Aux larges des côtes françaises, elles poussent comme des champignons. Ce sont les éoliennes en mer. Plus puissantes que celles dans nos campagnes, comment fonctionnent celles-ci ? Et la France peut-elle miser sur elles pour développer son énergie verte ?
A Fécamp en Normandie, voici l’un des 3 parcs éoliens offshore de France. 60 km2 où cohabitent 71 éoliennes XXL. Chacune mesure 180 mètres de haut. Une implantation qui n’a pas été choisie au hasard.
Raphaëlle Paris,Responsable du site de Fécamp, EDF
Fécamp, c'est un milieu physique adapté, on est sur des profondeurs de fonds marins qui sont environ une trentaine de mètres, on est sur un vent fort et constant sur la zone.
Les vents les plus forts peuvent atteindre 90 Km/h. De quoi générer 7 mega watt par éolienne sur l’année.
Une éolienne est composée de trois pâles, elles font 75 mètres chacune sur le parc de Fécamp, elles sont attachées à la nacelle dans laquelle se trouve un alternateur. C'est cet alternateur qui transforme l'énergie du vent en électricité mécanique.L'électricité est transportée par des câbles inter éoliennes jusqu'à la sous-station électrique puis elle repart en terre pour rejoindre le poste électrique qui est distribué sur le réseau d'électricité français.
Sur le port, voici la salle de coordination. Alertes météo, hauteur et puissance des vagues … Toutes les données sont analysées 24 sur 24h. Aujourd’hui, le parc permet d’alimenter 60 % de la population du département. Mais forcément, l’énergie produite chaque jour est aléatoire.
Sur les saisons d'été, le vent est moins puissant mais il nous permet de faire des maintenances prédictives pour venir entretenir et faire des opérations de contrôle et de maintenance sur le parc pour qu'il soit pleinement opérationnel sur les périodes d'hiver là où le vent est fort et constant.
Comme celui-ci, 2 autres parcs éoliens sont déjà en marche. A Saint-Nazaire et Saint-Brieux. Et la France veut aller encore plus loin … D’ici 2050, une cinquantaine de parcs éoliens devraient voir le jour. Mais pour cela, des défis majeurs restent à soulever …
Toujours à Fécamp, voici un mat pas comme les autres. C’est un outil de mesure pour les scientifiques. Les données recueillies sont traitées à 500 Km de là , dans ce laboratoire à Brest …
Neil Luxcey, Responsable programme R&D, France Énergies Marines
Là on a la maquette du mat Fécamp, il faut imaginer qu'en vrai il est submergé, il est posé au fond de l'eau, donc le niveau de l'eau est à peu près ici, et on a équipé ce mat avec tout plein de capteurs, donc des anémomètres, des lidars par exemple pour mesurer la vitesse et la direction du vent, on a des caméras stéréo-vidéo pour mesurer les vagues, on a aussi tout un tas de capteurs pour mesurer et capturer la présence de la faune et de la flore tout autour du mât.
Grâce aux caméras, ce chercheur réalise des modélisations. Son but ? Analyser l’impact des vagues sur le mât des éoliennes.
Fabien Leckler, Chercheur à France Énergies Marine
Actuellement, vu que ces forces sont assez peu connues, on a tendance à surdimensionner les structures, donc les mâts d'éoliennes, pour qu'ils soient plus résistants éventuellement que nécessaires. Donc en condensant mieux ces forces, on arrivera à faire des mâts potentiellement moins épais et donc du coup qui seront moins chers.
Autres éléments à optimiser en amont. La taille et la composition des pâles. Pour cela, cet autre chercheur étudie les turbulences atmosphériques.
Maxime Thiebaut, Chercheur en analyse des données météo-océaniques, France Énergies Marine
Le vent impacte également négativement l'éolienne parce qu'il produit des chargements aérodynamiques sur la structure, donc c'est des structures tourbillonnaires qui viennent frapper l'éolienne. Donc l'éolienne va vibrer de manière cyclique et dans le temps, il va y avoir des dégradations mécaniques sur la structure. On doit concevoir l'éolienne et le parc pour que la durée de vie de l'ensemble atteigne 20 ans pour assurer la rentabilité du projet.
Et la physique provoque parfois des effets inattendus. Ce que veulent éviter les constructeurs, ce sont les effets de sillage. Autrement dit, c’est lorsqu’une éolienne perturbe le fonctionnement de sa voisine. Cela peut entraîner jusqu’à 20 % de perte d’énergie.
Neil Luxcey, Responsable programme R&D, France Énergies Marines
L'éolienne tourne grâce au vent et va absorber de l'énergie du vent. Et derrière l'éolienne, on a des tourbillons qui se créent. Et ces tourbillons comportent un tout petit peu moins d'énergie que ce qui arrive au début. L'objectif de nos projets en ce moment, c'est d'avoir des outils qui nous permettent d'imaginer quel placement d'éolienne dans un grand parc fait qu'on va pouvoir capturer un maximum d'énergie du vent. Et fait qu'on va essayer de ne pas placer des éoliennes trop proches les unes derrière les autres.
Et pour plus de puissance, les constructeurs misent désormais sur l’eolien flottant. Des structures mobiles, sans fondation, qui peuvent être situés encore plus loin des côtes, là où le vent souffle plus fort. Mais des inquiétudes persistent notamment sur la maintenance difficile à opérer.
Jean-François Philipot, Directeur scientifique, France Énergies Marines
Les machines flottent et donc elles bouchent en même temps que le bacto qui permet d'amener le technicien en mer. Là, pour le moment, ce qui est fait, c'est de décrocher, désancrer les machines, de les ramener au port, de les réparer au port et ensuite de les ramener jusqu'à la ferme. Donc ça, ça coûte très cher. Et donc on cherche des moyens de réussir à les réparer en mer, notamment pour changer les composants lourds comme les pales, par exemple.
D’ici 2050, l’éolien en mer devrait permettre d’assurer 20 % de la production électrique du Pays.