Plus d’une femme sur deux contractera une infection urinaire au cours de sa vie. Et si ces infections s’avéraient chroniques, elles pourraient augmenter les risques de développer un cancer de la vessie, envisagent des chercheurs français dans un article publié le 25 février 2021 dans la revue Plos Pathogens.

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Les infections urinaires touchent plus de 50 % des femmes © Getty images

Colibactine, une toxine bactérienne

80% des infections urinaires impliquent les bactéries Escherichia coli (E. coli), issues du microbiote intestinal. Or, ces bactéries sont connues pour produire des substances capables d’infecter ou d’endommager les tissus de l’hôte. De précédentes études sur le tractus intestinal ont démontré que cette bactérie E. coli, pouvait produire une toxine, la colibactine, associée à un risque accru de cancer colorectal.

L’équipe de chercheurs toulousains, menée par Eric Oswald, s’est rendue compte que sur 223 patients atteints d’infection urinaire liée à E. coli, un quart d’entre eux présentaient de la colibactine dans leurs urines. C’est la première fois que cette toxine a été étudiée dans le cadre d’infection urinaire.

ADN en danger

Les chercheurs se sont alors tournés vers le modèle murin pour mieux comprendre les effets de la colibactine. Résultats : cette toxine est bien produite pendant les infections urinaires et provoque des lésions de l’ADN dans les cellules de la muqueuse de la vessie. Des dommages qui ne se réparent pas forcément et qui pourraient aboutir à des mutations génétiques. « Si on ne peut pour le moment que spéculer sur l’impact de ces mutations, il est probable qu’elles soient associées à un risque accru de cancer de la vessie », précise Eric Oswald dans un communiqué de presse de l’Inserm.

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Infection urinaire reproduite chez la souris. Les bactéries Escherichia coli, en rouge, forment une communauté bactérienne au cœur des cellules superficielles de la vessie, en bleu (ADN) et vert (cellule) » © Inserm / Jean-Paul Motta et Camille Chagneau

Pour l’heure, ces résultats obtenus chez la souris ne peuvent être transposés chez l’humain. Les chercheurs proposent donc de surveiller, de manière plus systématique et plus précise, les personnes sujettes à infections urinaires récurrentes. « On pourrait imaginer mettre en place une prise en charge plus spécifique des patientes souffrant régulièrement d’infections urinaires, avec une recherche systématique des marqueurs de la colibactine dans leurs urines. Et de manière plus proactive, proposer des approches thérapeutiques visant à moduler la composition de leur microbiote intestinal, qui représente le réservoir principal des bactéries E. coli mises en cause dans ces infections urinaires », propose Eric Oswald.