2006, le satellite américain CALIPSO s'envole pour une mission de trois ans qui aura finalement duré 17 ans. À son bord CALIOP, un LiDAR, l'un des tout premiers embarqué dans l'espace. Cet instrument qui utilise un laser pointé vers le sol, permet de réaliser des sondages verticaux de l'atmosphère, d'analyser sa composition depuis le sol jusqu'aux plus hautes couches. Entre 2006 et 2023, plus de 9 milliards de mesures ont ainsi été réalisées, offrant aux scientifiques une nouvelle vision de l'atmosphère et notamment de ces petites particules en suspension dans l'atmosphère : les aérosols. Les aérosols sont invisibles à l'œil nu. On parle de tailles du dixième de nanomètre au dixième de millimètre pour les plus gros. Mais quand ils sont en forte concentration dans des gros panaches, on peut les voir. Vous avez peut-être vu en France des épisodes de remontée de poussières désertiques avec un ciel de couleur ocre. Ils sont émis par différents processus, les mécanismes naturels d'émission comme les poussières désertiques. Ils ont aussi des sources anthropiques liées aux activités humaines par la combustion, par les émissions industrielles. Tout se mélange à l'atmosphère et donne une nature très complexe. Une nature chimique très variée des aérosols. La mission CALIPSO, était assez exceptionnel déjà par la durée de la mesure. Surtout, c'était une des premières fois qu'on arrivait à avoir une image en trois dimensions des aérosols dans l'atmosphère. Cette vision 3D est beaucoup plus réaliste qu'une carte plate puisque l'atmosphère est en 3D et bouge en permanence. CALIPSO a permis de cartographier les aérosols tout autour de la planète pendant 17 ans. Ces données sur le long terme intéressent beaucoup les climatologues car les aérosols ont des impacts sur le climat. Le premier est qu'ils refroidissent l'atmosphère par diffusion du rayonnement solaire. Explication... De manière générale, la plupart des aérosols sont diffusants, ils vont empêcher le rayonnement solaire d'atteindre la surface et auront un effet refroidissant. Cependant, certains types d'aérosol, comme les poussières désertiques ou le carbone suie émis lors des gros feux de biomasse, ont la capacité d'absorber le rayonnement, de réchauffer la couche de l'atmosphère dans laquelle ils se trouvent et contribuer ainsi à un réchauffement de l'atmosphère localement. Les aérosols atmosphériques jouent aussi un rôle dans la formation des nuages. Les aérosols peuvent jouer le rôle de noyaux de condensation. Pour former une gouttelette nuageuse, il faut de l'eau, mais aussi des petites particules. Les aérosols peuvent servir de support à la formation de gouttelettes nuageuses. C'est des processus assez complexes qui vont dépendre du type d'aérosol et de sa taille. On a besoin de mieux les connaître pour mieux comprendre l'évolution des nuages. Avant CALIOP, pour représenter la formation des nuages dans les modèles de climat, on utilisait des paramétrisations, des relations empiriques basées notamment sur le lien entre le contenu intégré en aérosols, la charge totale d'aérosols contenue dans une colonne d'atmosphère et le nombre de gouttelettes nuageuses. Grâce à CALIOP, on a pu avoir accès à des informations plus fines, pour savoir où les aérosols étaient situés dans une colonne de l'atmosphère, en dessous, dedans ou au-dessus du nuage Grâce à ces informations supplémentaires, on a pu raffiner ces paramétrisations et les améliorer. Les données CALIOP nous permettent de renforcer la robustesse de nos simulations climatiques. La durée de vie des aérosols est limitée. Plusieurs mois, voire quelques années quand ils sont à très haute altitude, au dessus de 10 km environ, mais seulement quelques jours lorsqu'ils sont près de la surface. On parle alors de particules fines. Les particules fines sont des aérosols émis principalement dans la couche limite atmosphérique, en dessous de 1 km d'altitude, dans l'air qu'on respire. Ils proviennent des activités humaines comme le transport, le chauffage ou les industries. Toutes les particules émises dans l'atmosphère sont mélangés par des mécanismes de dynamique atmosphérique. Les particules les plus grosses disparaissent rapidement par sédimentation naturelle et les plus fines restent assez longtemps en suspension, quelques jours ou semaines. Ce qu'il va se passer, lorsque des masses d'air stagnent, cela crée des pics de pollution très locaux. Si on a un peu de dynamique, plus de vent, ces masses d'air se mélangent avec l'air environnant et peuvent être transportées sur de grandes distances. On a des échanges d'air entre ce qui vient de loin et ce qui est émis localement. Ce qu'on considère comme la pollution est la somme de ce qu'on émet localement et de ce qui est transporté et qui peut provenir de très loin. L'intérêt de la mission CALIPSO a été de pouvoir quantifier ce qui vient de l'extérieur sur les zones urbanisées. On comprend l'intérêt des données CALIPSO pour les scientifiques qui les exploitent encore aujourd'hui car la pollution de l'air aux aérosols est un énorme enjeu de santé publique. Selon l'Organisation mondiale de la Santé, la pollution de l'air tue chaque année dans le monde 6 millions et demi de personnes, 40 000 en France à cause de cancers, d'asthme ou d'autres maladies cardiovasculaires. La qualité de l'air en France est surveillée de près via des stations de mesure situées en ville, en campagne. On en compte 700 sur le territoire et leurs mesures sont complémentaires de celles des instruments spatiaux comme le LiDAR de CALIPSO. CALIOP a ouvert une nouvelle ère au niveau de l'observation de la Terre et de l'atmosphère. Il y a des successeurs comme EarthCARE qui a un type de LiDAR différent. EarthCARE développé par l'Europe et le Japon embarquera un LiDAR dont le laser émet un rayonnement ultraviolet. Grâce à cette longueur d'onde plus petite que la lumière visible comme celle de CALIPSO, le satellite détectera des particules encore plus fines. Lancement prévu en 2024.