Apparue dans le domaine médical au début des années 80, l'imagerie par résonance magnétique (IRM) est aujourd'hui largement répandue dans le monde entier. L'IRM constitue en effet la méthode de diagnostic la plus puissante et la plus sensible disponible actuellement : elle permet d'obtenir une image de n'importe quel organe, dans n'importe quelle coupe et dans un délai relativement court, avec des résultats bien supérieurs aux autres techniques d'imageries (radiologiques, échographiques…).

Son principe pourrait se résumer de la façon suivante : lorsque l'on expose un patient à un champ magnétique intense, l'eau présente dans son corps réagit par un signal nommé « résonance magnétique ». Capté par un appareil et analysé par ordinateur, il permet de dresser une carte tridimensionnelle des organes et de leurs lésions éventuelles.

Un examen d'IRM Lors d'un examen d'IRM, le patient est soumis à un champ magnétique intense (30000 plus puissant que celui de la Terre). L'eau présente dans son corps réagit par un signal nommé ''Résonance magnétique''. © CSI/CNRS

Avantage de cette méthode, elle n'est pas invasive et ne présente donc aucun risque d'infection ou d'allergie. De plus, ne faisant appel à aucun rayonnement ionisant (contrairement à la radiographie basée sur les rayons X), elle ne présente, a priori, aucun danger pour le patient (excepté pour les personnes possédant une prothèse électronique).

L'IRM a ainsi considérablement amélioré le diagnostic de toute une série de maladies. Elle est extrêmement utile pour des analyses du cerveau ou de la moelle épinière, en particulier pour le diagnostic de la sclérose en plaque. Elle peut également se substituer à l'arthroscopie (l'examen des articulations). Elle permet aussi aux chirurgiens de localiser avec précision les tumeurs à opérer. Et c'est également avec l'IRM que l'on peut guider le déplacement d'électrodes à l'intérieur du cerveau dans le cadre de traitements de la maladie de Parkinson.

Malgré son coût élevé, quelque 22 000 appareils spécialisés fonctionnent actuellement dans le monde. Ils permettent chaque année de réaliser plus de 60 millions d'examens.

De la théorie aux applications médicales

Paul Lauterbur Paul Lauterbur est né le 6 mai 1929 à Sidney (Ohio). Diplômé de l'Université de Pittsburgh (Pennsylvanie), où il obtient en 1962 son doctorat de chimie, Paul Lauterbur devient professeur en 1969. En 1985, il prend la direction du laboratoire de résonance magnétique de l'Université d'Illinois (Chicago), et enseigne au département de médecine. Membre de l'Académie Nationale des Sciences, il a reçu, entre autres distinctions, la National Medal of Science (1985), la Roentgen Medal (1987) et la Médaille d'Or du Congrès Européen de Radiologie (1999). © DR

Si l'utilisation de l’IRM à des fins médicales remonte à une vingtaine d'année, son principe n’est pas nouveau : les premières recherches fondamentales sur l’interaction entre le magnétisme et les atomes remontent aux années 30.

Au début des années 50, le concept est d’ailleurs parfaitement défini : les Américains Felix Bloch et Edward Mills Purcell montrent que les noyaux atomiques émettent des ondes radios après avoir été accélérés en étant soumis à un fort champ magnétique. Pour cette découverte, les deux scientifiques seront récompensés en 1952 par le Prix Nobel de physique. Cependant, en raison des moyens technologiques limités de l’époque, l’IRM ne trouve pas encore d’application.

Peter Mansfield Peter Mansfield est né le 9 octobre 1933 à Londres. Diplômé de l'Université de Londres, où il obtient son doctorat en 1962, le physicien est chercheur associé à l'Université d'Illinois, la même année. En 1964, il revient en Grande-Bretagne, et intègre le département de physique de l'Université de Nottingham. Il rejoint entre 1972 et 1974 l'Institut Max Planck de recherche médicale de Heidelberg avant de revenir à Nottingham, où il devient professeur en 1979. Anobli en 1993, il est aujourd'hui professeur émérite de l'Université de Nottingham. Passionné de vol, il est titulaire d'une licence de pilotage de petits avions et d'hélicoptères. © DR

C’est finalement au début des années 70, grâce aux travaux
de Paul Lauterbur et Peter Mansfield – lauréats du Prix Nobel de médecine 2003 – ainsi que Raymond Damadian, que l’imagerie par résonance magnétique trouve un débouché médical.

Paul Lauterbur, chimiste américain, a découvert en particulier qu'il était possible de créer une image bidimensionnelle en jouant sur l'intensité du champ magnétique.

Peter Mansfield, physicien britannique, a affiné la méthode : il a établi les modalités du traitement mathématique et de l'analyse par ordinateur des signaux, permettant de mettre au point une technique d'imagerie utilisable. Il a également montré que l'acquisition de l'image pouvait être extrêmement rapide.

Damadian, le Nobel oublié ?

Reste l'oublié du Nobel : Raymond Damadian. Dès 1969, le médecin américain avait été le premier à envisager la détection des tumeurs cancéreuses par IRM. Malgré le scepticisme de la communauté scientifique, il avait entrepris la réalisation d'un aimant supraconducteur qui devait aboutir en 1977 aux premières images du thorax humain. Certes, en 1976, Lauterbur et Mansfield avait déjà obtenu des images de petits objets. Il n'en reste pas moins que l'idée initiale et la première application pratique de l'IRM sont venues de Damadian.

Raymond Damadian se déclare profondément déçu par cette décision, jugeant même que « le Comité Nobel a tenté de réécrire l'Histoire ». Le médecin vient ainsi d'entamer une campagne pour faire valoir sa place de « père » de l'IRM. Il est suivi dans sa démarche par une grande partie de la communauté scientifique qui juge, comme lui, que les travaux des lauréats arrivent « en deuxième et troisième position dans la mise au point de l'IRM ». Une démarche qui restera vraisemblablement sans suite : les décisions du Comité Nobel sont sans appel.

L’IRM également récompensée par l’Institut de France

Denis Le Bihan et Stanislas Dehaene ont reçu, le 20 octobre, le Grand Prix Scientifique 2003 de la Fondation Louis D.-Institut de France pour leurs recherches dans le domaine de l'imagerie du cerveau, au Service Hospitalier Frédéric Joliot (SHFJ), établissement du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA), à Orsay (Essonne).

Denis Le Bihan, physicien et médecin, directeur de l'unité de neuro-anatomie fonctionnelle du SHFJ, a contribué au développement de méthodes d'imagerie permettant notamment d'étudier le fonctionnement du cerveau humain en imagerie par résonance magnétique (IRM).

Stanislas Dehaene, directeur de l'unité Inserm de Neuro-imagerie cognitive au SHFJ, effectue des recherches sur les bases cérébrales de fonctions cognitives particulièrement développées dans l'espèce humaine (calcul, compréhension du langage, planification consciente...).

Créée en 2000, pour soutenir des associations, des fondations, des personnes morales ou des organisations non gouvernementales qui ont une action à caractère caritatif ou culturel ou dont le but est d'encourager la recherche scientifique, la Fondation Louis D.-Institut de France décerne chaque année deux Grands Prix Scientifiques dotés de 750.000 euros chacun.

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