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Un agriculteur traite un champ avec des pesticides, le 10 décembre 2016, près de Trébons sur la Grasse, en Haute-Garonne © AFP/Archives Remy Gabalda

De la vigne à la betterave sucrière, la recherche française explore toutes les pistes pour diminuer l’usage des produits phytosanitaires dans les champs. La betterave sans néonicotinoïdes ? Interdits depuis 2018 mais réintroduits en 2020 dans la filière sucrière, les néonicotinoïdes devraient disparaître en 2024. Ces insecticides, parfois surnommés « tueurs d’abeilles », sont utilisés pour protéger les betteraves à sucre des pucerons vecteurs de la jaunisse, maladie qui perturbe la croissance de la plante.

Au printemps 2021 a été lancé un plan national de recherche et d’innovation (PNRI) de 20 millions d’euros, dont plus de sept de crédits d’État, pour trouver une alternative aux néonicotinoïdes. À Laon, l’Institut technique de la betterave étudie plusieurs pistes : « On teste la résistance à la jaunisse de 124 variétés de betteraves » et de « nouveaux produits phytosanitaires », détaille Ghislain Malatesta, responsable à l’ITB. Des fleurs ou des céréales dites « compagnes » sont aussi élevées près des betteraves, afin de mesurer leurs effets répulsifs et leur capacité à attirer les prédateurs du puceron vert. « L’avoine et la vesce » ont « plutôt fonctionné », raconte Martin Gosse de Gorre, qui expérimente les solutions de l’ITB dans le Pas-de-Calais. L’Institut a toutefois relevé « 13 % de pertes » sur sa parcelle sans néonicotinoïdes car « la betterave souffre de la concurrence » des plantes compagnes, explique M. Malatesta.

Dans l’Aisne, Hubert Compère a lui planté des « bandes fleuries » pour accueillir des insectes « tueurs de pucerons ». Encore trop « cher » et « insuffisant », selon l’agriculteur. De son côté, l’Institut national de recherche pour l’agriculture et l’environnement (Inrae) planche sur une « méthode de prémunition, un peu comme une vaccination », indique Véronique Brault, directrice de recherche dans le Haut-Rhin : il s’agit d’utiliser des « variants peu virulents » de la jaunisse pour stimuler les défenses de la betterave.

Vigne : la sélection variétale A Colmar, l’Inrae cherche depuis 20 ans une parade efficace contre le mildiou et l’oïdium, des champignons parasites qui font des ravages dans les vignes. Un enjeu majeur pour la France, troisième producteur mondial de vin et premier exportateur en valeur. En 2000, l’institut (alors Inra) lance le programme RESDUR pour développer une gamme de variétés résistantes à ces deux maladies qui mobilisent l’essentiel des traitements phytosanitaires en viticulture. « Nous avons trouvé des variétés de vignes sauvages en Asie et en Amérique du Nord qui promettaient de bien résister. Nous avons ensuite réalisé plus de soixante types de croisements et testé plus de 20 000 échantillons », explique Didier Merdinoglu, qui pilote le projet RESDUR. Les chercheurs ont sélectionné « deux gènes de résistance » pour chacun des champignons, pour « réduire les risques de contournement » des ravageurs. Une vingtaine de nouvelles variétés de vignes ont été créées et celles présentant les meilleures qualités œnologiques sélectionnées, en collaboration avec le Julius Kuhn Institute en Allemagne. En 2018, quatre nouvelles variétés ont été inscrites au catalogue français : Artaban, Floreal, Vidoc et Voltis. « Pour ces quatre variétés, on a réduit les traitements phytosanitaires de 90 % », se réjouit M. Merdinoglu, et de grands bassins viticoles, comme le Bordelais ou la Champagne ont commencé à tester ces vignes.