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Le sommeil profond aide le cerveau à se débarrasser des ses toxines © PxHere

Les neuroscientifiques sacrifient parfois leurs nuits... à l’étude de celles des autres. C’est le cas de Laura Lewis et de ses collègues de l’université de Boston, au Massachusetts. Dans la revue Science, les chercheurs décrivent pour la première fois la manière dont le cerveau se débarrasse de ses toxines durant le sommeil profond.

Le sommeil est composé de différentes phases qui s’enchaînent de manière cyclique. Le dormeur passe ainsi d’un sommeil d’abord léger à un sommeil profond proche de l’inconscience, avant d’atteindre le sommeil paradoxal, une période de rêves intenses caractérisée par des mouvements très rapides des yeux.

L’importance du sommeil profond est bien connue : c’est durant cette phase que se consolide la mémoire et que le cerveau élimine des déchets métaboliques toxiques comme la β-amyloïde, un peptide qui contribue par exemple à la maladie d’Alzheimer.

Pour comprendre pourquoi ce nettoyage se déroule durant cette phase-ci de sommeil, les chercheurs ont demandé à treize participants de dormir dans une IRM, afin d’enregistrer leur activité électrique cérébrale sur un électroencéphalogramme (EEG).

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Image colorisée montrant une zone de protéines bêta-amyloïde (en brun) formant des plaques dans le cortex cérébral © Wikimedia Commons

Comme sur une partition de musique finement orchestrée, les neurones s’activent et se désactivent simultanément durant le sommeil profond, à la manière de lentes vagues de courant électrique. Dans le creux de la vague, quand les neurones sont silencieux, le cerveau a besoin de moins d’oxygène. En réponse, le flux sanguin diminue, et le cerveau perd environ 10 % de son volume sanguin. Cette baisse est compensée par une entrée du liquide cérébro-spinal (LCS), un liquide aqueux transparent qui entoure le cerveau et la moelle épinière. Ces vagues lentes du LCS – qui entre et sort du cerveau toutes les 20 secondes environ – permettraient de « nettoyer » le cerveau et d’éviter l’accumulation de déchets toxiques susceptibles d’endommager les cellules.

C’est la première fois qu’une étude décrit comment l’activité électrique du cerveau entraîne un déplacement des fluides durant le sommeil et donc le mécanisme d’élimination des toxines. Cela ouvre la voie à de nouvelles pistes de traitement de maladies neurodégénératives comme Alzheimer. Des stratégies visant à restaurer le processus de nettoyage du cerveau par le LCS pourraient en effet s’avérer plus prometteuses que des solutions ciblant une molécule spécifique. Avec, à la clé, quelques nuits courtes qui attendent encore les chercheurs...