mais les appareils de mesure à bord des missions spatiales actuelles, comme Rosetta, n’avaient pas prévu ou ne sont pas capables de détecter les sucres ».

D’autres surprises dans les comètes ?

Pour les auteurs de l’étude, si des acides aminés et du ribose ont pu se former dans les glaces interstellaires, il est envisageable que d’autres molécules prébiotiques puissent y voir le jour. « Nous allons poursuivre l’expérience, cette fois en cherchant des bases nucléiques. Ce sont ces bases, appelées A, T, G, C ou U qui forment le code génétique. Pour cela, il faudra légèrement changer les conditions initiales qui ont permis d’obtenir le ribose, tout en restant compatible avec le milieu interstellaire », confie Louis Le Sergeant d’Hendecourt.