« COMPRENDRE LA RARETÉ DES MÉTAUX RARES »
On entend souvent parler de « métaux rares », sans forcément comprendre ce qui fait leur « rareté » Alors, allons voir les chiffres La plupart des smartphones récents contiennent : - de l’aluminium dans la coque - du fer dans les vis - mais aussi : de l’or, de l’étain, du cuivre, du silicium, du cobalt, du lithium, et d’autres métaux au nom plus exotique : yttrium, terbium, indium, palladium, praséodyme, europium… et plein d’autres En tout entre 50 et 75 métaux sont présents. Ils se retrouvent tous sur le tableau périodique des éléments, qui classe la totalité des éléments chimiques existant dans la nature ou pouvant être synthétisés. Mais pourquoi certains d’entre eux sont-ils qualifiés de « rares » ? Le terme de « métaux rares » s’inspire de la dénomination « Terres rares ». Au XVIIIe siècle, 17 métaux, proches les uns des autres sur le tableau périodique, dont le scandium, le terbium et l’ytrium, et aux propriétés chimiques voisines, ont été baptisés ainsi à cause la difficulté de leur exploitation. Mais pour ce qu’on appelle aujourd’hui un « métal rare », le problème est qu’il n’existe pas de critère universel de rareté. Tout dépend du paramètre que l’on considère. Certains métaux sont peu présents dans la croute terrestre. La concentration moyenne en platine, par exemple, est de seulement 0,005 milligramme par kilogramme, assez proche de celle de l’or, qui est de 0,004 milligramme par kilogramme. Cette concentration est à comparer à celle du silicium, 282 grammes par kilo. Mais l’abondance dans la croûte terrestre n’est pas le seul critère. Le cérium est considéré comme un métal « rare », alors qu’il a une concentration de 66 mg/kg, quand le cuivre, lui, est globalement présent à 60 mg/kg, et n’est pas considéré comme « rare ». La raison est que le cuivre se trouve dans la croute terrestre de manière très concentrée, à l’intérieur les mines, où il existe à près de 5000 milligrammes par kilo en moyenne, et qu’il est donc facilement exploitable. À l’inverse, l’indium ne s’extrait jamais pour lui-même, mais est exclusivement récupéré au cours de la production du zinc. Les terres rares, quant à elles, sont toujours mélangées les unes aux autres et avec d’autres métaux. Leur obtention sous forme purifiée est difficile et très polluante. Un métal peut aussi être dit « rare » simplement lorsqu’il est peu produit, comme le Palladium avec 220 tonnes en 2018, à comparer aux 1470 millions de tonnes de fer extraits la même année. Mais quel que soit le paramètre que l’on considère aujourd’hui, les besoins en métaux que l’on appelle « rares » ont tendance à croitre de manière exponentielle à mesure que se développent les nouvelles technologies : éoliennes, panneaux photovoltaïques, véhicules électriques, et bien sûr les industries des télécommunications, dans lesquelles nous retrouvons notre smartphone… Le cobalt, par exemple a vu sa production augmenter de plus de 55% entre 2013 et 2018. Pour l’ensemble des 17 « Terres rares » la production mondiale était inférieure à 10 kilo tonnes par an avant 1965. En 2000, elle atteint 90 kt par an puis 158kt en 2010. En 2019, elle était de 210 kt. Or, près de 90 % de leur extraction actuelle est répartie entre la Chine, le Brésil, le Vietnam, la Russie et l’Inde. C’est pourquoi, plutôt que de parler de métaux « rares », il est plus exact de parler de « métaux critiques ». Sur la liste des 47 matières premières critiques établie par L’Union Européenne et révisée tous les 3 ans, on trouvait en 2020, 42 métaux ou minerais, dont 16 terres rares et les 5 métaux du groupe platine-palladium. Ainsi, lorsque l’on parle aujourd’hui de « métaux rares » on parle principalement des métaux sur lesquels pèse une très forte tension économique et stratégique.