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Lancement d’Ariane 5 avec à son bord le télescope de la Nasa, James Webb, depuis Kourou, en Guyane française, le 25 décembre 2021 © AFP/Archives Jody Amiet

Dans une tribune parue hier dans Le Monde, une soixantaine de chercheurs redoute que la nouvelle stratégie spatiale française présentée par Bruno Le Maire se « détourne » de la recherche scientifique au profit de la seule dimension industrielle. 

La tutelle du secteur spatial français est passée, à l’été 2020, du ministère de la recherche au ministère de l’économie « pour la première fois depuis soixante ans », rappelle ce collectif d’une soixantaine de chercheurs membres de l’Académie des sciences, dont le climatologue Jean Jouzel, l’astrophysicienne Françoise Combes, le prix Nobel de physique Serge Haroche et le paléontologue Yves Coppens.

C’est à ce titre que Bruno Le Maire a présenté, début décembre, la nouvelle stratégie spatiale de la France, soutenue par 1,5 milliard d’euros dans le cadre du plan d’investissement « France 2030 ». Le ministre de l’économie a annoncé vouloir « remettre un peu de compétition dans le monde de l’espace », avec le développement d’un lanceur réutilisable européen pour « rattraper le retard » par rapport à l’Américain SpaceX, et faire davantage de place aux petites entreprises et start-up.

Une vision qui, selon les signataires de la tribune au Monde, « semble opposer recherche scientifique spatiale et nouvelles applications commerciales de l’espace ». « Ce projet ne pourra réussir dans la durée si l’Etat se détourne de la recherche spatiale sous prétexte de favoriser l’innovation industrielle », estiment les chercheurs. 

« L’évolution du secteur spatial français ne doit pas se faire aux dépens de la recherche scientifique. Or, dès la première année sous cette nouvelle tutelle, les ressources allouées aux missions scientifiques du CNES (l’agence spatiale française) annoncées sont telles que tous les projets envisagés qui devaient commencer dans les quatre prochaines années pourraient être brutalement annulés », poursuivent-ils. Pour éviter une « perte de confiance de nos partenaires étrangers » et un « assèchement du tissu scientifique français », ils demandent qu’une part du volet spatial du plan de relance soit « ouverte à des projets de recherche scientifique ».