AU TABLEAU !
François Michel
Il existe un paysage très particulier, au sud de la région parisienne. C'est le paysage de la forêt de Fontainebleau. Immenses étendues de sable, associées avec des grès, dont on va essayer ensemble de découvrir l'histoire. C'est un peu le principe de la géologie, au travers des roches, que de retrouver l'histoire d'une région et l'environnement qui existait à l'époque où ces roches se sont déposées. Voilà, alors on va commencer par une petite carte, pour localiser les sables de Fontainebleau. Voilà, on est ici : la vallée de la Seine. Paris est ici. Un affluent de la Seine, plus au sud qui est l'Yonne. Un autre affluent qui la Marne, l'Oise. Et puis ici, très très schématiquement le grand secteur de la forêt de Fontainebleau. Bien, des sables de Fontainebleau, il y en a d'autres, à d'autres endroits, mais on le verra tout à l'heure. Si on focalise ici sur ce secteur, et sur le paysage de ces sables de Fontainebleau, hein ici plus au sud, on a le plateau calcaire de la Bosse, et bien, on va voir que ce paysage est formé comme ceci, de collines, hein, plus ou moins marquées. On parle de monts d'ailleurs dans la région. Avec au sommet des collines et bien, des couches de grès plus ou moins marquées. Et sur le côté de ces collines, des chaos de rochers de grès, qui sont célèbres en particulier chez les grimpeurs qui viennent faire de l'escalade, pratiquer l'escalade, et bien dans ce secteur de la forêt de Fontainebleau. Si je fais un zoom, sur ces paysages, et qu'on vient voir un petit plus dans le détail, et bien on va comprendre comment sable et grès se sont associés. Comment l'un a donné naissance à l'autre. Et puis aussi, et bien comment le paysage se forme, et puis dans un deuxième temps, ben on ira voir quelle est l'origine de ce sable. Alors si je prends le paysage type aujourd’hui, voici ici la table de grès. On parle de platière. Voilà. En dessous, la couche de sable, et puis, devant, et bien des chaos de rochers. Le plus haut rocher d'ailleurs, s'appelle la Dame Jouanne, dans le secteur de Larchant, au sud de la forêt, fait dix-sept mètres de haut. Et puis, le chaos plus bas, devient plus épars, en particulier dans un endroit qu'on appelle le désert d'Apremont, où il y a quelques rochers isolés, et posés sur le sable. Ici, bien sûr, c'est encore du grès. Et puis, ceci, c'est du sable. Comment ce paysage s'est-il formé ? Pourquoi du grès autour du sable ? Au dessus du sable, pardon. Et bien, le grès n'est rien d'autre que du sable soudé. Les variations d'eau, jadis, de la nappe phréatique, et même à l'origine de l'envahissement de certains secteurs, plus ou moins par la mer, par des bras de mer, ont fait qu'une partie du sable s'est soudé, et s'est transformé en grès. Le grès n'est rien d'autre qu'un sable soudé. Donc pour les géologues, le grès et le sable ici, forment la même unité géologique, le même ensemble. Bien, comment ce paysage s'est-il formé ? Revenons au début. Et bien, au début on avait ici des, un paysage de sable, des couches de grès qui se sont formées de cette façon, au sein de ce paysage, et plutôt en partie haute de la couche de sable. Puis, plus tard, sous l'effet de l'érosion, de la pluie, et bien progressivement le sable a été décapé, on peut en enlever comme ça en différents endroits. On va donc avoir une érosion progressive de cette couche, de cette façon. Voilà. Et puis, ben les intempéries continuent, l'érosion continue, et progressivement, pour simplifier, on va passer à une étape comme celle-ci. Où la couche de grès va se retrouver, et bien, isolée, en surplomb au dessus du sable, le sable est sapé progressivement. Et si j'accentue encore le phénomène, la table de grès va se fracturer, va tomber et va faire naître des morceaux en avant de la platière, formant et donnant naissance au chaos. Ça, c'est la façon dont se forme le paysage d'aujourd'hui, et de la façon aussi, dont il continue d'évoluer. Mais quelle est l'origine de cette grande couche de sable, dite sable de Fontainebleau ? Alors pour ce faire, il faut que nous revenions à la carte. Toujours la vallée de la Seine, ici, Seine qui à cette époque là, ça nous emmène il y a une trentaine de millions d'années, n'existait pas, mais elle nous réfère aujourd'hui au niveau de la géographie, l'Yonne, la Marne, Paris et l'Oise. Voilà. Et puis, cet ensemble de sables de Fontainebleau, qui affleure sur de très grandes surfaces dans le sud de l'Île-de-France. Mais, cette couche de sable n'affleure pas qu'à cet endroit. On la retrouve à l'ouest de Paris. Et en particulier dans la carrière de Cormeilles en Parisis. On la retrouve aussi dans le secteur de, des Vaux de Cernay, de la forêt de Rambouillet. En pointillés, je mets très très très schématiquement ces affleurements de sable. On les retrouve un petit peu aussi au nord de Paris. Même à Paris même. Et puis, un peu vers l'est, en allant en direction de la Champagne. À la base de cette couche de sable, on a trouvé des fossiles. Ces fossiles ont permis de dater, il y a environ une trentaine de millions d'années. Nous sommes à une époque que les géologues appellent l'Oligocène, nous sommes dans l'aire tertiaire, que l'on appelle aussi aujourd'hui le Cénozoïque, et à une période qu'on appelle plus précisément un étage : le Stampien, de, du nom d'Estampes, une localité qui se trouve ici au sud de Paris. Les affleurements, les fossiles, vont permettre au géologue de reconstituer quel était l'environnement de l'époque. Qu'est-ce qu'il y avait sur le nord de la France à cette époque-là ? Et bien, un grand golfe marin, qui englobe de façon ici très schématique, et dont on ne connaît pas les contours exacts bien évidemment, et qui occupait le centre du bassin de Paris, il y a de ça une trentaine de millions d'années. Un événement géologique important, c'est la dernière fois que la mer occupe, la mer a occupé pendant des millions, des dizaines, des centaines de millions d'années, même la France et le nord de la France, l'Angleterre et le nord de l'Europe par la même occasion, mais c'est la dernière fois il y a trente millions d'années, qu'un golfe marin occupe le centre de l'Île-de-France. Ce golfe marin était ouvert sur un secteur au nord-ouest, que l'on pourrait appeler aujourd'hui la Manche, Manche qui n'existait pas à cette époque. Et ce golfe marin, dont on ne connaît pas bien du tout les limites vers l'ouest, était aussi ouvert vers le sud-ouest, l'ouest-sud-ouest, en direction de ce qui deviendra plus tard la vallée de la Loire, donc en direction de la Vendée, du sud de la Bretagne. Voilà comment la géologie est capable en regardant les roches, en regardant leur affleurement, leur surface, leur extension, de reconstituer, et bien, une ancienne période de l'histoire de la Terre, et le contexte géologique de cette époque : une mer au cœur du bassin de Paris.