Des fragments de l’astéroïde Ryugu recèlent une brique de la vie
Publié le - par LeBlob.fr, avec l’AFP
Les petits fragments noirs de l’astéroïde Ryugu récupérés à 300 millions de kilomètres de la Terre pourraient sembler insignifiants, mais recèlent pourtant une des briques nécessaires à l’apparition de la vie.
Des scientifiques japonais ont en effet découvert de l’uracile, un des composants de l’ARN, dans un échantillon de 10 milligrammes de ces fragments, selon leur étude publiée mardi dans Nature. Cette découverte apporte de l’eau au moulin de la théorie, appelée panspermie, selon laquelle la vie sur Terre a été « ensemencée » depuis l’espace quand des astéroïdes se sont écrasés sur la planète. Cette théorie n’exclut pas pour autant celle de l’apparition de la vie sur Terre depuis les océans primitifs, ou même son atmosphère.
L’étude parue dans Nature est la dernière en date à examiner les 5,4 grammes de fragments et poussières récupérés par la sonde japonaise Hayabusa-2 sur l’astéroïde Ryugu. Lancée depuis la Terre en 2014, Hayabusa-2 a retrouvé l’orbite terrestre en 2020 pour y lâcher une capsule contenant l’échantillon. Ce dernier, réparti entre plusieurs équipes internationales de chercheurs, a déjà livré des découvertes, comme la présence d’acides aminés, des briques nécessaires à l’apparition de la vie.
L’étude publiée mardi s’est penchée sur une autre de ces briques : les bases de l’ARN. Si l’ADN, avec sa double hélice, porte l’information génétique, l’ARN, constitué d’un seul ruban, est un messager permettant la mise en œuvre des instructions contenues dans l’ADN.
L’ARN est constitué de quatre bases : adénine, guanine, cytosine et uracile. Des scientifiques les avaient trouvées dans des météorites, des fragments d’astéroïdes, mais ne pouvaient être certains que cette présence ne résulte pas d’une contamination terrestre. « Comme les météorites ont atterri à la surface de la Terre, où les micro-organismes sont omniprésents, cela rend d’autant plus compliquée l’interprétation de l’origine de molécules d’une telle importance biologique dans les météorites », a expliqué à l’AFP un des auteurs de l’étude, Yasuhiro Oba, professeur associé à l’université de Hokkaido.
L’étude des échantillons de Ryugu s’est déroulée en plusieurs étapes, après qu’ils ont été plongés dans de l’eau chaude, comme « pour infuser du thé ou du café », a dit M. Oba. Une solution acide a ensuite permis d’extraire les molécules qui ont été analysées à l’aide d’instruments ultra-sensibles, et d’identifier l’uracile.
La découverte offre une « preuve solide qu’un des composants de l’ARN a été livré sur Terre avant même l’émergence de la vie », via un astéroïde semblable à Ryugu qui se serait écrasé sur notre planète, selon M. Oba. Qui « suppose » qu’un tel dépôt a « joué un rôle dans l’évolution prébiotique et possiblement l’apparition de la vie » sur Terre.
Les autres composants de l’ARN n’ont pas été identifiés dans les échantillons de Ryugu, même si le chercheur n’exclut pas leur présence mais à des niveaux trop faibles pour être détectables. Le Pr Oba espère pouvoir analyser à l’avenir d’autres échantillons d’astéroïde, comme celui que la sonde Osiris-REx doit rapporter de l’astéroïde Bennu, attendu sur Terre cette année.
Une autre mission capitale va être l’envoi depuis le Japon en 2024 de la mission MMX (Martian Moons eXploration), qui tentera une collecte d’échantillons de Phobos, une des lunes de Mars, avec un retour prévu pour 2029.