Libellules et demoiselles se meurent faute d'habitat
Publié le - par Le Blob.fr, avec l'AFP
Les libellules et demoiselles se meurent, victimes de la disparition des zones humides, l’habitat naturel de ces élégants insectes aux couleurs chamarrées dont au moins 1/6 ème des espèces risquent de s’éteindre, a mis en garde jeudi l’Union internationale pour la conservation de la nature.
C’est la première fois que l’UICN fait un état des lieux des 6 016 espèces de libellules et demoiselles — les odonates — répertoriées dans le monde. Et elle estime que 16 % d’entre elles sont menacées d’extinction, dans une mise à jour de sa liste rouge qui est un inventaire mondial de l’état de conservation de la faune et de la flore. « En mettant ainsi en lumière les pertes de libellules dans le monde, la liste rouge (…) souligne la nécessité urgente de protéger les zones humides et la riche biodiversité qu’elles abritent », estime le directeur général de l’UICN, Bruno Oberle. « Ces écosystèmes disparaissent trois fois plus vite que les forêts partout dans le monde », prévient-il.
Entre 1970 et 2015, on estime que 35 % des zones humides dans le monde — lacs, rivières, marais ou encore zones côtières ou marines — ont disparu, selon un rapport de la Convention de Ramsar des zones humides. Si les zones humides peuvent souvent paraître hostiles à l’homme, « elles fournissent des services essentiels », insiste M. Oberle, soulignant : « Elles stockent le carbone, nous donnent de l’eau propre et de la nourriture, nous protègent des inondations et sont l’habitat d’une espèce connue sur 10 dans le monde ».
Indicateur de santé
Les odonates sont ainsi un excellent indicateur de la santé des zones humides. Libellules et demoiselles sont « très, très sensibles aux changements dans l’environnement. Et elles servent donc de signal d’alarme sur ce qui se passe dans les zones humides à travers le monde », a expliqué Craig Hilton-Taylor, chargé de la « liste rouge » à l’UICN.
En raison d’un manque de données sur un certain nombre des espèces évaluées, il est impossible de dire si elles sont en danger ou non, mais il craint que 40 % des espèces puissent, de fait, être classées comme menacées. La situation est particulièrement dégradée en Asie du sud et du sud-est, où plus d’un quart des odonates sont menacées, victimes notamment du défrichement et de l’assèchement pour faire place à des plantations d’huile de palme.
En Europe et en Amérique du nord, ce sont les pesticides et les polluants ainsi que le changement climatique qui sont les plus grandes menaces pour ces insectes. « Le changement climatique est un facteur clé », rappelle M. Hilton-Taylor, parce qu’il provoque des sécheresses qui ont un effet dévastateur sur leur habitat ». Or, les libellules sont aussi un prédateur important des moustiques et autres mouches vecteurs de maladies.
Plus de 40 000 espèces menacées
La liste rouge, qui est un document de référence de 142 577 espèces, faune et flore confondues, a franchi pour la première fois le cap des 40 000 (40.084) espèces menacées d’extinction. Si certaines espèces semblent reprendre du poil de la bête et ont été placées dans des catégories moins comme moins exposées, un nombre plus important est au contraire davantage menacé.
Parmi elles, le desman des Pyrénées, qui est aussi surnommé le rat-trompette à cause de son museau très allongé. Ce petit mammifère qui physiquement tient de la musaraigne, de la taupe et du rat est désormais considéré comme « en danger » alors qu’auparavant, l’animal qui vit en France et dans le nord de la péninsule ibérique était classé « vulnérable ». La population a chuté de moitié durant la dernière décennie, essentiellement à cause de l’impact des aménagements de cours d’eau, comme des barrages pour produire de l’électricité par exemple. L’usage de l’eau pour l’agriculture ou produire de la neige artificielle pour les stations de ski des Pyrénées ont aussi rendu de vastes zones inhabitables pour le petit animal.