Aujourd’hui, pour faire un test de dépistage du VIH – infection à l’origine du sida –, il existe deux possibilités : s’adresser à son médecin traitant ou se rendre dans un centre de dépistage anonyme et gratuit ou un centre de planification. Une troisième possibilité devrait bientôt être proposée en France : se tester soi-même en utilisant un kit spécial acheté en pharmacie.
Ce type de dispositifs de diagnostic à domicile permet, à partir d’un échantillon de liquide créviculaire (fluide buccal) ou d’une goutte de sang (prélevée par exemple au bout du doigt comme pour les appareils de contrôle de la glycémie), de détecter la présence d’anticorps anti-VIH. Cela fonctionne pour les deux types d’infection : VIH-1 et VIH-2. Au bout d'une vingtaine de minutes d’analyse, l’instrument affiche le résultat. Pour qu’il puisse révéler la présence d’anticorps, il faut que la personne ait été contaminée au moins trois mois avant la réalisation du dépistage alors que les tests sanguins classiques en laboratoire peuvent être considérés comme fiables à partir de six semaines.

Déjà en vente aux États-Unis

Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a autorisé la vente en magasins et en ligne du test de VIH sur liquide créviculaire à domicile OraQuick, commercialisé par la société OraSure Technologies. En Europe, aucun autotest n’a encore obtenu le marquage de conformité « CE » requis par la directive européenne 98/79/CE, mais plusieurs fabricants ont déjà entamé la procédure. « Certains sites marchands sur Internet proposent toutefois des autotests prétendant bénéficier d’un tel marquage CE », a mis en garde l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en février 2014. Avançant l’absence de preuve de « leur efficacité » et de « leur qualité », elle déconseille l’achat de ces tests en ligne.

Voici le message informatif diffusé par l'entreprise OraSure pour présenter son produit OraQuick aux États-Unis. 
En France, en mars 2013, le Conseil national du sida (CNS) s’est déclaré favorable à la mise à disposition des autotests de dépistage du VIH (ADVIH). Plus réservé, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’est contenté d’insister sur les mesures à prendre pour accompagner leur commercialisation en réponse aux problèmes éthiques posés. La mise en place d’une assistance téléphonique d’écoute et de conseil est proposée, notamment pour atténuer la solitude des utilisateurs face à un diagnostic positif. Ces tests étant également moins fiables que ceux des méthodes classiques de dépistage, le CCNE demande à ce que les notices exposent clairement et précisément le risque de faux positifs.
Le 1er décembre 2014, à l’occasion de la Journée mondiale contre le sida, le ministère de la Santé a annoncé que les autotests VIH seraient vendus en pharmacie à partir du 1er juillet 2015, tout en soulignant qu’ils ne remplaceraient pas les dispositifs actuels de dépistage, mais les complèteraient. La mise en place d’un service téléphonique de soutien a, de plus, été confirmée.

Jugé pratique, rapide et anonyme

« Parmi les personnes qui entretiennent des relations sexuelles et pour lesquelles le risque d’être contaminées par le VIH est élevé, certaines le font dans le plus grand secret, explique Tim Greacen, directeur du laboratoire de recherche de l’Établissement public de santé Maison Blanche et cofondateur de l’Espace social et psychologique d’aide aux personnes touchées par le virus du sida. Souvent, elles refusent d’aller chez leur médecin ou dans un Centre de dépistage anonyme et gratuit de peur d’être découvertes. » L’achat d’un ADVIH en ligne pourrait constituer une bonne solution pour elles.
Le respect de l’anonymat n’est pourtant pas la première raison avancée pour l’utilisation des autotests par les participants de l’étude Webtest menée en 2009. Plus de 9 000 hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) ont répondu au questionnaire en ligne associé en l’espace de six semaines. Les résultats, publiés en mars 2012 dans le journal Sexually Transmitted Infections, rapportent que c’est d’abord l’aspect pratique qui incite à se procurer un ADVIH. « Pour les populations qui se savent à risque, ça permet de faire un dépistage régulier tous les trois mois. Il suffit d’avoir commandé un test sur Internet et de l’avoir conservé dans son frigo après réception à domicile », argue Tim Greacen, corédacteur de la publication. Une solution infiniment plus simple, donc, que de se rendre dans un centre de dépistage pas toujours accessible,  en termes de localisation et d’horaires – ou qui exige du moins de s’organiser. C’est ensuite la rapidité du dispositif qui est appréciée, l’anonymat n’arrivant qu’en troisième position.
« Il reste le problème de l’accès aux soins pour les personnes qui apprennent leur séropositivité par ces tests », ajoute Tim Greacen. Rien ne garantit qu’après lecture d’un résultat positif sur un autotest, elles chercheront confirmation par une analyse de sang, ni qu’elles se rendront chez un médecin. Par contre, « ce qui est positif, c’est que d’après plusieurs études, elles feraient ensuite plus attention, pour éviter de transmettre le virus à leurs partenaires ». La mise sur le marché des autotests pourrait ainsi devenir un outil de limitation de la transmission du VIH.