MAI 68, la science s’affiche
Épisodes Scriptés
Épisode 4
00:01:01
SCHUCH PRODUCTIONS PRÉSENTE
AVEC LE SOUTIENT DE L’INSERM
EN COPRODUCTION AVEC CNRS IMAGES
EN ASSOCIATION AVEC UNIVERSCIENCE
MAI 68 LA SCIENCE S’AFFICHE
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Ségolène Aymé
Quelque chose que j'ai perçu très très vite dans ma vie professionnelle, c'est que il fallait se garder de plaire ! Et j'avais des stratégies comme m'habiller de façon très neutre et très sévère. C'était une façon de déjouer le jeu social qui attendait la femme à un tout autre rôle.
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IV. BONNE À TOUT FAIRE
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Jacqueline Feldman
On se cherchait une cause et on a trouvé celle des femmes. On a trouvé qu'effectivement il y a des choses qui n'allaient pas. En principe on était égalitaire, c'était l'égalité en principe et pourtant il y avait par exemple très peu de femmes dans la recherche, parmi les scientifiques…
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Ségolène Aymé
On m'avait dit toute ma scolarité que j'étais une littéraire pure alors que en réalité j'étais attirée par les sciences, mais c'était pas fait pour moi parce que j'étais une fille. J'ai eu très tôt le sentiment que la société était faite pour que je sois une femme au foyer, que je ne gagne pas ma vie et que je ne sois pas indépendante.
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Jacqueline Feldman
Moi j'ai travaillé en physique théorique. Je me sentais un peu un monstre. Parce que les hommes me regardaient, "mon Dieu ! Une femme qui fait de la physique !" Et même de la physique théorique, c'est-à-dire de la physique mathématique, quoi.
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Ségolène Aymé
Moi j'ai vécu vraiment dans une grande solitude ! J'étais très souvent la seule femme dans un monde vraiment très masculin, et où finalement ils me disaient "avec toi ça va parce que tu as un cerveau d'homme."
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Jacqueline Feldman
Donc c'est là où moi j'ai commencé donc le militantisme… féministe, mais à l'époque je n'osais pas dire "féministe" jusqu'à ce qu'il y a Mai 68 qui éclate. Nous avons décidé de faire des réunions dans les amphis pour propager notre problématique. On entendait toujours la même chose, c'est à dire "il y a les contradictions principales et les contradictions secondaires. La contradiction principale c'est celle des ouvriers et des patrons, et quand celle-ci sera résolue, on s'attaquera au problème des hommes et des femmes. Et nous évidemment on ne voulait pas de ça. Le MLF a amené une deuxième révolution après celle de Mai 68, qui était vraiment dans la lignée de ce que j'appelle la révolution psy. On remarque que les hommes et les femmes sont très profondément affectés à l'intérieur d'eux mêmes depuis leur naissance par le fait qu'ils soient hommes et femmes.
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Archives : conversation entre plusieurs scientifiques.
-Ça fait longtemps que vous travaillez ici ?
-Oui, ça fait neuf ans.
-Vous ne parlez pas de salaire avec les hommes qui…
-Non. Non, pas du tout.
-Ils sont tous un peu vos chefs non ?
-Un petit peu oui !
-Vous pensez que c'est fréquent dans les laboratoires, ça ?
-Oh oui, quand même ! C'est quand même… Plus logique !
03:27
03:35
Jacqueline Feldman
La première chose on a vu que ça y est ça éclatait, ça a été une réunion…
03:39
Archives : discussion entre plusieurs militantes féministes : "On pense qu'il faudrait rallier la majorité des femmes, on a des idées de slogan, on a aussi des idées de où il partirait éventuellement…
03:46
Jacqueline Feldman
Il se passait des choses qui s'étaient jamais passées avant, quoi. Donc je me suis dit, effectivement il faut qu'on reste entre femmes, il y pas de problème. Pour mi, c'est de la que ça date, le MLF. On a été offensives parce qu'on a créé les mots "sexisme", "machisme"… Très important, le mot sexisme ! C'est fondamental ! Avant on nous écoutait pas, et puis voilà : on a créé des mots. Ça a été une étape où on a commencé à mettre des mots sur ce qu'il se passait. Féminisme suffisait pas.
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Ségolène Aymé
On a fait quand même quelques progrès puisque maintenant on peut quand même plus être soi comme femme.
04:47
Jacqueline Feldman
La première étape, ça a été que les femmes participent à la société. Ça c'était le vote. La bataille du vote. Ensuite la deuxième étape qui a été très importante, c'est celle du MLF. Celle de l'avortement, c'est à dire : "notre corps nous appartient." C'était énorme aussi. Et maintenant je suis ravie parce qu'il y a une troisième étape qui commence !