Les programmes d'abstinence sexuelle jusqu'au mariage supportés par les finances publiques américaines depuis 1982 sont un échec. Dans leur grande majorité, les jeunes femmes américaines ont un premier rapport sexuel à 17,8 ans et se marient neuf ans plus tard. Les jeunes hommes débutent, eux, leur vie sexuelle à 18,1 ans et se marient à 30 ans. Et parmi les partisans de l'abstinence, finalement peu semblent résister à la tentation si l'on en croit les données des études réalisées depuis dix ans... L'histoire pourrait rester anecdotique – après tout, chacun fait ce qu'il veut ou ce qu'il peut – mais selon une équipe de l'université de Columbia qui publie ces résultats dans le Journal of Adolescent Health, cette politique américaine s'avère délétère tant sur le plan individuel que sur le système de santé américain.

Au détriment de la santé publique

Les programmes abstinence only n'évoquent la contraception que pour souligner ses éventuels échecs et font l'impasse sur les méthodes de prévention de la grossesse mais aussi des infections sexuellement transmissibles. Or, entre 1995 et la période 2010-2013, la proportion des adolescents à avoir reçu une instruction sur l'abstinence, mais aucune sur la contraception, est passée de 8 à 28 % pour les filles et de 9 à 35 % pour les garçons. De plus en plus d'adolescents sont donc mal informés et plus empreints à des conduites à risque lorsqu'ils succombent à la tentation.
Cette politique d'éducation à l'abstinence, qui a connu son plein essor sous les mandats de George W. Bush a, selon les auteurs de l'étude, largement nui à la politique de santé : régression des programmes d'éducation sexuelle à l'école et du planning familial, baisse des efforts de prévention contre le VIH. Même si les programmes abstinence only ne concernent pas tous les États de la fédération (36 des 50 États ont accepté, en 2015, des subventions publiques pour ces programmes), c'est toute la politique d'éducation sexuelle qui semble marquer le pas depuis deux décennies. En 1995, plus de 80 % des jeunes Américains avaient reçu, à l'école, des cours sur la contraception, alors qu'ils ne sont plus que 57 % en 2010-2013. L'information sur les modes de prévention face au VIH a décliné dans les mêmes proportions. En 2014, seulement 48 % des écoles dispensent des cours d'éducation sexuelle (67 % en 2000).
Depuis 1982, le Congrès américain a investi plus de 2 milliards de dollars dans ces programmes d'abstinence sexuelle aux États-Unis et à l'étranger. Et malgré des résultats très critiqués, cette politique continue d'être subventionnée à hauteur de 85 millions de dollars chaque année. Une situation qui ne devrait pas s'améliorer : début août, l'administration Trump a coupé les crédits de 81 projets soutenus par le Teen Pregnancy Prevention Program créé en 2010 pour réduire et prévenir les grossesses des adolescentes.