L’HOMME RESPONSABLE ?
Valérie MASSON-DELMOTTE n°1
Valérie MASSON-DELMOTTE n°2 X 3
Jean-Louis ETIENNE
Jean JOUZEL
Christophe CASSOU
Olivier BOUCHER
Christian de PERTHUIS X 2
1 - Jean-Louis ETIENNE
La signature humaine, c’est effectivement ce que l’on retrouve dans les carottes de glace du Sud, dans les sédiments, dans l’étude du passé. Dans l’étude du passé, on voit bien que la Terre a sa vie propre. Il y a eu des alternances que l’on connaît aujourd’hui, il y a eu des périodes glaciaires et interglaciaires, et l’on se rend compte que la température moyenne à la surface de la Terre est en train de monter, tout comme le CO2, depuis 150 ans, ce qui constitue la signature humaine. Il est évident que cette signature humaine est là. Elle est dans cette courbe. On s’attend à ce qu’elle monte lentement, et puis tout d’un coup, on voit cette ascension brutale. Elle est contemporaine du développement de l’accès aux énergies fossiles. Toute la planète s’est développée au charbon, et ça continue…
2 - Christian de PERTHUIS
Professeur d'économie (Université Paris Dauphine)
Directeur scientifique de la chaire Economie du climat
Aujourd’hui, dans les émissions de gaz à effet se serre, on a les ¾ qui proviennent de l’utilisation de l’énergie, de la production de l’énergie, puisque 80 % de l’énergie utilisée sur la planète proviennent des énergies fossiles. Il y a trois grandes sources d’énergies fossiles : le charbon, le pétrole et le gaz. Chaque fois qu’avec les technologies actuelles, on utilise du charbon, du pétrole ou du gaz, on envoie du CO2 dans l’atmosphère.
3 Valérie MASSON-DELMOTTE n°2
Par rapport à nos rejets de dioxyde de carbone dans l’atmosphère, l’océan absorbe à peu près un quart, la végétation et les sols à peu près un quart, et chaque année la moitié de nos rejets s’accumule dans l’atmosphère. On voit donc que c’est dominé par notre action : notamment par la consommation d’énergies fossiles, la déforestation et enfin la production de ciment, qui sont les trois grandes activités humaines qui sont sources de dioxyde de carbone. En ce qui concerne la concentration en méthane dans l’atmosphère – en importance le deuxième gaz à effet de serre, ajouté par les activités humaines – on en est à plus deux fois et demie le niveau naturel. Il n’y a donc aucun doute que cette évolution de la composition atmosphérique est pilotée par nos activités industrielles et agricoles, pour faire simple.
4 - Olivier BOUCHER
La concentration en dioxyde de carbone dans l’atmosphère a commencé à augmenter avec l’apparition des combustibles fossiles, et elle continue d’augmenter jusqu’à aujourd’hui dans des proportions qui sont importantes par rapport à la variabilité naturelle qu’on a connue pendant disons le dernier millier d’années, pendant le dernier interglaciaire, voire même pendant des périodes plus longues sur le dernier million d’années. Il n’y a donc aucun doute sur le fait que le cycle du carbone a été largement anthropisé, et sur le fait qu’il y a un effet de serre additionnel qui est substantiel.
5 - Christophe CASSOU
Le diagnostic qu’on établit aujourd’hui se base sur des simulations – issues de modèles – qui ont permis de reproduire le climat du passé. Quand je dis climat du passé, cela veut dire depuis le début de l’ère industrielle, depuis 1850 jusqu’à nos jours. Ces simulations montrent que, si l’on n’inclut pas l’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre dans ces simulations, on n’arrive pas à reproduire l’augmentation de température observée. Ce qui tend à montrer que c’est le facteur dominant pour expliquer le réchauffement climatique sur les 150 dernières années.
6 Valérie MASSON-DELMOTTE n°1
Si on prend l’évolution du climat depuis 1900, le principal terme qui explique le réchauffement observé, c’est l’augmentation de l’effet de serre du à nos activités. Ensuite, on a un certain nombre de termes qui vont le moduler ou le compenser. Le premier terme de compensation est du aux particules de pollution qui ont un effet refroidissant. Notre activité a donc un effet réchauffant net, par la compensation de ces deux phénomènes. Par contre, d’une année à l’autre, on va avoir des facteurs naturels qui vont moduler l’évolution du climat. Les cycles de 11 ans du soleil vont moduler typiquement de 0,1 degré l’évolution de la température globale. C’est un signal faible, mais qui est présent. Ce qui va jouer très fortement, c’est l’occurrence d’éruptions volcaniques majeures, comme le Pinatubo en 1991, par l’effet parasol des particules, qui va faire un coup de froid pendant 1, 2, 3 ans, avec peut-être même une réponse à plus long terme du côté de l’océan de surface. Ca, c’est un terme essentiel pour comprendre l’évolution du climat d’une année à l’autre ou d’une décennie à l’autre. Et puis il y a enfin les échanges d’énergie entre l’océan et l’atmosphère et en particulier l’occurrence d’événements El Nino qui réchauffent le climat global, ou La Nina qui à l’inverse a tendance à le refroidir, qui vont jouer un rôle dans la modulation de l’évolution des températures d’une année à l’autre.
7 - Jean JOUZEL
Climatologue et glaciologue,
vice-président du groupe scientifique du Giec
Nous avons vraiment des arguments sur l’attribution du réchauffement climatiques aux activités humaines, et de plus en plus de cohérence dans ce que nous observons en termes de réchauffement climatique, en termes de température, mais aussi de fonte des glaces, de réchauffement de l’océan, d’élévation du niveau de la mer qui est un témoignage à la fois de la fonte des glaces, et puis de la dilatation thermique de l’océan, nous avons vraiment tous ces témoignages de la façon dont le réchauffement est distribué dans l’atmosphère, qui laissent peu de place au doute. Il est normal que des gens expriment des doutes, mais quand on regarde de façon posée, de façon scientifique les arguments des uns et des autres, je crois que les conclusions du GIEC se sont, rapport après rapport, affermies, et sont vraiment très claires et très convaincantes en termes d’attribution du réchauffement climatique aux activités humaines.