AU TABLEAU !
Ali Saïb
Comment lutter contre une infection virale ?
On va essayer de déterminer les différents aspects qui peuvent être abordés pour cette lutte antivirale et on va prendre l'exemple du VIH pour mieux comprendre. Donc on va représenter encore une fois le virus et la cellule ou l'organisme qui va être sa cible. Donc lorsqu'un virus pénètre dans une cellule, il y a plusieurs devenir de cette infection virale. Tout d'abord, il peut ne pas pénétrer. Donc ça c'est bien avant la pénétration. Donc on peut avoir un virus qui va s'arrêter avant de pénétrer dans la cellule ou l'organisme, ce qui signifie que ce – cet organisme ou cette cellule est réfractaire à cette infection virale. Par exemple, nous, on ne peut pas être infectés par un virus de plante, par exemple. Donc il y a quelques barrières qui sont infranchissables, en tout cas pour l'instant. Deuxième possibilité, donc le virus pénètre, et là, encore plusieurs possibilités s'offrent à ce binôme, entre la cellule et le virus.
Première possibilité : le virus se multiplie en des milliers d'exemplaires. Là encore, deux possibilités : soit il tue la cellule, soit il tue pas la cellule et il produit sans tuer la cellule. À l'intérieur de la cellule, une autre option possible, il persiste dans la cellule mais ne se multiplie pas. Il est en phase, dit-on, de latence, il résiste, il est à l'intérieur, il se multiplie pas. Jusqu'au jour où il reçoit les signaux nécessaires qui lui permettront de se multiplier. Troisième possibilité : il est détruit par la cellule avec des mécanismes – ou l'organisme – avec des mécanismes de défenses innées lorsqu'il s'agit d'une cellule, ou des mécanismes de défenses innées ou acquises lorsqu'il s'agit de l'organisme. On parle en particulier des défenses immunitaires que vous connaissez.
Donc s'installe et s'instaure un dialogue entre ce virus, la cellule et l'organisme qu'il va infecter. Selon ce dialogue, on aura ou pas la pathologie.
Donc la pathologie, c'est quoi ?
C'est un déséquilibre et un dialogue incompréhensible entre le virus qui va pénétrer, et l'ensemble des discours et des dialogues qui ont déjà lieu dans cet organisme et cette cellule. Si le discours est cohérent et qu'il y a une compréhension mutuelle entre ce virus et cet organisme, il y aura pas nécessairement de pathologie. Il y aura pathologie lorsque ce virus qui va pénétrer à l'intérieur va désorganiser tout le discours, toutes les communications, tout le transfert d'information entre différents constituants de cette cellule ou de cet organisme. Et cette perturbation va fortement conduire vers la pathologie.
Prenons le cas du VIH. Donc je vais juste représenter les cibles du VIH, il y en a deux majoritairement, que sont les lymphocytes T (les globules blancs) et les macrophages. Je vais ici mettre le macrophage avec le noyau, qui est dépositaire de l'ADN cellulaire, et ici, le cytoplasme, dans lequel on va retrouver différents organites. Le virus (bien évidemment c'est pas à l'échelle donc je le répète aussi, ça c'est extrêmement important) le virus VIH va pénétrer dans cette cellule grâce à son interaction entre deux portes d'entrée présentes à la surface de ces cellules. Lorsqu'il y a reconnaissance entre virus et ces portes d'entrée, le virus va pouvoir pénétrer. L'une des caractéristiques du virus VIH, c'est qu'il porte un patrimoine génétique qui n'est pas un patrimoine génétique à ADN, contrairement à nos cellules, mais un patrimoine génétique très particulier, qu'on appelle un patrimoine génétique à ARN. Donc lorsqu'il va pénétrer, ce patrimoine génétique à ARN va être transformé en un patrimoine génétique à ADN grâce à une activité enzymatique virale qui est présente dans le virus, qu'on appelle la transcriptase inverse. Ce patrimoine génétique à ADN va être importé dans le noyau et l'autre particularité du VIH c'est que ce patrimoine génétique à ADN a la particularité d'être pris en charge par une seconde enzyme virale qui va lui permettre de s'intégrer physiquement dans le patrimoine génétique de la cellule pour faire partie intégrante de notre patrimoine génétique lorsqu'on est infecté. À ce moment-là, la cellule ne fera pas de différence entre les gènes cellulaires qu'elle porte et les gènes viraux. Et donc, du coup, très simplement, très naturellement, le virus va être on va dire pris en charge par les machineries cellulaires pour produire des protéines qui vont s'assembler, qui vont pouvoir bourgeonner et constituer de nouveaux virus. Là, une dernière étape clé agit sur ces virions qui quittent la cellule. C'est une étape qui est aussi soumise à une activité enzymatique du virus qu'on appelle la « protéase », qui va permettre à ces virus d'avoir une totale infectivité. Donc on voit que là on a un cycle complet, donc, puisque ces virus peuvent maintenant infecter d'autres cellules à proximité.
On voit que le cycle de ce virus permet de cibler différentes étapes par une approche thérapeutique. La première étape c'est d'empêcher l'entrée. La seconde étape, c'est d'empêcher la transformation de l'ARN en ADN. La troisième étape, c'est d'empêcher l'intégration du patrimoine génétique viral dans le patrimoine génétique cellulaire. Et la quatrième étape, c'est d'empêcher cette étape qu'on appelle une étape de maturation par les protéases virales.
On a toute une panoplie de drogues aujourd'hui à notre disposition. Mais vous savez également que l'une des caractéristiques du VIH, c'est sa propension à muter et à varier. Ce qui veut dire que – les schémas sont extrêmement intéressants, ils sont simplistes mais ils sont aussi limités. Ici j'ai représenté un virus qui va pénétrer à gauche et une dizaine de virus qui va sortir à droite. C'est pas le cas dans la réalité. Il y a pas un virus qui pénètre, il y a en a des milliers, voire des millions. Et puis il y en a des milliers et des millions qui sortent. Ce qui veut dire qu'on n'a jamais en présence un virus VIH mais des milliers, voire de millions de virus VIH. Et lorsqu'on approche ces virus par une approche antivirale, certains de ces virus peuvent échapper, puisqu'ils ne seront pas soumis à l'action des drogues antivirales. Donc pour imiter – pour limiter cette échappement viral, l'apparition potentielle de mutants qui échapperaient à ces drogues, on utilise une combinaison de drogues qui va limiter statistiquement l'apparition de mutants d'échappement et donc de variants qui ne seront plus sensibles à ces drogues.
Ça c'est une première approche au niveau cellulaire. Une seconde approche qui peut aussi être employée, c'est de travailler et de renforcer le système immunitaire par une action vaccinale ou une action sur le système immunitaire directement.
Donc on a vraiment deux actions très spécifiques qui peuvent avoir lieu. Une action au niveau cellulaire et une action au niveau de l'organisme. Mais bien évidemment je conclurai sur ce qu'il faut garder à l'esprit, que la meilleure lutte contre ce virus c'est la prévention et éviter de l'attraper.