Moelle osseuse: un don trop méconnu qui peine à recruter des hommes
Publié le - par LeBlob.fr, avec l'AFP
Au cours des dernières semaines, le visage d’un petit Joseph, trois ans, qui nécessitent une greffe de moelle osseuse, a fait le tour des réseaux sociaux : si la mobilisation a été sans précédent, ce don reste encore trop méconnu.
C’est un cri du cœur qu’a lancé Katinka Rambert-Cadré pour sauver son enfant atteint d’une leucémie aiguë lymphoblastique, un cancer du sang et de la moelle osseuse.
« Dès qu’on a appris que Joseph aurait besoin d’une greffe, début janvier, nos amis ont lancé un appel », raconte-t-elle. « On ne sait pas encore s’il sera éligible, mais si c’est le cas, il faudra qu’on ait un donneur tout de suite ».
En deux semaines, les compteurs se sont emballés. Les demandes d’inscriptions sur le fichier de donneurs ont représenté « plusieurs mois voire plusieurs années » de collectes, souligne Emmanuelle Cortot-Boucher, directrice de l’agence de biomédecine, qui gère notamment le registre.
« Extrêmement surprise et touchée » par cette mobilisation, la mère de Joseph pense que beaucoup de gens « ne savaient pas que c’était si facile de donner ».
Le don de moelle osseuse est en effet encore trop souvent, à tort, confondu avec la moelle épinière.
Dans 80 % des cas, le don de cellules de moelle osseuse se fait par prélèvement sanguin. Pour les 20 % restants, on prélève directement dans les os au niveau du bassin lors d’une courte opération sous anesthésie.
Présidente de l’association Laurette Fugain créée il y a 20 ans, Stéphanie Fugain, dont la fille est morte d’une leucémie, explique qu’à l’époque « il y avait une méconnaissance totale de ce don ». Depuis, les choses ont progressé, mais « pas assez ».
La science a aussi fait d’énormes progrès.
« Les premières greffes ont été réalisées au milieu des années 50", raconte Didier Blaise, directeur du programme de transplantation de l’institut Paoli-Calmettes à Marseille.
« Il faut trouver un donneur compatible, or on parle de plusieurs milliers d’antigènes, soit des combinaisons extrêmement complexes », explique-t-il.
Les médecins se tournent en général d’abord vers les différents membres de la fratrie (frères et sœurs) du malade, car il y a alors « une chance sur quatre d’obtenir une compatibilité ».
À la fin des années 80, un registre national des donneurs volontaires a été créé pour venir en aide aux patients ne bénéficiant pas d’un frère ou d’une sœur compatible.
Il recense à ce jour plus de 311 000 donneurs et est par ailleurs relié à tous les registres internationaux.
« Aujourd’hui, il faut surtout faire grossir le fichier qualitativement », prône Mme Cortot-Boucher, la directrice de l’agence de biomédecine.
Pour être donneur, il faut avoir entre 18 et 35 ans au moment de l’inscription.
L’agence souhaiterait désormais attirer davantage d’hommes (75 % des demandes d’inscription viennent aujourd’hui de femmes), car avec un donneur masculin, le greffon est mieux toléré sur le plan immunologique.
Chaque malade possède son propre profil génétique, déterminé en partie par ses origines géographiques et son histoire génétique familiale.
« Il est donc essentiel de retrouver cette diversité des profils parmi les donneurs inscrits sur le registre », assure aussi l’agence. Africains, Asiatiques ou Maghrébins ne sont pas aujourd’hui assez représentés.
Chaque personne qui s’inscrit doit garder en tête qu’elle ne sera peut-être jamais appelée et de toute façon elle ne saura jamais à qui son don va bénéficier, prévient enfin Mme Cortot-Boucher.
Un rappel qui ne doit nullement empêcher de donner, insistent les associations et proches de malades, soulignant que plus les donneurs sont nombreux, plus on a de chance de trouver au plus vite la greffe nécessaire à un patient.
« Plusieurs enfants meurent chaque année faute de donneur, quand bien même un don ne servira pas à Joseph, il pourra sauver la vie d’un autre enfant », souligne Katinka Rambert-Cadré.