"2101, sciences et fiction"
"Le rajeunissement cellulaire"
Kélig Pernelle, biologiste.
-Je pense qu'actuellement c'est encore trop tôt, mais c'est quelque chose vers lequel on va pouvoir tendre.
En tout cas, des équipes travaillent là-dessus, sur tout ce qui est vieillissement et comprendre ses mécanismes pour pouvoir les contrer.
Il y a même des équipes qui considèrent que le vieillissement cellulaire peut être considéré comme une maladie et qu'on peut trouver du coup des moyens thérapeutiques pour le contrer.
Donc, on y viendra certainement, avec toutes les questions que cela peut susciter en termes de conséquences derrière.
Le fait de rajeunir par rapport à sa vie, par rapport à notre entourage, par rapport aux expériences qu'on a pu acquérir.
Donc après...
Thierry Joly, cryobiologiste.
-Certains opposent la mort à la vie.
Moi, la mort, je verrais ça par rapport à la naissance.
On naît, on vit, on meurt.
Mais après...
La conception de la vie, c'est un débat un peu plus religieux.
Est-ce qu'on considère que la mort, c'est la fin ?
Ou c'est la poursuite d'une vie sous une autre forme ?
Certains disent que c'est peut-être de la science-fiction, mais puisqu'on est avec Faust, peut-être qu'après la mort, il y a une autre vie à vivre ailleurs.
Toutes les religions nous parlent du paradis.
Certains y croient, d'autres pas.
Moi, j'ai tendance à y croire.
Je pense qu'après la mort...
Il est bien de semer tout ce qu'on peut sur Terre pour les générations futures, qui, elles, continueront de s'adapter, et moi, après, je pense que...
Oui, je vivrai, mais sous une autre forme.
Je n'aurai peut-être pas de corps.
Au moins, on n'aura pas de maladies, pas de problèmes de rhumatismes.
Mais après, il peut y avoir une autre sorte de vie, une conscience qui subsiste ou une âme qui subsiste.
Je pense que ça c'est possible.
C'est rassurant en plus.
Kélig Pernelle, biologiste.
-Chaque organe va avoir des cellules et chaque cellule va avoir une spécificité bien définie.
Toute cellule va avoir un programme génétique commun, mais en fonction de l'environnement dans lequel elle va être.
Elle va exprimer certains gènes par rapport à d'autres, qu'elle va exprimer en protéines, et va avoir une fonction, une forme qui est bien définie.
Arriver à trouver quelque chose qui est capable de rajeunir l'ensemble des cellules, c'est...
Pour le moment en tout cas car ça viendra peut-être, mais pour le moment c'est un peu compliqué de généraliser comme on a du mal à généraliser...
Un cancer ne va pas être le même chez un patient et chez un autre.
Dans une cellule, on ne va pas avoir les mêmes mécanismes dans une cellule du cœur que dans un neurone, une cellule de cerveau ou dans une cellule du foie.
À partir du moment où on touche à du différencié, chaque cellule est spécifique.
Une cellule différenciée, c'est une cellule qui a une fonction.
Une cellule du foie va avoir la fonction de détoxifier.
Une cellule du cœur, les muscles du cœur vont avoir une fonction de se contracter.
Elles ne vont pas exprimer les mêmes protéines pour pouvoir remplir leurs fonctions.
On peut stopper le vieillissement.
Mais est-ce qu'on peut rajeunir ?
Là, on parle du corps entier, on ne parle pas que de la peau.
Je ne vois pas comment le corps en lui-même peut rajeunir, en tout cas chez l'humain.
Je pense qu'il faut...
une intervention extérieure.
Il y a même des expériences qui ont été faites où, juste en injectant du plasma, donc du sang de souris jeune, chez des souris plus âgées, ils avaient des résultats assez intéressants.
Parce que même dans le sang, il y a des cellules souches.
Ils se rendent compte qu'il y en a partout.
Il y en aurait même dans l'urine.
Ils arrivent même à isoler maintenant des cellules souches dans l'urine pour pouvoir les redifférencier dans d'autres cellules.
En fait, il y en aurait partout.
Je pense qu'il y a des cellules avec des capacités de régénération et de prolifération qui sont assez importantes.
Thierry Joly, cryobiologiste.
-La mort cellulaire des neurones commence dès l'état fœtal.
Donc plus ou moins vite.
Ça dépend aussi de l'environnement de la vie de la mère.
Ça c'est important.
Maintenant, se réinjecter des neurones...
C'est le travail qui est fait actuellement à l'INSERM à Bron où ils travaillent sur tout ce qui est cellules souches et cerveau.
Donc, c'est pour guérir Alzheimer ou Parkinson.
Voir dans quelle mesure on ne pourrait pas réinjecter des cellules souches dans le cerveau pour compenser les dysfonctionnements du cerveau.
"SF"
Roland Lehoucq, astrophysicien.
-Il y a aussi une mouvance dite "transhumaniste".
Son credo, en gros : "La vie est une maladie.
Parce qu'on en meurt.
Essayons de soigner cette maladie."
C'est un peu ça l'idée.
Eux investissent énormément d'argent dans le but explicite de faire des humains, si ce n'est éternels, de très longue durée de vie.
100 ans étant une base de discussion, mais évidemment 500, 1 000...
On voit qu'actuellement, il y a déjà des gens, et des gens fortunés, qui investissent énormément d'argent dans le but explicite d'allonger la durée de vie humaine, considérant la vie comme une maladie et cherchant à s'affranchir de cette maladie ultime.
Ça pose des questions éthiques actuellement.
Les auteurs de science-fiction ne font que reprendre ces idées qui sont dans les sociétés actuelles, surtout occidentales, pour les transposer dans une histoire.
Parce que sous l'histoire, sous la loupe de l'histoire, le microscope même, pourrait-on dire, de l'histoire de science-fiction, on en arrive à mettre le doigt là où ça fait mal sur un point de nos sociétés.
Par exemple, le problème d'une humanité à deux vitesses.
Parce que qui pourra se payer cette longévité extrême ?
Ça coûtera cher au début.
Qui pourra le faire ?
Vous l'imaginez bien, ce ne sont pas les masses laborieuses.
D'abord ceux qui ont de l'argent.
Ils ont l'argent et les moyens de durer longtemps.
Deux avantages.
Parce qu'après tout, tout le monde est égal devant la mort.
Tous les hommes sont égaux devant la mort.
À un moment donné, votre vie s'arrête.
Si vous avez les moyens qu'elle ne s'arrête pas, vous imaginez tout ce que ça pose comme conséquences politiques, sociales, humaines, éthiques...
Déjà sur le vaisseau Terre.
Alors évidemment, la science-fiction s'en empare.
C'est un problème très croustillant, très intéressant, très fort.
Et encore une fois, la science-fiction parle d'humain et pas de science.
Elle prend la science comme prétexte pour parler d'humain.
Cette science ne s'embarrasse pas toujours des détails techniques qui la font fonctionner.
Elle la fait fonctionner pour les besoins de l'expérience de pensée sociale qu'elle va mener.
2101, sciences et fiction
Conception et réalisation : Patrick Chiuzzi
Avec la voix de Johanna Rousset
Avec la participation de Kélig Pernelle, biologiste, Thierry Joly, cryobiologiste et Roland Lehoucq, astrophysicien, CEA
Images bande dessinée 2101 : Guillaume Chaudieu
Développeur : Thomas Goguelin
Image et son : Patrick Chiuzzi et Robin Chiuzzi
Enregistrement voix : Studio Ghümes
Musique : Ludovic Sagnier
Montage : Yann Brigant
Images additionnelles :
Beating human heart muscle made from hESC in the Knoepfler Lab at UC Davis School of Medicine in the Knoepfler Lap.
Jaime Connolly Rohrbach and Paul Knoepfler
Shutterstock
Chromatiques
Producteur : Patrick Chiuzzi
Assistante réalisateur : Cécile Taillandier
Assistante de production : Élodie Henry
Universcience
Rédaction en chef : Isabelle Bousquet
Production : Isabelle Péricard
Responsable des programmes : Alain Labouze
Avec la participation d’Amcsti
Remerciements : Eloïse Bertrand, Alice Chiuzzi, Agate Chiuzzi, Delphine Boju, Romain Mascagni, Mathieu Gayon
Avec le soutien d’Investissements d’Avenir et la participation du Centre National de la Cinématographie et de l’image animée
© C Productions Chromatiques / Universcience / Centre de recherche astrophysique de Lyon / 2016