Comment évoluera le climat dans les années à venir ? Quels impacts ont le changement climatique sur l'environnement ? Afin de répondre à ces questions centrales pour l’avenir de notre planète, le GIEC, le Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat, produit des rapports compilant les connaissances scientifiques sur les transformations climatiques. Le sixième rapport de près de 4 000 pages publié en août 2021 a mobilisé plus de 234 auteurs durant 2 ans pour synthétiser 14 000 articles scientifiques. Quelles études se cachent derrière ces chiffres ? Qui sont les hommes et les femmes engagés dans ce travail de titan ? Préparez-vous pour une plongée dans les coulisses d’une aventure scientifique hors du commun. La concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère n’a cessé d’augmenter depuis l’ère industrielle. Parmi ces gaz, le dioxyde de carbone, le fameux CO2, joue un rôle crucial dans les changements climatiques en accroissant la capacité de notre atmosphère à piéger la chaleur du soleil. Mais comment mesurer ces émissions de CO2 ? Essentiellement produit par les activités humaines comme l’exploitation des combustibles fossiles, les transports et l’industrie, ce gaz a longtemps été une menace invisible. En France, il y a vingt ans encore, on ne disposait d’aucune mesure d’émission de CO2. Mais grâce à la science, ce CO2 est désormais suivi de près. Pour percer les secrets des mesures qui ont bouleversé les recherches sur le climat, direction le site de Traînou, dans le Loiret. C’est ici que quatre membres du LSCE, le Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, se sont donné rendez-vous pour un lâcher de ballon d’un genre particulier. On est en train de préparer des ballons stratosphériques qui vont monter jusqu'à plus de 30 kilomètres d'altitude. Et grâce à ces ballons, on va obtenir des échantillons d'air qu'on va pouvoir analyser pour obtenir des mesures de concentration de gaz à effet de serre. Pour piéger cet air en haute atmosphère, les scientifiques peuvent compter sur l’AirCore, un étroit tuyau d’acier long de 70 mètres relié aux ballons et équipé d’un parachute. C’est cet outil qui va permettre de collecter un échantillon d’air. Aujourd’hui les conditions de vent se révèlent favorables, l’AirCore va pouvoir prendre son envol. Durant une heure et demie, le ballon va s’élever dans les airs jusqu’à atteindre environ 30 kilomètres d’altitude. Puis il éclatera et l’AirCore entamera une descente en parachute d’une demi-heure. L’air entrera dans le tube sous l’effet de la hausse de la pression atmosphérique à mesure que l'altitude diminue. Pendant ce temps au sol, le compte à rebours a commencé. Guidés par le GPS arrimé à l’AirCore, les scientifiques suivent à distance le parcours des ballons et évaluent leur zone d’atterrissage. Si l’un parvient à se poser en douceur dans un champ, l’autre a eu moins de chance. - Oui ! - Vas-y, tire un peu pour voir. Attends, bouge pas, reste comme ça. C'est bien, là. Ces mesures sont assez uniques. Les avions vont jusqu'à 12,13 kilomètres d'altitude maximum. Alors que nous, on peut atteindre plus de 30 kilomètres d'altitude. Et c'est vraiment le seul moyen qu'on a pour prélever de l'air in situ à ces altitudes-là. L’équipe rapporte ensuite les précieux échantillons d’air dans le laboratoire situé à Saclay. Il faut faire vite pour obtenir un profil de la colonne atmosphérique à différentes hauteurs, avant que l’air ne se mélange à l’intérieur du tube. Après analyse, les taux de CO2 apparaissent dans l’échantillon d’air capturé. Ils s’ajoutent aux nombreux autres relevés sur ce site depuis 5 ans pour un constat sans appel. Là, on a tous les profils qui ont été faits depuis Traînou. Là, les plus foncés en violet. Et en jaune, c'est les plus récents. Dans la haute atmosphère, au-dessus de 20 kilomètres, on voit que la concentration en CO2 augmente vraiment au fil du temps et qu'elle s'accumule dans la haute atmosphère. Ces données sont mises gratuitement à la disposition de la communauté scientifique mondiale et nourrissent les travaux des modélisateurs du climat. Elles s’ajoutent aux mesures effectuées par le réseau ICOS, dont ce laboratoire fait partie. Contrairement aux ballons qui ne donnent que des résultats ponctuels et très localisés, ICOS regroupe un ensemble de stations réparties dans 17 pays européens. Des sites qui permettent de cartographier les émissions de carbone à grande échelle et de valider les données d’une autre source majeure : les satellites. On ne peut pas avoir des mesures de concentration de CO2 partout sur la Terre. Du coup, ça a un intérêt d'avoir des satellites, car les satellites justement peuvent faire cette mesure globale, quotidienne, pratiquement partout sur la Terre. Ce ne sont pas des mesures parfaites, en particulier la précision accessible à partir des observations spatiales est moins bonne que la précision accessible à partir des mesures au sol, avec des instruments qui sont au sol. Et d'autre part, il y a d'autres problèmes qui sont dus à la couverture nuageuse. Dès qu'il y a un nuage, les technologies actuelles ne peuvent pas mesurer par satellite la concentration en dioxyde de carbone. La complémentarité des relevés de terrain et des données satellitaires a permis d’améliorer la mesure des gaz à effet de serre et donc les prévisions. De quoi anticiper les changements à venir et encourager les quotas d’émissions à imposer aux États. Et il y a urgence : en 2019, le taux de CO2 dans l’atmosphère avait atteint un record sans précédent depuis 3 millions d’années !
Réalisation :
Barbara Vignaux, Pierre De Parscau
Production :
Universcience, CNRS, IRD, Inrae
Année de production :
2021
Durée :
6min47
Accessibilité :
sous-titres anglais, sous-titres français