Déjà partiellement interdits aux États-Unis et en Europe, le Triclosan et le Triclocarban, deux antibactériens présents dans de nombreux produits de consommation courante, mobilisent les scientifiques. Plus de 200 chercheurs et professionnels de la santé issus de 29 pays ont signé une déclaration lors du dernier symposium DIOXIN, qui s'est tenu à Florence. Publiée le 20 juin dans la revue Environnemental Health Perspectiveelle appelle à une réglementation drastique de ces deux produits dans le monde entier.

Perturbations de tous ordres

Utilisées depuis les années 1960, ces substances se retrouvent dans la composition de nombreux produits cosmétiques en tant qu’agents conservateurs, en particulier dans les savons liquides, déodorants, bains de bouche ou dentifrices. Elles sont aussi présentes dans certains textiles, tapis, jouets et sacs-poubelle. Véritable danger pour la santé, comme le démontrent de nombreuses études faites sur les animaux, elles pourraient provoquer chez l’être humain des réductions de la force musculaire et de la capacité de contraction des muscles et perturber le rythme cardiaque.
Ces biocides sont aussi soupçonnés d’être des perturbateurs endocriniens, de provoquer des allergies et d’être cancérigènes. À cela s’ajoute leur rôle probable dans la résistance aux antibiotiques. En outre, comme ils persistent longtemps dans l’environnement, ils peuvent se propager des sols aux cours d’eau, aux animaux sauvages, dans le sang et même le lait maternel.

Une réglementation trop timide

Ces constatations ont amené l'instance de régulation américaine, la FDA (Food and Drug Administration) à interdire leur présence dans les savons pour les mains et le corps en 2016. Moins stricte, l’Union européenne s'est contentée d'une interdiction partielle du Triclosan.
Pour les chercheurs signataires de la Déclaration de Florence, les organismes de réglementation du monde entier doivent aller plus loin. « Ces produits chimiques n’ont pas de frontières, explique Rolf Halden, auteur de cette déclaration et directeur du Centre biodesign pour la sécurité environnementale de l'université publique de l’Arizona. C’est un problème environnemental qui touche le monde entier ».
Il est actuellement impossible d’éviter toute exposition à ces substances. Les signataires exhortent donc les fabricants à devancer les réglementations, supprimer le Triclosan et le Triclocarban de leurs produits et trouver des substituts sans risque pour les êtres humains et les écosystèmes. Quoi qu’il en soit, une transparence accrue dans les formulations de produits leur semble indispensable. Ils préconisent enfin une évaluation précise de leurs impacts à long terme sur la santé et l’environnement.

Réglementation en cours

En septembre 2016, la FDA américaine a interdit dix-neuf ingrédients anti-microbiens, y compris le Triclosan et le Triclocarban, dans les produits de lavage antiseptique consommés en vente libre. Les études démontraient certes leur innocuité pour un usage quotidien à long terme, mais leur action contre la propagation des maladies et des infections paraissait insuffisante. L’Union européenne interdit le Triclosan comme additif alimentaire et dans les matériaux en contact avec les aliments. Cependant, son usage demeure autorisé à la teneur maximale de 0,3 % dans les dentifrices, les savons pour les mains et les gels douche, les déodorants ; et à une teneur de 0,2 % dans les solutions pour bains de bouche. Il est en revanche prohibé dans les produits de rasage depuis octobre 2014.