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Vue générale de l'Assemblée nationale lors d'une séance de questions au gouvernement à Paris le 18 juillet 2023 © AFP/Archives Geoffroy Van der Hasselt

L'Assemblée nationale a voté jeudi des mesures pour faciliter l'utilisation de « résidus de production » industrielle comme matière première pour de nouveaux produits, dans le cadre de l'examen en première lecture du projet de loi « industrie verte ». Ces dispositions ont été approuvées malgré des réserves de députés, craignant qu'elles soient détournées par des industriels pour alléger leurs contraintes liées au traitement de déchets dangereux.

L'article, largement adopté (82 pour, 1 contre), prévoit notamment que les « résidus de production » ne soient pas considérés comme des déchets au sein de « plateformes industrielles »: ils pourraient y être réutilisés sans passer par les procédures et obligations incombant aux producteurs de déchets, le but étant de faciliter leur recyclage dans une logique d'économie circulaire. Des mesures sont aussi prévues pour permettre une sortie accélérée du statut de déchet en cas de transfert d'une entreprise à une autre en vue d'un recyclage.

L'article adopté prévoit que les résidus de production pourraient être recyclés « dès lors qu'ils ne présentent pas d'incidence globale nocive pour l'environnement ou pour la santé humaine ».

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Un employé tient dans ses mains du plastique médical obtenu à partir du recylage de matériel dentaire dans une usine à Salon-de-Provence, dans le sud de la France, le 20 juin 2023 © AFP/Archives Nicolas Tucat

Face aux inquiétudes exprimées, le ministre de l'Industrie Roland Lescure a assuré dans l'hémicycle que « les mêmes contraintes » s'appliqueraient aux industriels traitant les résidus que celles qui s'appliquent au traitement déchets.

Il a soutenu des amendements du camp présidentiel renforçant les obligations de déclaration et les justificatifs à fournir par les industriels. « De grandes entreprises de traitement des déchets m'ont écrit pour s'inquiéter que des rebuts toxiques soient brûlés dans des chaudières industrielles ne répondant pas aux normes: c'est totalement faux », a insisté le ministre. « Si un déchet, pour être traité, doit être chauffé à 850°C », il sera traité de la même manière sur une plateforme qui voudrait le réutiliser.

Contre l'avis du gouvernement, les députés ont adopté un amendement de plusieurs groupes, et rédigé notamment avec Michelin, pour permettre aux industriels français d'utiliser sous condition certains matériaux qui seraient sortis du statut de déchets venant d'autres pays de l'UE. Un mécanisme adopté en commission pour interdire l'exportation de produits textiles contenant des fibres plastiques lorsqu'ils deviennent des déchets dans les pays destinataires a été supprimé, le camp présidentiel l'estimant inopérant, voire contraire aux règles européennes. Le gouvernement s'est cependant engagé à présenter d'ici un an des mesures pour vérifier que ces textiles seront réutilisés et pas traités comme des déchets. « Ça ne veut pas dire grand chose, ça n'a aucune effectivité », a critiqué le socialiste Dominique Potier.

Actuellement, hors BTP, 23 millions de tonnes de déchets sont produits par l'industrie, dont seulement 47% sont recyclés ou compostés, a indiqué le ministre de l'Industrie. Dans la soirée les députés ont validé un alourdissement des peines encourues en cas de gestion illégale des déchets industriels (à quatre ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende, et huit ans et 500.000 euros si l'infraction est commise en « bande organisée »).

Puis l'Assemblée a approuvé différentes mesures pour aider à la transformation de friches en terrains à visée industrielle, notamment en simplifiant l'activation de différents leviers pour mettre en conformité des installations « classées pour la protection de l'environnement », qui présentent un risque de pollution ou de nuisance environnementale.

Interpellé par les écologistes, le ministre Roland Lescure a également annoncé que les moyens des Directions régionales de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement (Dreal), chargées notamment de contrôler des sites industriels, seraient revus à la hausse à la faveur de l'examen du budget de l'Etat à l'automne.