Image légendée
Un bout d’univers : l’amas de galaxies Abell 2597 © European Southern Observatory/AFP/Archives

Une équipe d’astrophysiciens aux Etats-Unis a obtenu la mesure la plus précise jamais réalisée de la quantité totale de matière dans l’univers, l’une des questions les plus fascinantes de la cosmologie. La réponse, publiée dans la revue The Astrophysical Journal lundi, est que la matière représente 31,5 % (plus ou moins 1,3 %) de la quantité totale de matière et d’énergie qui composent l’univers. Les 68,5 % restants sont de l’énergie noire, une force mystérieuse responsable de l’expansion de l’univers et dont l’existence a été déduite à partir de l’observation de supernovas dans les années 1990.

Autrement dit, la quantité totale de matière dans l’univers observable est équivalente à 66 000 000 000 000 000 000 000 fois la masse du Soleil, ou 66 000 milliards de milliards, selon l’auteur principal de l’étude, Mohamed Abdullah, doctorant en astrophysique de l’université de Californie à Riverside.

80 % de cette matière est appelée matière noire, dont la nature reste mystérieuse, mais dont une hypothèse est qu’elle se compose de particules subatomiques. La nouvelle mesure est proche des estimations réalisées par d’autres équipes d’astrophysiciens avec d’autres techniques de cosmologie.

« C’est la continuation d’un long processus qui a permis depuis 100 ans de progressivement devenir de plus en plus précis », ajoute la coautrice Gillian Wilson, professeure à la même université. « C’est chouette de pouvoir mesurer des choses aussi fondamentales sur l’univers sans quitter la planète Terre », ajoute-t-elle.

Comment pèse-t-on l’univers ?

Léquipe a eu recours à une technique vieille de 90 ans, et qui consiste à observer les orbites des galaxies à lintérieur des amas de galaxies (ces amas peuvent contenir des centaines ou milliers de galaxies). Il est possible de calculer la force gravitationnelle de chaque amas, ce qui permet d’en déduire leur masse.

Le destin de l’univers

Gillian Wilson explique que la technique a été inventée dans les années 1930 par l’astronome suisse Fritz Zwicky, un pionnier qui fut le premier à faire l’hypothèse de l’existence de matière noire dans les amas de galaxies. Il avait remarqué que la masse gravitationnelle des galaxies de l’amas Coma ne suffisait pas pour les maintenir ensemble, et il avait alors suggéré la présence d’une matière invisible.

L’équipe de l’université de Californie a amélioré la technique de Fritz Zwicky et développé un outil appelé GalWeight pour mieux classer quelle galaxie appartient à quel amas, puis les chercheurs ont appliqué l’outil à l’une des cartes en trois dimensions les plus détaillées de l’univers, la Sloan Digital Sky Survey.

Ils ont mesuré la masse de 1800 amas de galaxies. Puis fait des simulations informatiques pour trouver la quantité optimale de matière dans l’univers correspondant au nombre réel d’amas, jusqu’à trouver la valeur optimale.

A quoi cela peut-il servir ?

Selon Gillian Wilson, la quête de la quantité exacte de matière dans l’univers nous aidera à comprendre l’un des plus grands mystères actuels du cosmos, la nature de la matière noire. En outre, « la quantité totale de matière noire et d’énergie noire nous diront le destin de l’univers », dit-elle, le consensus scientifique actuel étant que nous nous dirigeons vers un « Big Freeze », un « grand gel » aussi appelé « mort thermique » de l’univers, un état où les étoiles arrivent à court de carburant.