Image légendée
Nvidia conçoit des puces électroniques capables de gérer une quantité considérable de calculs, nécessaires au développement des programmes d'intelligence artificielle (IA) générative © AFP I-Hwa CHENG

Le concepteur de semi-conducteurs Nvidia est devenu mardi la première capitalisation mondiale en Bourse, dépassant Apple et Microsoft, un symbole de la fièvre de l'intelligence artificielle (IA) générative qui agite les marchés.

La valorisation boursière du groupe de Santa Clara (Californie) est montée jusqu'à 3.352 milliards de dollars, selon un calcul effectué par l'AFP. Vers 18H30 GMT, l'action de Nvidia était en hausse de 3,69% à la Bourse de New York.

"L'IA est en train de bouleverser le paysage. Dans le monde réel, mais aussi sur les marchés", a réagi Angelo Zino, analyste de CFRA, soulignant que l'industrie des semi-conducteurs était désormais le secteur le plus important à Wall Street.

Nvidia restait légèrement en retrait du record absolu atteint la veille par Apple, à 3.376 milliards de dollars. Désormais, Nvidia, Apple et Microsoft pèsent environ 10% de l'ensemble des entreprises cotées en Bourse dans le monde.

Depuis le lancement de ChatGPT, fin novembre 2022, le cours de l'action de Nvidia a été multiplié par huit.

Le groupe doit sa popularité à ses cartes graphiques (GPU), des puces capables de gérer une quantité considérable de calculs, nécessaires au développement des programmes d'IA générative.

L'IA générative permet à un utilisateur d'obtenir du texte, une photo, une vidéo, des lignes de code ou un son grâce à une demande formulée en langage courant.

Pour rendre possible cette fonctionnalité, les développeurs accumulent des milliards d'exemples de conversations et d'écrits pour prédire la meilleure réponse à une demande.

Même si ses grands concurrents comme AMD ou Intel, ainsi que les géants de la "tech" comme Apple ou Microsoft, sont lancés à sa poursuite, Nvidia conserve une confortable avance sur le marché des semi-conducteurs utilisés pour l'IA générative.

L'entreprise a même encore accéléré le rythme en présentant, début juin, un nouveau processeur, moins de trois mois après l'introduction du modèle précédent, dans un secteur historiquement habitué à intercaler ses sorties de plusieurs années.

Après avoir équipé les serveurs dans le monde pour bâtir et faire tourner les logiciels d'IA générative, les puces de nouvelle génération, celles de Nvidia en tête, vont se glisser dans les appareils individuels, smartphones et ordinateurs en particulier, anticipe Angelo Zino.

Elles vont aussi être demandées dans le secteur industriel, ainsi que celui des véhicules autonomes, poursuit l'analyste: "Ce sont des opportunités massives pour Nvidia."

Le GPU, l'arme absolue de Nvidia

Derrière ce sigle barbare se cache le moteur de la nouvelle génération de l'intelligence artificielle, en particulier l'IA dite générative, c'est-à-dire capable de créer du texte, de la musique, des images ou de la vidéo sans intervention humaine, en réponse à une requête en langage courant, à l'instar de l'interface ChatGPT.

Le processeur graphique (GPU - graphics processing unit) ou carte graphique fonctionne comme une unité de calcul beaucoup plus rapide et puissante qu'un microprocesseur classique (CPU). Il est devenu indispensable pour gérer en temps réel les demandes des utilisateurs d'IA générative, qui nécessitent de traiter des quantités massives de données.

Le produit vedette de Nvidia, le H100, est de loin le plus demandé du secteur et vaut plusieurs dizaines de milliers de dollars pièce.

"Les GPUs sont nettement plus difficiles à trouver que de la drogue", avait ironisé, l'an dernier, Elon Musk, lors d'un événement organisé par le Wall Street Journal.

Selon le cabinet d'étude TrendForce, ChatGPT nécessite environ 30.000 GPU pour fonctionner.

Google, pour son activité d'informatique à distance (cloud), est également grand consommateur de processeurs Nvidia, de même qu'Amazon pour Amazon Web Services (cloud également) ou Microsoft.

Les concurrents loin derrière

Les deux principaux rivaux de Nvidia sur le marché des cartes graphiques sont deux groupes américains, AMD (Advanced Micro Devices) et Intel, aux origines bien plus anciennes. Selon le cabinet Jon Peddie Research, Nvidia pesait 88% des GPU autonomes livrés dans le monde au premier trimestre 2024.

Nvidia conçoit ses processeurs, mais ne possède pas de site de production propre, à l'image d'AMD ou d'Apple. Si le groupe est volontairement évasif sur sa chaîne d'approvisionnement, selon plusieurs spécialistes et médias l'essentiel de ses produits sont fabriqués par la Taiwan Semiconductor Manufacturing Company, ou TSMC, référence mondiale des semi-conducteurs.

Image légendée
Jensen Huang, patron du groupe américain Nvidia, photographié à Taipei le 2 juin 2024, lors du salon Computex © AFP Sam YEH

Jensen Huang, un patron atypique

Né à Taïwan, Jensen Huang est un patron atypique, au style direct, adepte de l'humour à froid, et à l'allure décontractée. A l'instar du col roulé de Steve Jobs d'Apple, le blouson de cuir qu'il porte souvent lors des présentations de Nvidia est devenu sa signature vestimentaire.

Celui qui, à neuf ans, fut envoyé en pension par ses parents dans un hameau du Kentucky, est un partisan de "la tolérance pour la prise de risque" et de la propension d'une entreprise "à être suffisamment flexible pour changer de trajectoire rapidement".

Peu après la naissance de Nvidia, le groupe a ainsi renoncé à un contrat avec le grand nom des consoles Sega pour se réorienter vers un nouveau processeur capable d'être compétitif sur le marché des ordinateurs personnels (PC), frôlant, au passage, le dépôt de bilan.