Tardigrades : une protéine protectrice pour l’ADN
Publié le - par Véronique Marsollier
Le fabuleux tardigrade extrêmophile vient de livrer un de ses secrets. On savait qu’une protéine était à l’origine de ses performances exceptionnelles, mais on n’en connaissait pas les mécanismes. Des biologistes de l’université de Californie à San Diego, aux États-Unis, les dévoilent dans une récente étude.
Cet invertébré microscopique (moins d’un millimètre) et rebondi est capable de survivre à des conditions de vie extrêmes. Présent dans les milieux aquatiques du monde entier, y compris les environnements montagneux, profonds et antarctiques, cet « ourson d’eau » peut résister à des niveaux de radiation dangereusement élevés comme à des températures extrêmement basses (du quasi-zéro absolu jusqu’à 150 °C), en passant par l’exposition à des produits chimiques mortels. Pour exemple, des tardigrades ont pu être ranimés sans difficulté après avoir été congelés pendant plus de trente ans à -20 °C. Ils ont même été lancés cette année dans l’espace dans le cadre d’un projet de transfert de formes de vie sur la Lune, un environnement particulièrement hostile.
Protéine protectrice
En 2016, des chercheurs japonais ont découvert qu’une protéine appelée Dsup (pour damage suppressor), protégeait contre les rayons X l’ADN d’une espèce spécifique de tardigrade, Ramazzottius varieornatus. Ajoutée à des cellules humaines, la protéine les préserve également des radiations.
Jusqu’à récemment, on n’en comprenait pas le fonctionnement, mais des analyses biochimiques ont permis aux chercheurs de le percer à jour.
La protéine de l’ourson d’eau se fixe sur la chromatine (qui contient le matériel génétique situé dans le noyau cellulaire) puis elle génère une forme de nuage protecteur tout autour comme une de sorte de « barbe à papa ». C’est ainsi que l’ADN est protégé des radicaux hydroxyles, des atomes produits par les rayons X.
Les chercheurs ont cependant un doute sur l’origine de ce « bouclier nuageux » ; il s’agirait d’une adaptation du tardigrade à son milieu.
En effet, les tardigrades vivent pour la plupart dans un habitat de mousse. Lorsqu’elle s’assèche, elle produit les radicaux hydroxyles. Les tardigrades n’ont alors d’autre choix que de développer un mécanisme particulier : l’anhydrobiose. Déshydraté, leur métabolisme se met en pause, les fonctions vitales suspendues. Puis le nuage protecteur se met en place.
L’équipe espère que cette découverte permettra d’élaborer des applications médicales humaines, en particulier pour la protection de l’ADN et les thérapies cellulaires.