Si vous étiez en France le 10 mai ou le 10 octobre 2024 vous avez peut-être eu la chance d’apercevoir ceci, cela ou encore ça ?
Si vous ne voulez pas à nouveau rater ce spectacle, il faut s’y préparer. Ces voiles colorés sont en réalité causées par des éjections de masse coronale du Soleil. Ils résultent de l'interaction des particules solaires chargées avec le champ magnétique terrestre. Les particules, guidées vers les pôles par la magnétosphère, libèrent de l'énergie en heurtant l'atmosphère, ce qui crée les lumières intenses et colorées que l’on connait. Mais peut-on prévoir à l’avance ces aurores boréales ?
Olivier Katz , prévisionniste au COMÉA, au Centre opérationnel de météorologie de l'espace des Alpes
“Toute la difficulté, c'est d'établir la vitesse à laquelle quelque chose part du Soleil. Et donc en fonction ça va être 2, 3, 4, 5 millions de kilomètres par heure, eh bien on peut définir en combien de temps ça va arriver sur Terre. Généralement, c'est 2, 3 jours.
Mais après, l'intensité, on va la connaître seulement quand les particules vont arriver sur les premiers satellites à côté de la Terre. Et ça, du coup, c'est que quelques heures en avance. on peut prévoir qu'il va y avoir des aurores deux jours en avance, mais on peut être sûr que ça vaut le coup de sortir seulement quelques heures avant.
Baptiste Falck, prévisionniste
Et peut-être, si les centres de prévision ne publient pas des cartes qui montrent..., où sont les aurores exactement, c'est juste parce qu'on ne sait pas faire. Voilà, donc toutes les, toutes les images qu'on peut trouver sur internet qui montrent des visualisations en direct de là où se trouvent les aurores, Donc, euh, faut pas forcément s'y fier, c'est pas comme une carte météo. Quand des événements comme le 10 octobre, là dernièrement, ou alors le 10 mai, Il y a 6 mois, des aurores étaient visibles partout du moment où il faisait beau.
Mais, on ne pouvait pas forcément voir la même chose selon les localités où on était. Si on était sur les côtes bretonnes, on pouvait voir des aurores presque au-dessus de sa tête. Si on était dans le sud de la France, on les voyait beaucoup plus basses à l'horizon, avec un petit peu de mouvement. Ça, c'était pas représentable sur les modèles de projection.”
“Et c’est ça le travail et tous les outils qu'on va devoir développer nous au COMEA et puis tous les centres de prévision pour que ça soit vraiment plus intelligible par le public.”
Comment expliquer que l'on ne sache pas mieux prédire ces phénomènes ?
Olivier Katz
“Déjà, au niveau de l'état de l'arbre météo de l'espace, il faut imaginer qu'on est un peu comme la météo des années 60. Ça vient du fait qu'on a moins besoin de savoir à tous les coups s'il y a des aurores ou non, donc il y a moins de moyens qui sont mis à disposition. Et c'est aussi une discipline qui est extrêmement jeune, la météo de l'espace en elle-même, ça fait vraiment depuis les années 90 qu'elle existe. Donc on a énormément de choses à, à connaître et à apprendre.
Pour évaluer les chances d’observer une aurore, des sites comme SpaceWeatherLive regroupent les données de plusieurs satellites. On y trouve l’indice Kp, un marqueur de l’activité géomagnétique mesuré par des magnétomètres répartis autour du globe, ainsi que d’autres indicateurs essentiels.
Baptiste Falcq:
“Ce qui va être important pour les aurores, c'est la quantité de particules qui vont nous atteindre et la vitesse avec laquelle elles vont nous atteindre. Donc les vitesses classiques, quand il n'y a pas d'activité particulière, c'est 300 km par seconde. Et puis quand on va avoir une activité intéressante, ça va plutôt être 500, 600.
Et dans les cas les plus gros, on va atteindre les 1000 km par seconde, voire au-delà. La densité c'est pareil, on va la voir augmenter, plus il y a de particules, plus on est content. Mais le paramètre le plus important, ça va être l'orientation des particules. par rapport à la Terre, quand elles arrivent, par rapport au champ magnétique de la Terre.
Ça c'est mesuré par une valeur qui s'appelle le BZ, qui est, B c'est pour le champ magnétique, c'est la lettre du champ magnétique, et Z c'est pour l'axe dans lequel on regarde, donc c'est l'orientation,
Si jamais la configuration, elle est, euh, dans le bon sens par rapport au champ magnétique de la Terre, en fait, Toutes les particules, presque, 80 percent vont pouvoir rentrer en direction de la Terre. Et pour donner les indicateurs, Là, quand il y a eu les événements du 10 octobre ou même du 10 mai, on est descendu à moins 40, moins 50 nanoteslas sur le BZ. La plupart du temps, ça dépasse pas les 10, 15.”
Cycliquement, tous les onze ans environ, notre étoile atteint sa "période de maximum solaire" - autrement dit son pic d’activité. C’est le cas actuellement, ce qui explique les nombreuses éruptions à sa surface. Statistiquement les chances sont donc grandes de pouvoir à nouveau observer de belles aurores depuis la France dans l’année qui vient. Mais cela peut-il être un danger pour les humains ?
Carton texte : Quelles peuvent être les impacts des aurores ?
Olivier Katz
“Au-delà du fait que les aurores, c'est beau, c'est joli, ça fait rêver et qu'on a tous envie d'en voir, il y a des impacts sur les télécommunications, il y a des impacts sur la navigation, sur les GPS, sur les satellites. L'épisode du 10 mai, par exemple, il y a eu un petit décalage dans les GPS. un tracteur dans les champs aux Etats-Unis qui a besoin d'un GPS pour se guider, bah il se retrouve dévié et à la fin, le lendemain, on le retrouve à 100 km de là où il était censé être au départ. Et donc parler de météo de l'espace, ça a plusieurs intérêts. Le premier, c'est vraiment faire rêver les gens. Expliquer ce que c'est que la météo de l'espace, relier un peu plus l'humanité à son étoile, et puis le deuxième c'est, euh, prévenir, euh, les risques et faire en sorte que la société et, euh, les industriels, les politiques soient plus au courant de tous ces enjeux-là. “