« J'ai toujours mes testicules » : quand des influenceurs TikTok démystifient la vasectomie
Publié le - par Le blob.fr, avec l'AFP
Les yeux mi-clos, un homme commence à chanter tout en filmant sa vasectomie : sur TikTok, de plus en plus de vidéos luttent contre la désinformation sur cette opération contraceptive de plus en plus populaire aux Etats-Unis depuis que la Cour suprême a dynamité le droit à l'avortement.
Les mythes à ce sujet ont longtemps prospéré sur internet, la vasectomie étant même associée à des plaisanteries concernant une supposée émasculation.
Des vidéos TikTok devenues virales s'emploient désormais, grâce à l'humour, à démonter ces légendes urbaines, certains utilisateurs se filmant même en pleine opération afin de dédramatiser, à l'instar du comédien de stand-up Jimmy McMurrin, qui a récolté plus de 5 millions de vues.
Parmi les erreurs les plus communes, figure par exemple l'idée que la vasectomie reviendrait à se faire castrer, ou qu'elle affecterait la libido ou la production d'hormones, explique l'influenceur Keith Laue, qui a tourné plusieurs vidéos autour de sa propre procédure chirurgicale.
« Je suis convaincu que (ces vidéos) aident à combattre les mythes autour des vasectomies », estime le jeune homme de 23 ans, auprès de l'AFP.
« J'ai toujours mes testicules. Tout est normal. »
« On ferme l'usine à bébés »
Sur TikTok, habituée aux influenceurs peu ou pas qualifiés et relayant des contrevérités, notamment concernant les vaccins et l'avortement, cette tendance sort de l'ordinaire.
« Beaucoup des récentes vidéos TikTok sur la vasectomie indiquent que l'arrêt sur Roe v. Wade a été décisif dans la décision d'y recourir et que la responsabilité de la contraception ne devrait pas incomber principalement aux femmes », explique Katrine Wallace, de l'université de l'Illinois Chicago.
Le taux de vasectomie s'est en effet « considérablement accru » à l'échelle du pays depuis la décision de la Cour suprême de dynamiter le droit à l'avortement, juge l'urologue Marc Goldstein, de la faculté de médecine de l'université Cornell.
Ce constat, partagé par plusieurs de ses collègues, est renforcé par un pic du trafic internet vers les sites offrant des informations à ce sujet.
Sur TikTok, des utilisatrices applaudissent dans des vidéos virales leurs maris ayant choisi de recourir à cette procédure chirurgicale: « On ferme l'usine à bébés ! »
Et certains experts de santé proposent des vidéos éducatives qui gagnent en visibilité en s'attaquant à plusieurs mythes, dont ceux avançant -- à tort -- que les vasectomies provoquent l'impuissance ou accroissent le risque de cancer de la prostate.
« Imprécisions »
La tendance, qui pourrait bénéficier aux jeunes, très friands de cette application de vidéos virales, comporte toutefois des risques.
« Je m'inquiète parce que les vidéos fournissent parfois des informations de santé de mauvaise qualité », s'alarme Jonas Swartz, du centre médical de l'université Duke. « Les gens devraient avoir accès à des informations précises et factuelles. TikTok n'est pas conçue pour faire ce tri. »
Plusieurs vidéos sur ce thème ont par exemple assuré à tort que l'opération était complètement réversible. En effet, le retour en arrière peut être tenté, mais la réussite de l'opération dépend de plusieurs facteurs comme le temps écoulé depuis la vasectomie et la méthode utilisée.
« Bien que je me réjouisse que les gens combattent la désinformation auprès de leurs abonnés TikTok, je crains que cela n'ajoute aux imprécisions », abonde Yotam Ophir, professeur en communications à l'université de Buffalo.
« Les utilisateurs de TikTok confondent souvent la célébrité et le nombre d'abonnés avec l'expertise. Placer nos espoirs auprès des mini-stars de TikTok revient à supposer qu'ils savent identifier des informations fiables et éviter la désinformation -- cela semble peu probable. »