Si les documents historiques ont conservé la trace de la noblesse – seigneurs et propriétaires terriens – partie pour les Croisades, l’identité des simples soldats est mal connue. Une étude génétique portant sur 9 squelettes exhumés au Liban dresse un portrait bigarré de ces croisés du Moyen Âge.

Des archéologues ont découvert, dans une fosse funéraire à Sidon au Liban, 25 squelettes datant du XIIIe siècle : des corps jetés dans une fosse commune et brûlés dont les restes indiquent une mort violente. À proximité, un crâne isolé laisse penser que cette tête a pu être catapultée pour propager des maladies et saper le moral de l’adversaire. Tous ces corps illustrent la brutalité des combats. D’autres éléments trouvés à côté des squelettes dans la fosse, comme des boucles de ceintures européennes et une pièce de monnaie ainsi que des analyses au carbone 14 ont conduit les archéologues à attribuer ces restes humains aux Croisés.
 

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Fosse commune où ont été trouvés les corps des croisés.

Une équipe de généticiens a travaillé avec les archéologues du site de Sidon pour transférer les os des neuf squelettes du Liban dans un laboratoire de Cambridge spécialisé dans l’étude de l’ADN ancien. Les échantillons d’ADN ont été particulièrement difficiles à extraire et à séquencer, car les corps avaient été brûlés et enterrés pendant 800 ans dans un climat chaud et humide où l’ADN se dégrade rapidement. De petites séquences d’ADN ont néanmoins pu être extraites de l’os temporal des crânes.

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Le site de fouilles © The Sidon Excavation site, Lebanon

Les résultats, publiés dans l’American Journal of Human Genetics, témoignent d’un melting pot : trois croisés étaient des Européens originaires d’Espagne et de Sardaigne, quatre provenaient du Proche-Orient et avaient probablement été recrutés localement pour la bataille, et deux autres possédaient des origines génétiques variées, probablement issues de mariages mixtes entre les Croisés et les peuples du Proche-Orient. Cependant, les Croisades n’ont pas eu d’impact durable sur la génétique libanaise : « Les Croisés ont été au Proche-Orient et ont eu des relations avec la population locale. Leurs fils se sont engagés dans la bataille. Cependant, une fois les combats terminés, la génération mixte s’est mariée à la population locale et les traces génétiques des Croisés ont été rapidement perdues » déclare Marc Haber, du Wellcome Sanger Institute, un des auteurs de l’étude. En effet, l’ADN des Libanais d’aujourd’hui est très similaire à celui des personnes qui vivaient au Liban à l’époque romaine, il y a 2000 ans.