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Deux babouins sur une route le 1er avril 2010 en Afrique du Sud © AFP/Archives Gianluigi GUERCIA

Après le décès d’un de leurs petits, des mères babouins continuent de s’occuper du corps de l’enfant, un comportement qui évoque probablement le deuil, selon une étude publiée dans la revue Royal Society Open Science.

Nous avons observé que « les mères, et parfois d’autres babouins, portent le corps des petits morts pendant plusieurs heures à plusieurs jours – jusqu’à 10 jours », explique  Élise Huchard, coauteur de l’étude publiée cette semaine.

« Nous reportons aussi des comportements affiliatifs, de soins ou de toilettage fréquents et prolongés de la part des mères envers les corps de leurs petits, ainsi que des réactions traduisant un grand stress de leur part, comme des vocalisations de détresse », ajoute la primatologue de l’Université de Montpellier.

Selon ces travaux, les femelles babouins pourraient agir ainsi pour gérer émotionnellement leur perte. Ces observations, difficiles à obtenir tant la mort frappe de façon imprévisible et relativement rarement, ont été faites à Tsaobis, en Namibie où des chercheurs étudient les babouins chacma sauvages depuis 13 ans. Des observations importantes pour mieux comprendre comment les animaux perçoivent la mort, notamment quand elle frappe leurs proches.

Plus surprenant : l’équipe internationale a observé qu’un mâle, très lié à une mère et son petit, peut également prendre soin du corps après la mort du petit, « par exemple en montant la garde lorsque la mère s’éloigne pour s’alimenter ». Elise Huchard rapporte également le cas d’un adolescent « qui porte et soigne le corps d’un petit orphelin mort suite à la disparition de sa mère » ou encore celui de « deux mères qui mettent bas à un mort-né, et semblent très affectées de cette situation bien qu’elles n’aient pas eu le temps de développer un lien avec ces petits ». « De telles manifestations s’inscrivent probablement dans un syndrome qui s’apparente ou équivaut à un deuil, et qui survient lors de la rupture brutale d’un lien d’attachement », explique Élise Huchard, rappelant que le deuil est une réaction émotionnelle qui n’implique pas forcément une conscience de la mort.

« Nous ne suggérons pas que les mères ne savent pas que leurs enfants sont morts (NDLR : elles ne portent pas leurs bébés vivants de la même manière), mais (...) qu’une fois formé, le lien mère-enfant est difficile à briser », ajoute Alecia Carter de l’Université de Montpellier et de l’University College London, également coauteur de l’étude. Et « on ne peut pas parler de rites funéraires, car rien n’indique que les comportements observés soient d’origine culturelle ou aient une fonction sociale particulière », ajoute Élise Huchard.