Les roches que l'on voit à la surface de la Terre ou qui se trouvent enfouies dans le sol sont de tout type et le résultat d'une très longue évolution géologique. La connaissance de leur formation peut-elle nous permettre de renforcer, de manière naturelle et durable, les fondations sur lesquelles nous construisons des bâtiments ? - Le sol, c'est la partie externe de la croûte terrestre, c’est la partie la plus superficielle du globe terrestre d'un point de vue minéral. Mais c'est aussi une interface très particulière parce qu'elle est à l'interface entre le monde minéral et le monde du vivant. Sous ce sol qui est en constante évolution due à cette interaction minéral/vivant, on va avoir la roche-mère. Cette roche-mère peut être de trois grands groupes différents de roches. On a les roches sédimentaires. Les roches sédimentaires sont des accumulations de particules qu'on dit détritiques ou des coquilles bioconstruites qui vont s'accumuler sous forme de couches. Le deuxième type de roches, ce sont les roches magmatiques. Ce sont des roches qui résultent de la cristallisation d'un magma. Et quand on a une roche sédimentaire ou magmatique, ces roches qui sont en surface peuvent être enfouies dans les zones de subduction en forte profondeur et, à ce moment-là, elles vont chauffer et augmenter en pression et en température. Il pourra y avoir des transformations minérales, on va les déformer et du coup, on transforme ces roches sédimentaires et roches magmatiques en roches métamorphiques. Maintenant qu'on a vu qu'il y avait énormément de roches différentes, beaucoup de lithologies différentes, on peut facilement comprendre que certaines roches vont être beaucoup plus altérables, friables et utilisables par la biodiversité que d'autres. Par exemple, un granite, c'est quelque chose qui est relativement dur à altérer. Par contre, un carbonate ou un grès, parfois c'est friable à la main. On peut comprendre que c'est quelque chose qui va se dégrader très rapidement. Et bien comprendre ces différentes lithologies nous permet de comprendre comment va se comporter le sol lorsqu'il va y avoir une végétation dessus ou autre, ou lorsque même on va construire des choses sur ce sol. Les stromatolites ce sont des structures sédimentaires qui ont été produites par l'activité de micro-organismes. Ces micro-organismes, ils vont avoir un métabolisme particulier qui va modifier la chimie de l'environnement dans lequel ils sont et entraîner la précipitation, la formation de roches carbonates. Et ces micro-organismes sont extrêmement passionnants parce qu'ils existent à la surface de la planète depuis 3,5 milliards d'années. Donc c'est probablement les premiers géoconstructeurs du monde dont on a des traces encore à l’actuel dans les anciens niveaux sédimentaires. On en retrouve au Groenland, on en retrouve en Afrique du Sud et en Australie. C’est trois endroits où on a des roches plus vieilles que 3 milliards d'années. La formation des stromatolites a été une source d'inspiration pour la société Soletanche-Bachy. Cette entreprise, spécialiste mondiale des fondations géotechniques, a développé, en collaboration avec des chercheurs australiens, un procédé innovant de consolidation des sols. - Alors Biocalcis, c'est un nouveau procédé de consolidation de sols qui est basé sur l'utilisation de bactéries calcifiantes qui ont la propriété de fabriquer de la calcite. Et cette calcite va agir comme un ciment biologique qui va apporter de la cohésion au sol et le rendre plus résistant in situ. Donc, les bactéries que nous utilisons s'appellent sporosarcina pasteurii. Ce sont des bactéries qui sont non pathogènes pour l'Homme et pour l'environnement. Ce sont des bactéries qui sont présentes naturellement dans les sols et que l'on cultive à une échelle suffisante pour nos applications de chantier. La mise en œuvre s'effectue par injection, c'est-à-dire qu'on va équiper le sol avec un réseau de forages, et c'est par ce réseau de forages que l'on va venir injecter dans le sol, dans un premier temps, la suspension bactérienne et ensuite la solution calcifiante, et la réaction va se faire en quelques heures. L'utilisation de bactéries dans notre profession, c'est complètement nouveau, mais c'est un procédé qui est vraiment très très performant d'un point de vue mécanique. Les applications dans le domaine des sols sont très larges, très variées. On a beaucoup travaillé sur l'application anti-liquéfaction. C’est-à-dire tout ce qui concerne la consolidation des sols en cas de séisme pour éviter que le sol ne s'effondre. Et, justement, en apportant un peu de cohésion au sol, il est capable d'être résistant en cas de tremblements de terre. Et ça, c'est une application vraiment typique et très ciblée du procédé. Nous en avons d'autres dans le domainedes digues, par exemple, pour répondre à des problèmes d'érosion interne qui nécessitent un renforcement de sols en augmentant sa cohésion. La solution de calcification apporte vraiment une nouveauté dans le domaine de la consolidation des sols parce que, au niveau des propriétés finales, on obtient une augmentation de cohésion du sol sans changer de façon significative sa perméabilité, contrairement à d'autres solutions qui nécessitent l'utilisation de ciments ou de coulis chimiques. C'est une technologie qui présente une empreinte carbone réduite par rapport à d'autres procédés qui mettraient en œuvre des matériaux cimentaires notamment. Ce procédé novateur, inspiré du vivant, sert aussi à réparer des matériaux existants comme la pierre de taille des bâtiments historiques. On peut imaginer demain des biomatériaux encore plus vivants et même auto-réparants pour des constructions durables qui s'adaptent au réchauffement climatique.
Réalisation :
Thomas Marie
Production :
Universcience, La Belle Société Production, CNRS Images, MNHN, Ademe, Cerema, Région Normandie, Région Nouvelle-Aquitaine, Institut des Futurs souhaitables, Ceebios, avec la participation du Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires
Année de production :
2023
Durée :
6min06
Accessibilité :
sous-titres français