Définir le futur énergétique de la France, c'est l'objectif du texte examiné à partir de ce lundi 16 juin 2025 dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Les partisans de l'atome devraient s'unir pour réintroduire la relance du nucléaire supprimée en commission

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La centrale nucléaire de Gravelines, le 13 juin 2025 © AFP/Archives Sameer Ai-Doumy

Pour le Rassemblement national, ce serait l'opportunité d'engranger une nouvelle victoire autour de cette proposition de loi du sénateur Daniel Gremillet, qui doit ensuite inspirer le décret fixant la feuille de route énergétique du pays.

Le gouvernement doit le publier d'ici la fin de l'été, avant la fin de la navette parlementaire, a rappelé dimanche le ministre de l'Industrie et de l’Énergie Marc Ferracci, soulignant le besoin du décret pour certaines filières afin de "lancer des investissements".

"Nous ne remettrons pas en question le cap de la décarbonation, ni le principe d'un mix électrique équilibré, reposant sur les énergies renouvelables et le nucléaire", a-t-il dit à propos de la feuille de route. "Notre position est constante : pas de décret avant qu'une loi sérieuse ait été votée" au Parlement, a prévenu en retour lundi le député RN Jean-Philippe Tanguy.

Si le texte est étudié à l'Assemblée, c'est d'abord parce que le groupe de Marine Le Pen a agité fin avril la menace de la censure et obtenu du Premier ministre François Bayrou son inscription à l'ordre du jour.

Jean-Philippe Tanguy a promis lundi que son groupe mettrait l'accent dans les débats à l'Assemblée sur "le coût de production et le prix (pour les consommateurs) le plus bas possible", reprochant au gouvernement Bayrou de projeter un prix de "100 euros le mégawatt-heure". "Autant ne rien faire", a-t-il lancé.

Les élus écologistes ont eux fustigé le fait d'en passer par une proposition de loi "issue de la droite sénatoriale", et non par un projet de loi qui aurait permis une étude d'impact. "Est-ce que vous avez entendu la droite parler des énergies renouvelables, de la réduction de la consommation ? Non. Ils se cachent derrière le nucléaire pour faire semblant d'œuvrer pour le climat", a dénoncé la députée EELV Julie Larnoes.

Le nucléaire au cœur du débat

Après un examen chaotique en commission, au cours duquel l'article fixant les objectifs du secteur nucléaire a été supprimé, le rapporteur, le député macroniste et ancien ministre Antoine Armand, a déposé des amendements pour réintroduire une relance massive de l'atome, qui semble convenir au Rassemblement national.

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Séance à l'Assemblée nationale, le 2 décembre 2024 à Paris © AFP/Archives Stéphane de Sakutin

Elle prévoit notamment de nouvelles capacités nucléaires, équivalent à engager la construction de 14 nouveaux EPR au plus tard en 2030. Une position plus tranchée que celle du gouvernement.

"Les amendements déposés par le rapporteur sur les objectifs de nucléaire et sur la suppression des objectifs pour les énergies intermittentes vont dans le bon sens pour nous", a estimé le député RN Maxime Amblard.

A contrario, la recherche d'un accord entre le rapporteur et les socialistes semble au point mort.

Quelle place pour les énergies renouvelables ? 

Le groupe de Boris Vallaud défend, lui, une relance de l'atome qu'il estime "raisonnable", face au retard pris dans le développement des énergies renouvelables, en engageant la construction de huit nouveaux EPR d'ici 2035. 

Il propose d'attendre cinq ans et un retour d'expérience sur la construction des nouveaux réacteurs, avant de s'engager sur des capacités supplémentaires.

"Nous avons présenté au rapporteur nos positions (...) mais nous n'avons pas eu de retour", a déploré Karim Benbrahim (PS).

Comme le reste de la gauche, les socialistes déplorent que le texte ne fixe plus de part des énergies renouvelables à atteindre, ne parlant maintenant plus que d'énergies "décarbonées". 

Ce changement sémantique ouvre, selon eux, la voie à une production électrique sans énergies renouvelables. "Une ligne rouge", prévient Karim Benbrahim. 

Le texte actuel prévoit à présent de porter d'ici 2030 la part d'énergie décarbonée à 58% au moins de la consommation d'énergie en France, alors que le pays doit se mettre sur la voie de la neutralité carbone en 2050.

Aujourd'hui, la consommation d'énergie en France dépend encore à hauteur de 60% de combustibles fossiles, majoritairement importés, selon le dernier rapport du gestionnaire du transport de l'électricité, RTE.

Dans le reste de la gauche, les Insoumis et les écologistes sont farouchement opposés à toute relance de l'atome.

A la demande de la présidente du groupe LFI Mathilde Panot le débat devra faire l'objet d'au moins 40 heures de débats dans l'hémicycle et devrait donc s'étendre tout au long de la semaine.