Image légendée
Malgré l’amélioration de la qualité de l’air, 40 000 décès par an sont encore attribuables à l’exposition aux particules fines, selon Santé Publique France © AFP/Archives Thomas COEX

Malgré l’amélioration de la qualité de l’air, 40 000 décès par an sont encore attribuables à l’exposition aux particules fines, selon Santé publique France qui appelle à ne pas se satisfaire d’un léger mieux dans le bilan des victimes de cette pollution. Il faut au contraire « poursuivre, voire renforcer les efforts visant à réduire ce fardeau », plaide Sébastien Denys, un responsable de l’agence, qui souligne l’impact significatif sur la santé d’une baisse de la pollution, même à court terme. Preuve en est l’impact du premier confinement du printemps 2020 qui a permis d’éviter plus de 2 000 décès liés à la pollution de l’air, selon les chiffres publiés mercredi.

En 2016, Santé Publique France, se basant sur la période 2007-2008, avait estimé à 48.000 le nombre de décès prématurés par an liés aux concentrations de particules fines PM2,5 (inférieures à 2,5 microns), matières microscopiques en suspension dans l'air qui pénètrent dans les ramifications des voies respiratoires et dans le sang.

La nouvelle estimation suggère « une tendance à la baisse » : près de 40.000 décès par an attribuables aux PM2,5 entre 2016 et 2019, soit 7% de la mortalité totale sur cette période, contre 9% en 2007-2008. L’exposition à ces particules, qui peuvent provoquer cancer, asthme, allergies ou maladies cardio-vasculaires, réduit aussi de huit mois l’espérance de vie d’un adulte à partir de 30 ans. « On peut se satisfaire de la légère diminution. Mais d’un point de vue de santé publique, ce qui nous inquiète, c’est une estimation de 40 000 décès évitables. Et j’insiste sur ce terme évitable : des actions sont possibles pour réduire cet impact », souligne Sébastien Denys.

Le nombre de décès annuels attribués au dioxyde d’azote (NO2), calculé pour la première fois, est de 7 000. Mais on ne peut pas additionner intégralement ces morts à celles liées aux PM2,5, insiste l'agence de santé publique, une partie non déterminée des décès étant liée à l'action conjointe des deux polluants. La baisse de l’impact sanitaire depuis l’étude de 2016 s’explique par des modèles d’exposition différents, mais aussi par l’amélioration de la qualité de l’air.

« Enseignements » à tirer

Ainsi, selon le bilan 2019, les émissions de PM2,5 ont baissé de 61% entre 2000 et 2019 et celles des oxydes d'azote de 56%, même si l'Etat a été condamné en justice pour n'avoir pas réduit suffisamment certains polluants dans certaines villes.

Image légendée
Les effets meurtriers de la pollution de l'air © AFP/Archives Alain BOMMENEL

La pollution a aussi largement diminué lors du premier confinement de 2020 imposé pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, surtout dans les zones urbaines. Cette amélioration a été particulièrement sensible pour le NO2, essentiellement lié au trafic routier, à l'arrêt, mais moins pour les PM2,5 issues aussi d'autres sources (épandages agricoles, chauffage…) Cela a malgré tout permis d’éviter 2 300 décès en lien avec l’exposition aux particules fines, plus nocives, et 1 200 décès liés au dioxyde d’azote (les chiffres ne sont pas additionnables).

« Évidemment, nous ne recommandons pas la mise en œuvre de conditions aussi drastiques », note Sébatien Denys. Mais cela permet de tirer certains « enseignements », en termes d’actions publiques, comme la réduction de la circulation routière dans les zones urbaines ou des émissions industrielles, insiste Santé publique France. Ainsi qu’en termes de changements comportementaux, comme le télétravail. D’autres pistes doivent également être poursuivies, en particulier « l’amélioration des pratiques du chauffage au bois », sur lequel le gouvernement s’apprête à adopter un « plan d’action », et le développement de bonnes pratiques agricoles, note l’agence. Des secteurs qui avaient continué à émettre même pendant le confinement.

Les nouvelles estimations de Santé publique France sont bien en deçà d’autres recherches internationales. Par exemple, une étude publiée en février dans Environnemental Research estimait que la pollution aux particules fines provoquée par la combustion des énergies fossiles était responsable d’un décès sur cinq dans le monde, soit plus de 8 millions de morts en 2018, dont près de 100 000 en France.

Des écarts liés à des différences méthodologiques et des données plus précises sur la France, explique Santé publique France. Et dans tous les cas, il s’agit de « plusieurs milliers de morts », ce qui prouve un « fardeau lié à la pollution atmosphérique “très important” », répond Sébastien Denys.