Des fonds marins plus vivants
La biodiversité des fonds marins côtiers en Méditerranée a été gravement impactée depuis le 19e siècle par le déversement des eaux usées. Pour permettre à la faune et à la flore de revenir et de prospérer à nouveau, une société installe des récifs artificiels biomimétiques qui reproduisent les différents abris naturels nécessaires aux différentes espèces.
Un épisode de "Nature=futur !".
Réalisation : Thomas Marie
Production : La Belle Société production / EPPDCSI-Universcience / MNHN / Ceebios / Ministère de la Transition écologique et solidaire / IRD / Région Nouvelle-Aquitaine / Région Sud / Région Bretagne / Communauté d’Agglomération Pays Basque / Institut des Futurs souhaitables / Avec le soutien de l’ADEME, du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, CGDD, Via Occitanie, CNRS-INEE.
Année de production : 2020
Durée : 6min27
Accessibilité : sous-titres français
Des fonds marins plus vivants
FILM : « Des fonds marins plus vivants » Voix off : Comment fonctionnent les habitats naturels marins ? Comment la vie s'y développe et s'y organise en écosystèmes ? Et, surtout, comment, en cas de dégradation, réussir à restaurer ces écosystèmes et la biodiversité qu'ils abritent comme, par exemple, dans les petits fonds rocheux ? Chercheuse : Quand on considère un écosystème rocheux, il y a des assemblages de roches qu'on appelle un substrat dur, c’est un support, et puis on a un substrat meuble, c'est à dire du sable. Et cet ensemble rocheux constitue autant, finalement, de supports d'endroits pour les organismes végétaux et animaux pour vivre. On ne peut pas considérer les individus ou les espèces les unes à côté des autres, en fait c'est un tout. S’il peut y avoir un assemblage d'organismes des petits au très grands, c'est parce qu’à la base, on a des organismes microscopiques, qui vont être des bactéries, qui vont être des micro-algues et qui vont constituer la première source alimentaire ou d'indications que cet écosystème est un bon écosystème sur lequel les organismes peuvent se développer. Et donc, ce réseau va se faire en fonction des conditions physico-chimiques qui sont favorables à l'ensemble des organismes de cette communauté. On peut vraiment parler de communauté de vie. Le courant est primordial. En terme hydrodynamique, lorsque l'eau est agitée elle apporte de l'oxygène, et il y a des espèces qui ont un besoin très très important d'oxygène, qui sont fixées et ne peuvent aller chercher de l'oxygène ailleurs. Et, en plus de l'oxygène, on a des nutriments qui sont apportés par les courants. Ces petites infractuosités du rocher sont absolument essentielles pour certaines espèces qui n'aiment pas la lumière. Comme elles n'aiment pas la lumière, elles ont besoin de se cacher. Et en fait tous ces systèmes de petites cavernes à l'intérieur des rochers vont leur permettre d'échapper à la lumière. Les posidonies, qu'on trouve exclusivement en Méditerranée, puisque c'est une espèce endémique de Méditerranée, c'est une plante à fleurs, elle est capable de recouvrir les fonds marins et de faire de véritables prairies. Comme ce sont des plantes à fleur qui libèrent énormément d'oxygène, les herbiers de posidonie sont des nurseries. C'est indispensable à la vie des œufs et des juvéniles qui sont justes après éclosion. Et puis quand ils vont être adultes, les animaux vont eux se déplacer et vont avoir un milieu de vie un petit peu différent. Et les assemblages ou les interactions, le réseau dont on parlait tout à l'heure dans cette zone rocheuse va évoluer évidemment en fonction de chacune des étapes du cycle de vie des organismes. Voix off : Dans la Calanque de Cortiou, située dans le Parc national des Calanques près de Marseille, le déversement, durant des décennies, des eaux usées a profondément endommagé cet écosystème typique de la Méditerranée. Le projet expérimental Rexcor, mené par l'entreprise Seaboost, associée à de nombreux partenaires, a pour but de restaurer ce milieu unique en installant plus de trente récifs artificiels inspirés du vivant. Chercheur : On s'aperçoit que c'est des fonds qui sont très endommagés où on a peu de substrats sains, où on a finalement peu d'habitats à cet endroit. Et donc l'approche, ça a consisté à dire : on va imaginer des récifs, des substrats, des éléments qui vont permettre de complexifier, d'amener une complexité structurelle, une complexité d'habitats tout simplement à cet endroit-là, en cohérence avec les espèces locales de manière à pouvoir les héberger. Sur le projet Rexcor on a trois grands types de récifs artificiels. Un récif qu'on a appelé le récif rague, donc qui est un récif qui prend la forme de plateaux empilés avec des petits modules qui sont mis entre ces plateaux pour rajouter des cavités, des interstices, des méandres. On a un second type de récif qui est le récif fractal. C'est un récif qui a vocation à créer pour chaque espèce de faune ou de flore fixée un petit peu son contexte préférentiel. Certaines vont chercher à s'exposer à la lumière dans le courant, d'autres au contraire vont chercher des zones à l'ombre sur des supports horizontaux. Un troisième type de récif qui est le récif connectivité. C'est un récif qui contient des débris coquillés, des coquilles d'huîtres qui en fait joue un peu ce rôle de connexion entre la zone côtière sur laquelle vont s'installer les individus les plus jeunes et les villages de récifs sur lesquels on a les individus un peu plus adultes. Après, il y a deux éléments complémentaires. La roselière, c'est un module biomimétique de l'herbier de posidonie qu'on a conçu pour reproduire les fonctionnalités écologiques d'habitat et de nurserie d'un herbier. Ce module permet d'accueillir les juvéniles, les post-larves qui viennent se nourrir, se mettre à l'abri à l'intérieur des brins. Et l'autre module complémentaire, c'est le premier récif imprimé en 3D béton qui a été immergé en Méditerranée. L'impression 3D, en terme de biomimétisme, cela permet d'atteindre un niveau de cohérence entre l'habitat dont on s'inspire et l'habitat que l'on restitue de manière artificiel qui est jusqu'ici complétement inégalé. Aujourd'hui le biomimétisme, c'est vraiment le fondement en fait du travail chez Seaboost, pour proposer des solutions inspirées de la nature qui soient les plus cohérentes possibles avec le milieu, ses contraintes et les besoins des espèces qui y résident. Voix off : Cette restauration de la biodiversité est un processus évolutif dont les résultats sont encourageants : plus de 60 espèces différentes ont été recensées sur le site. De telles expérimentations montrent à quel point la préservation des écosystèmes marins est un enjeu majeur pour la sauvegarde des océans. / Itw Julien Dalle : 12:19:12 La calanque de Cortiou, en fait, cela fait des dizaines et des dizaines d'années qu'elle reçoit une partie des eaux usées de la ville de Marseille. Et, en plus, il y a une problématique davantage topographique, Marseille, c'est une cuvette et en fait quand il y a de forts épisodes pluvieux ou orageux on a, la station d'épuration entre en surcharge, cela entraine un pipepasse et jusqu'ici l'ensemble des eaux étaient redirigé directement dans la cuvette de Cortiou qui ont créé une altération de la qualité du milieu, de la qualité de l'eau, de la qualité des sédiments, de l'accessibilité au substrat dur, qui a dégradé l'habitat et fatalement quand on dégrade l'habitat on chasse les habitants. 00:50 Dans le cas précis de la calanque de Cortiou on est dans une situation qui est un peu particulière, déjà parce qu'on a eu énormément de sédiments, d'apport de matières organiques, de détritus qui sont venus altérés les substrats sur lesquels les espèces se développent, et d'autre part c'est un site sur lequel on a ce qu'on appelle une maîtrise de la pression, c'est à dire qu'aujourd'hui il y a des travaux qui ont été faits au niveau de la station d'épuration et des infrastructures globales de traitement qui permet d'assainir et de rendre ce projet conforme aux normes européennes. Pour autant, il y a quand même toujours un rejet, donc il y a une pression qui est limitée, qui est considérée comme non délétère sur le milieu et en tout cas permettant d'engager une opération de restauration pour le milieu expérimentale a minima c'est ce qu'on fait mais il y a toujours quelques chose. 01:58 On s'aperçoit que c'est des fonds qui sont très endommagés où on a peu de substrats sains, où on a finalement peu d'habitats à cet endroit. Et donc l'approche ca a consisté à dire on va imaginer des récifs, des substrats, des éléments qui vont permettre de complexifier en fait, d'amener une complexité structurelle, une complexité d'habitats tout simplement à cet endroit là en cohérence avec les espèces locales de manière à pouvoir les héberger et évaluer dans quelles mesures ces solutions sont efficaces à 200 mètres du rejet, à un kilomètre du rejet, à un kilomètre cinq du rejet, et de comparer ces résultats là pour pouvoir statuer sur la pertinence ce type d'opérations et dans quel périmètre. 02:48 Sur le projet rexcor on a trois grands types de récifs artificiels. Un récif qu'on a appelé le récif rague donc un récif qui prend la forme de plateaux empilés avec des petits modules qui sont mis entre ces plateaux pour rajouter des cavités, des interstices, des méandres car il y a certaines qui sont plus friandes que d'autres de cavités fermées ou au contraire des cavités avec des entonnoirs avec des boulets etc. Ce récif c'est clairement un récif qui a pour vocation de servir à la fois d'habitat et de substrat car on a utilisé un matériau poreux qui permet de catalyser la colonisation du récif. 03:21 On a un second type de récif qui est le récif fractal. C'est un récif qui a vocation à multiplier les orientations du substrat en l'occurrence le récif par rapport à la lumière, au courant, à la côte, de manière à créer pour chaque espèce de faune ou de flore fixées un petit peu son contexte préférentiel. Certaines vont chercher à s'exposer à la lumière dans le courant, d'autres au contraire vont chercher des zones à l'ombre sur des supports horizontaux. Donc l'idée c'est d'offrir une grande multiplicité d'orientation et une diversité d'exposition qui permet à chaque espèce finalement de trouver l'habitat, le substrat, le support qui lui correspond. 04:02 Un troisième type de récif qui est le récif connectivité. C'est un récif qui contient des débris coquillés, des coquilles d'huitres et c'est un récifs et qui a vocation de jouer un rôle de nurserie pour abriter des post-larves des juvéniles, qui est moins profond que les autres récifs et qui joue en fait un peu ce rôle de connexion entre la zone côtière sur laquelle vont s'installer les individus les plus jeunes et les villages de récifs sur lesquels on a les individus un peu plus adultes. Ce récif, il est là en intermédiaire, connectivité c'est son nom et il le porte bien, l'idée c'est vraiment d'héberger les espèces dans des stades de vie transitoires et de leur offrir pour ca une micro-complexité caractéristique des petits fonds côtiers de type rocheux. 04:41 Après, il y a deux éléments complémentaires. D'une part il y a des modules roselières. Donc la roselière, c'est un module biomimétique en fait de l'herbier de qu'on a conçu pour reproduire les fonctionnalités d'habitat et de nurserie d'un herbier tout simplement. Donc ce module il est déployé au dessus des modules connectivités, au dessus des modules ragues, dans la colonne d'eau, donc c'est un module qui monte plus haut, qui est mis en flotabilité, et qui permet d'accueillir les post-larves les juvéniles qui viennent se mettre à l'abri dans à l'intérieur des brins, qui viennent se nourrir sur ce qu'on appelle le fooling, c'est à dire tous les organismes qui vont se développer à l'intérieur des brins qui vont venir les brouter, qui trouvent une ressource alimentaire et petit à petit vont descendre dans la colonne d'eau pour retrouver des habitats un peu plus matures au niveau des récifs. 05:21 Et l'autre module complémentaire, c'est le premier récif imprimé 3D béton en Méditerranée. Et l'impression 3D et en terme de biomimétisme c'est un avantage qui est énorme. Pourquoi ? Parce que en fait cela permet d'atteindre un niveau de cohérence entre l'habitat dont on s'inspire et l'habitat que l'on restitue de manière artificiel comme on dit qui est jusqu'ici inégalé. 06:09 Ces solutions elles imitent la nature pour plusieurs raisons. On peut prendre plusieurs exemples. Dans le cas du récif rague, par exemple, ce récif il reproduit les ragues comme l'indique son nom caractéristique du milieu méditerranéen. Donc ce sont de grands panneaux horizontals dans lesquels on va avoir un certain nombre d'espèces qui vont venir habiter en fonction de la taille. On a une grande diversité d'espèces en Méditerranée qui vit dans cet habitat là, dans cet environnement là. 06:35 La roselière cela reproduit le foisonnement d'un herbier avec des brins en pleine haut qui vont osciller qui vont avoir en fait créer un habitat qui va être plein d'interstices, plein de cavités qui vont osciller au grès du courant et ça c'est un habitat caractéristique aussi de la Méditerranée, en particulier une nurserie caractéristique de la Méditerranée qui est l'herbier de Posidonie. Et l'idée c'est de s'appuyer sur la fonctionnalité écologique qui est porté par cet herbier et de la reproduire au niveau des récifs pour accueillir des juvéniles, des post-larves qui sont dans ce milieu. 07:30 L'essentiel des récifs il est constitué en fait de béton. Ces matériaux, le béton, c'est un matériau aujourd'hui c'est le seul matériau qu'on est et qui constitue un substitut viable, pérenne, durable et économiquement réaliste à la roche en fait. On fait beaucoup de travaux de travail R&D sur ces matériaux. Aujourd'hui les bétons qu'on a mis au point, ils présentent un certain nombre d'avantages, ce sont des matériaux qui sont poreux, pas tous, mais, en tout cas, on a développé des bétons poreux. On est capable de dimensionner la taille de ces pores en cohérence avec la dimension des larves du milieu. L'intérêt, c'est que cela permet d'offrir en fait à ces larves une niche dans laquelle elles viennent s'insérer et se développer à l'abri de la prédation et d'autres pressions. Et du coup cela favorise également la colonisation du matériau par la faune et la flore fixée. Et enfin cette porosité, elle favorise la circulation du fluide à l'intérieur du matériau donc favorise l'évacuation des ions basiques donc l'équilibre acido-basique rapide du matériau en surface avec le milieu. Et du coup on a un matériau qui en quelques semaines retrouve un ph qui est sensiblement équivalent à celui du milieu naturel et du coup est extrêmement propice à la colonisation, et la différence est nette sur les suivis. 09:05 Aujourd'hui le biomimétisme, c'est vraiment le fondement en fait du travail c'est Seaboost. Très clairement, l'approche biomimétique pour nous c'est une manière de dire, d'une part n'ayant pas une compréhension parfaite du milieu, le biomimétisme, c'est une manière de s'assurer de la cohérence de ce qu'on propose avec les besoins des espèces et c'est une manière aussi de limiter le risque de se tromper tout simplement parce qu'on a pas tout appréhendé.... et aujourd'hui on fait un travail biomimétique.... pour proposer des solutions inspirées de la nature qui soient les plus cohérentes possibles avec le milieu, ces contraintes et les besoins espèces qui y résident. 10:38 Rexcor, c'est 36 récifs qui ont été déployés sur quatre sites différents, qui sont d'une part à différentes distances du rejet et, d'autre part, qui orientés de manière différente par rapport au courant. L'idée tout simplement c'était d'évaluer, ces quatre villages sont identiques, et l'idée en fait c'est d'évaluer dans quel périmètre heu quelles sont les contraintes qui pèsent sur la dynamique de restauration écologique. Est-ce qu'on est capable de restaurer un site qui n'est plus sous pression et qui a été contaminé à 200m du point de contamination, à 1km, à 1Km5, partout, nulle part. En fait, c'est ca la question à laquelle on essaie de répondre. 11:20 Aujourd'hui on a différents types de suivis qui sont menés sur ces récifs. Les résultats globalement ils sont de plusieurs natures. Le premier résultat qui est fondamental, c'est que même au droit du rejet, le village de récifs qui est le plus proche du rejet, ce n'est pas une zone morte. A cet endroit là on a déployé des habitas et on s'aperçoit que ces habitats, on a des occupants, on a de la vie, cela se colonise, (... ) 11:57 Ca fait deux ans et on a déjà plus d'une vingtaine d'espèces qui sont sur le site le pus proche donc on a vraiment quelque chose d'intéressant. Le deuxième constat, c'est qu'on a une dynamique de retour à un état écologique assez satisfaisant qui est assez rapide. Aujourd'hui sur les villages de récifs globalement on a plus de soixante espèces qui ont fait leur retour (....) Aujourd'hui dans l'état actuel des choses on a une dynamique de restauration écologique qui semble plus rapide sur les sites les plus éloignés de la contamination. Projet pilote qui sert de base pour la suite.... 10:35 Opération qui est rare et expérimentale Autres créations atténuateurs de houle
Réalisation : Thomas Marie
Production : La Belle Société production / EPPDCSI-Universcience / MNHN / Ceebios / Ministère de la Transition écologique et solidaire / IRD / Région Nouvelle-Aquitaine / Région Sud / Région Bretagne / Communauté d’Agglomération Pays Basque / Institut des Futurs souhaitables / Avec le soutien de l’ADEME, du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, CGDD, Via Occitanie, CNRS-INEE.
Année de production : 2020
Durée : 6min27
Accessibilité : sous-titres français