Gaz : cinq choses à savoir sur le GNL, sur lequel compte l'Europe
Publié le - par LeBlob avec l'AFP
L'Europe compte sur le gaz naturel liquéfié (GNL) pour réduire sa dépendance à la Russie. Tour d'horizon sur ce produit qui a l'avantage de pouvoir se transporter par bateau d'un point du globe à l'autre, mais qui ne fera pas de « miracles ».
600 fois moins de place
Pour le liquéfier, le gaz naturel est refroidi après son extraction par un cycle frigorifique qui le transforme à l'état liquide à -162°C. Sous cette forme, il prend beaucoup moins de place (600 fois moins qu'à l'état gazeux) et peut donc être stocké à bord de navires méthaniers pour être transporté à l'autre bout du monde si besoin. À l'arrivée, il est regazéifié pour être injecté dans le réseau de transport de gaz national ou il peut être transporté par camion-citerne vers des sites industriels.
Une solution flexible
À la différence du gaz transporté par gazoduc - une grosse infrastructure fixe -, le GNL permet une grande flexibilité de transport et un approvisionnement venant de n'importe quel pays producteur.
Les sources sont diversifiées : les trois gros exportateurs sont l'Australie, le Qatar et les États-Unis. Au total, une vingtaine de pays aux profils très variés exportent du GNL, de la Papouasie-Nouvelle Guinée à Trinité-et-Tobago en passant par... la Russie. Le commerce de GNL a augmenté de 6% l'an dernier, tiré par la hausse de la demande en Chine et en Corée du Sud, selon le rapport Shell LNG Outlook. La demande mondiale devrait continuer de croître, tirée notamment par l'Asie.
Plus de GNL pour l'Europe ?
« L'UE pourrait théoriquement augmenter ses importations de GNL à court terme de quelque 60 milliards de mètres cubes », estime l'Agence internationale de l'énergie (AIE) dans son plan de réduction de la dépendance au gaz russe. La Commission européenne évoque pour sa part un potentiel de 50 milliards de m3. Problème : tous les importateurs dans le monde se battent pour les mêmes cargaisons, avec une production mondiale limitée et un risque de forte hausse des prix.
« Le GNL est un levier de flexibilité très important », mais « malheureusement à court terme, on ne peut pas lui demander de faire des miracles », temporise Vincent Demoury, délégué général du Groupe international des importateurs de gaz naturel liquéfié (GIIGNL). « On estime que cette année, au maximum, il y aura 35 milliards de m3 supplémentaires mis sur le marché dans le monde ; il est possible que la Chine en capte à peu près la moitié, ce qui laisse moins de 20 milliards de m3 au marché européen », calcule-t-il.
De nouvelles infrastructures
Certains pays européens comme la Pologne ou la Lituanie ont construit des terminaux GNL pour moins dépendre de la Russie. Mais d'autres comme l'Allemagne n'en ont pour l'instant aucun - une situation à laquelle le pays veut cependant remédier.
Toutefois, la construction d'un terminal prend du temps : 2 à 3 ans. Autre possibilité : recourir à des terminaux flottants (FSRU en anglais), qui peuvent être mis en service plus rapidement, mais nécessitent tout de même « 12 à 18 mois », indique M. Demoury.
Au-delà des terminaux, c'est ensuite le transport par gazoduc au sein du continent européen qui bloque, par manque d'interconnexions à certains endroits. Par exemple, l'Espagne dispose de plusieurs terminaux GNL, mais les capacités sont ensuite limitées pour faire circuler le gaz au-delà des Pyrénées vers le reste du continent.
Un bilan environnemental contesté
Le secteur du GNL met volontiers en avant ses avantages pour le climat et la pollution de l'air : le gaz remplace avantageusement le charbon pour produire de l'électricité ou le fioul lourd pour la propulsion des navires, selon ses promoteurs.
Mais « remplacer une énergie fossile et une dépendance russe par une autre se révèlerait une impasse pour l'Europe à moyen terme », critique le Réseau action climat, en réaction au sommet européen à Versailles.
« Le GNL a de très importants impacts climatiques, parce que très énergivore, parce qu'en ouvrant des marchés mondiaux il pousse toujours plus la production en amont, et parce que sa chaîne de valeur crée des fuites de méthane », très nocif pour le climat, déplore Lorette Philippot, des Amis de la Terre