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Du personnel médical vérifie la température de passagers à l’aéroport international de Lagos, le 27 janvier 2020 © AFP PIUS UTOMI EKPEI

Les habitants de Lagos, la capitale économique du Nigeria, se bousculaient vendredi pour trouver des produits d’hygiène après le premier cas de contamination au nouveau coronavirus en Afrique subsaharienne, dans cette mégalopole tentaculaire de 20 millions d’habitants.

Le ministre de la Santé Osagie Enahire a annoncé qu’il s’agissait d’un Italien travaillant au Nigeria, où il est revenu depuis la ville italienne de Milan le 25 février. L’Italie est en Europe un des principaux foyers de contamination du coronavirus. « Le patient est dans un état clinique stable et ne présente pas de symptômes inquiétants », a assuré le ministre, en précisant qu’il était hospitalisé dans un centre spécialisé pour les maladies infectieuses de Lagos.

Il s’agit de la première contamination confirmée et officielle en Afrique subsaharienne. Le faible nombre de cas jusque-là enregistré sur le continent –un en Égypte et un en Algérie –, qui entretient des liens économiques étroits avec la Chine, a intrigué les spécialistes de la santé.

Vendredi matin, les pharmacies et supermarchés du quartier Ikoyi, à Lagos, étaient pris d’assaut par des Lagosiens cherchant du désinfectant pour les mains et des masques, après avoir appris la nouvelle au réveil. Une pharmacienne a confié que les gens venaient « massivement » depuis l’ouverture de son officine : « nous sommes déjà en rupture de stock », a-t-elle ajouté. « Il y a une pénurie de masques en ville, nous en avons commandé, mais nous n’en avons pas trouvé, donc nous conseillons aux gens d’utiliser des mouchoirs » devant leurs bouches. « J’ai essayé de trouver un désinfectant pour les mains partout, ils n’en ont plus au supermarché, ils n’en ont plus à la pharmacie, je suis contrarié », a expliqué John, la trentaine. « Cette épidémie est tellement effrayante, nous devons être très prudents », a-t-il ajouté.

 Pays vulnérable

Le fait que l’Afrique subsaharienne ait été épargnée jusque-là semble avoir donné à la région une chance de mieux se préparer –plus de la moitié des pays possèdent des laboratoires capables de diagnostiquer le virus. Mais la « principale préoccupation » de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) « continue d’être le potentiel de dissémination du Covid-19 dans les pays dont les systèmes de santé sont plus précaires », a déclaré son patron, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Des mesures ont été prises dans les aéroports du continent pour contrôler les arrivées, mais peu de pays, comme le Gabon, ont interrompu les vols en provenance de pays touchés par le virus. Ethiopian Airlines, la plus importante compagnie aérienne africaine n’a jamais suspendu ses liaisons avec la Chine depuis le début de l’épidémie. Et China Southern vient de reprendre ses vols avec le Kenya.

L’Afrique de l’Ouest a déjà du faire face à l’épidémie dévastatrice d’Ebola qui a fait quelque 11 000 morts entre 2013 et 2016. Le Nigeria, pays le plus peuplé du continent avec près de 200 millions de personnes, est un des pays les plus vulnérables au monde avec un système de santé fragile et une très forte densité de population (près de 7 000 habitants au km2, selon World Population Review).

En 2014, lorsque le premier cas d’Ebola avait été signalé à Lagos, un vent de panique s’était propagé dans la ville. Finalement, seules sept personnes sont décédées, sur 19 contaminées et l’OMS avait salué « le succès spectaculaire » face à ce qui aurait pu devenir « une épidémie urbaine apocalyptique ».

« Campagne agressive »

Les autorités nigérianes sont intervenues vendredi pour rassurer la population sur le fait que le pays était prêt à contenir l’épidémie. « Le niveau de préparation continue de s’améliorer au Nigeria tous les jours », a déclaré le ministre de la Santé Osagie Enahire, lors d’une conférence de presse à Abuja.

Selon le commissaire à la Santé de l’Etat de Lagos, Akin Abayomi, le patient infecté s’est envolé pour Lagos via Istanbul et passé une nuit dans un hôtel avant de rejoindre son entreprise hors de Lagos, dans l’État d’Ogun.

« Nous menons une campagne très agressive de sensibilisation à la santé publique. Nous avons suivi une formation approfondie », a-t-il déclaré. Les autorités ont mis en place des centres de quarantaine à Lagos et Abuja tandis que trois laboratoires du pays ont la capacité de diagnostiquer le virus.