On le disait perdu, irrécupérable, après les deux ruptures de câbles survenues en novembre. Le radiotéléscope d’Arecibo vient de s’effondrer avant même que son démantèlement n’ait pu commencer.

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Vue aérienne du télescope d'Arecibo après l'effondrement de la plateforme soutenant les appareils sur la parabole © AFP Ricardo Arduengo

Le célèbre radiotélescope d'Arecibo sur l'île américaine de Porto Rico, utilisé par les astronomes du monde entier et qui avait permis de découvrir les premières planètes en orbite autour d'une autre étoile que le Soleil, s'est effondré mardi après 57 ans de service.

« La plateforme s'est écroulée de manière non planifiée », a annoncé Rob Margetta, porte-parole de la Fondation nationale des sciences américaine, qui finance l'observatoire.

Deux câbles soutenant les 900 tonnes des instruments du télescope sur une plateforme au-dessus de la parabole de 305 mètres de diamètre avaient rompu le 10 août et le 6 novembre, sans qu’on en connaisse la cause. La chute des câbles avait troué la parabole.

Le télescope avait ensuite été jugé trop instable et non-réparable, et l'institution avait pris la décision de démolir la structure. Les accès étaient interdits depuis dans la crainte d'un effondrement soudain, ce qui s'est finalement produit peu avant 08h00 heure locale mardi.

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La mort du radiotélescope d'Arecibo © AFP Nicolas Ramallo

Une grande perte pour l’astronomie

« C'est un désastre absolu », a réagi, ému, le professeur Abel Méndez, directeur du laboratoire habitabilité planétaire de l'université de Porto Rico à Arecibo. « Nombre d'étudiants se formaient à l'astronomie dans l'observatoire, c'est ce qui leur donne l'inspiration de faire une carrière en sciences ou en astronomie, comme moi », poursuit-il. Tous les astronomes de la planète pouvaient demander une portion de temps du radiotélescope pour faire leurs observations, à distance, « même de Chine », précise-t-il encore.

Contrairement aux télescopes optiques, les radiotélescopes fonctionnent jour et nuit, même par temps couvert.

Arecibo était aussi un des principaux radars pour observer les astéroïdes s'approchant de la Terre dans le cadre du programme de défense planétaire de la Nasa. L'agence spatiale américaine a accès à au moins un autre radar, mais moins puissant.

C'est aussi un triste symbole de la dégradation de la situation sur le territoire américain, en quasi-faillite, durement frappé ces dernières années par des ouragans et dont les infrastructures tardent à être reconstruites. Même si on ignore à ce stade la cause de la rupture des câbles.

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De gauche à droite : avant la rupture des câbles, après la rupture de câbles en novembre 2020 et après l'effondrement total, le 1er décembre 2020 © NAIC/AFP/Archives Ricardo Arduengo

Une icône de l’île de Porto Rico

« La perte d'Arecibo est une grande perte pour le monde, mais encore plus pour Porto Rico. C'est une icône de notre île », se lamente Abel Méndez.

Arecibo était si mythique qu'il était le lieu du film « Contact », dans lequel une astronome jouée par Jodie Foster utilisait l'observatoire dans sa quête de signaux extraterrestres. Une scène d'action du film de James Bond « GoldenEye » s'était déroulée au-dessus du télescope.

Le radiotélescope était l'un des plus grands au monde. En 1992, c'est grâce à lui que les premières exoplanètes, hors du système solaire, avaient été découvertes. Les premières cartes de la surface de Vénus ont été réalisées grâce à lui.

Les astronomes savaient depuis plusieurs semaines que la liste des découvertes astronomiques d'Arecibo ne s'allongerait plus. « Merci pour ton service, mon frère », a tweeté son confrère, de l'autre côté de l'Atlantique, le télescope de Grande Canarie.