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Montage de photos montrant des blocages de camions pour protester contre les restrictions anti-Covid, à Ottawa le 4 février 2022 (en haut) et à Wellington le 8 février 2022 © AFP Marty MELVILLE, Dave CHAN

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a exhorté lundi les centaines de routiers bloquant le centre-ville d’Ottawa depuis plus d’une semaine pour dénoncer les mesures sanitaires anti-Covid à mettre un terme à leur mobilisation, après un appel à l’aide du maire de la capitale canadienne.

« Il faut que ça cesse », a martelé M. Trudeau, au sortir d’une semaine d’isolement pour cause de Covid, lors d’un débat organisé en urgence à la Chambre des communes.

« Cette pandémie a été nulle pour tous les Canadiens ! », a-t-il tancé, visiblement irrité par les protestations. « Mais les Canadiens savent que la seule façon d’en sortir, c’est de continuer à écouter la science ».

« Le gouvernement fédéral répondra présent », a-t-il promis, sans annoncer toutefois de nouvelles mesures, réclamées par le maire d’Ottawa Jim Watson.

M. Watson a demandé lundi à l’État fédéral l’envoi de 1 800 policiers supplémentaires et d’un médiateur pour mettre fin au « siège » d’Ottawa où il avait déclaré l’état d’urgence la veille. Le chef de la police Peter Sloly a également appelé « à l’aide ».

Les partis d’opposition ont critiqué l’absence de M. Trudeau ces derniers jours. Pour les conservateurs, il est responsable d’une « division jamais vue dans le pays ».

Arrivés en nombre le 29 janvier devant le Parlement et sous les fenêtres de M. Trudeau, entre 400 et 500 camions bloquaient toujours le centre-ville d’Ottawa lundi.

Les protestations se sont étendues ce week-end à d’autres villes canadiennes (Toronto, Winnipeg, Québec…).

Elles ont inspiré des manifestants en Nouvelle-Zélande, où un convoi de camions et camping-cars a bloqué mardi les rues autour du Parlement à Wellington pour protester contre les mesures sanitaires et la vaccination.

En France, des milliers d’opposants au pass vaccinal appellent sur les réseaux sociaux à « rouler sur Paris » samedi, une initiative « prise au sérieux par les autorités », selon une source policière. Certains appellent à une « convergence européenne » ensuite à Bruxelles lundi 14 février.

Au Canada, le mouvement, baptisé « convoi de la liberté », visait à l’origine à protester contre la décision d’obliger, depuis mi-janvier, les camionneurs à être vaccinés pour franchir la frontière entre le Canada et les Etats-Unis. Mais il s’est rapidement transformé en mouvement contre les mesures sanitaires dans leur ensemble et, pour certains, contre le gouvernement.

Certaines rues du centre-ville d’Ottawa, encombrées de poids lourds, restent bloquées à la circulation, les commerces fermés et des abris de fortune ont été installés par les manifestants qui passent jour et nuit à klaxonner, au grand dam des habitants pris dans le bruit et les vapeurs de diesel.

La Cour supérieure de l’Ontario a ordonné lundi aux protestataires de cesser de klaxonner, après un recours collectif de résidents contre les organisateurs de la manifestation, réclamant quelque 10 millions de dollars canadiens (7 millions d’euros).

« Nous ne pouvons pas permettre à une foule en colère » de dicter sa loi, a déclaré Marco Mendicino, ministre de la Sécurité publique. « Cela pourrait créer un précédent sur la façon d’élaborer des politiques au Canada ».

Les politiciens « ne savent pas quoi faire de nous. Mais tout ce qu’ils ont à faire, c’est de revenir à la raison. C’est à eux de résoudre ça », a estimé John Lambert, 59 ans, camionneur et manifestant.

Les manifestants continuent de réclamer « la levée des obligations vaccinales, des restrictions, et le rétablissement des droits et des libertés des Canadiens », a déclaré lundi Tamara Lich, l’une des organisatrices du mouvement, lors d’un live sur YouTube.

« Nous essayons, en ce moment, de tendre la main à tous les partis fédéraux afin que nous puissions commencer des pourparlers et voir comment nous pouvons avancer », a-t-elle ajouté, dénonçant les tentatives d’étouffer le mouvement.

La police d’Ottawa, critiquée pour n’avoir pas su prévenir la paralysie du centre de la capitale, empêche en effet depuis dimanche le ravitaillement des protestataires, en carburant notamment.

Après le retrait vendredi par GoFundMe d’une cagnotte de soutien ayant reçu plus de dix millions de dollars canadiens (6,8 millions d’euros), au motif qu’elle violait ses conditions d’utilisation, les camionneurs ont lancé une nouvelle campagne de fonds via le site chrétien GiveSendGo, qui avait déjà récolté lundi plus de 4,8 millions de dollars.

Si elle perdure, la situation chaotique actuelle pourrait « se transformer en crise politique », juge auprès de l’AFP Frédéric Boily, politologue à l’université de l’Alberta.

« Justin Trudeau a eu au départ une mauvaise réaction. Il a réagi trop fortement et trop abruptement lorsque les manifestations ont commencé, en essayant de dépeindre l’ensemble de la manifestation comme une manifestation d’extrême droite. »

Depuis le début du mouvement, le Premier ministre n’a en effet eu de cesse d’en minimiser la représentativité. Et il a jeté de « l’huile sur le feu », poursuit Frédéric Boily, en « politisant la vaccination » notamment pendant la période électorale cet été.

Même si la mobilisation des camionneurs n’est soutenue que par une minorité des Canadiens, 32 % d’après un récent sondage, cela représente tout de même une frange plus large de la population que les 10 % d’adultes canadiens non vaccinés.

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Un manifestant brandit une pancarte marquée "Liberté" alors que des routiers continuent de manifester contre les restrictions anti-Covid, à Ottawa le 5 février 2022 © AFP Dave Chan