Les écosystèmes vivants sont naturellement organisés pour favoriser leur résilience. Ils reposent sur des interactions constantes et une gestion équilibrée des ressources. Comment les territoires définis par l'homme peuvent-ils s’en inspirer pour mieux réussir leur transition écologique et sociale ? - Un écosystème vivant, c'est un ensemble de communautés d'êtres vivants qui vit sur une certaine portion de territoire. Ce qu'on appelle un écosystème : il y a la partie physique qu'on appelle le biotope. Donc ça va considérer par exemple aussi bien le type de substrat, la roche, mais également la température, la quantité d'eau, la luminosité, l'exposition au vent... Ce qu'on appelle les caractères finalement physico-chimiques. Il y a des zones de rencontre entre écosystèmes différents, et ce sont des zones extrêmement intéressantes parce que ça crée des mosaïques d'habitats. La rencontre, par exemple du fleuve et de la mer, ou bien la rencontre de la forêt et de la garrigue ou de la forêt et de la toundra. Tout écosystème ou tout système vivant peut se résumer aux interactions, aux interactions entre les êtres vivants et les interactions entre ces êtres vivants et le milieu physico-chimique. Il y a des interactions entre êtres vivants qui sont mutuellement bénéfiques. Elles sont super intéressantes parce qu'elles expliquent les plus grandes innovations du vivant, ce qu'on appelle les symbioses mutualistes. Par exemple le lichen : vous avez à l'intérieur un champignon qui a, à l'intérieur une algue. Le champignon permet de prendre la matière minérale. Et puis, bien sûr, l'algue permet de faire la photosynthèse, des sucres grâce à la lumière. D'autres exemples dans les milieux marins de symbioses mutualistes, c'est par exemple les coraux. C'est extraordinaire l'exemple des coraux. Quelle diversité de vie, quelle création de valeur dans un écosystème corallien ! L'économie du vivant est une économie circulaire, c'est-à-dire que les déchets de l'un sont la ressource pour un autre. Il y a dans les forêts toute une guilde d'organismes qu'on appelle les décomposeurs : les vers de terre, les collemboles, des champignons, des bactéries, qui jouent un rôle fonctionnel essentiel qui est celui de recueillir ce qui meurt pour redonner des éléments pour la vie. L'intelligence collective, ça peut être une source d'inspiration extraordinaire. Qui n'a pas été fasciné par un vol d'étourneaux avec ces figures synchronisées absolument remarquables ou par un banc de poissons qui ne connaît pas l'encombrement ? Alors, voilà, tous ces principes-là, ce qu'on appelle les principes inspirés du vivant, on les enseigne, on les transmet dans Territory Lab pour aussi influencer les dynamiques territoriales. Le Territories Lab est une recherche-action-transmission initiée autour de l'expérience Biovallée dans la vallée de la Drôme. Son intention est d'en essaimer les apprentissages auprès d'autres territoires afin de favoriser des dynamiques de transition inspirées du vivant. - Au Territory Lab, il y a eu initialement plutôt des individus avec des métiers un peu différenciés, des urbanistes, paysans, ingénieurs, écologues, agriculteurs. Et puis ça a migré, et c'est ce qu'on est en train de finaliser aujourd'hui, de rassembler des organisations, donc on peut trouver la Dreal, Aura, le Cerema. qui sont plutôt des acteurs publics, des institutions. - Alors la DREAL, c’est la Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement. C'est un service de l’Etat en région, en l'occurrence en Auvergne Rhône-Alpes. Et le Dré’Lab, c'est le laboratoire d'innovation publique de la DREAL qui a été co-construit par des agents pour être un espace d'exploration au service de la transition écologique et solidaire. Le Dré’Lab et le Cerema, on a eu l'occasion de rencontrer le Territory Lab, et on était nous-mêmes en train d'explorer les questions de résilience sur les territoires. - Territory Lab, lui s'est structuré depuis un territoire qui est celui de la vallée de la Drôme, le bassin versant de la rivière Drôme, et sur ce bassin versant il y a eu une expérience assez pionnière, assez extraordinaire d'une coopération d'intercommunalités. Elles se sont mis à coopérer autour du ré-ensauvagement et de l'assainissement de la rivière Drôme qui était une rivière très polluée. De cette coopération autour de la rivière Drôme a émergé un projet de transition écologique et sociale du territoire qui se nomme Biovallée, le projet Biovallée. Il y a beaucoup de pionniers de la bio qui sont venus s'installer ici, qui ont développé la bio depuis ici. Et à tel point qu’aujourd'hui, il y a 40% des terres arables du territoire de la vallée de la Drôme, du bassin versant qui sont en bio. Notre idée a été de percevoir quels étaient les savoirs et les connaissances de ce territoire en termes de transition pour pouvoir les transmettre à d'autres structures et à d'autres territoires. - Cette rencontre nous a amenés à mener une démarche exploratoire autour justement de cette question : comment s'inspirer du vivant au service des territoires pour répondre aux différents besoins de se loger, de se nourrir, de travailler, etc. - Comment des principes inspirés du vivant type la bio-inspiration peuvent aider des territoires à structurer des projets de transition écologique qui recréent de la vie et redynamisent des écosystèmes sociaux et naturels. Considérer le territoire comme un système vivant et pas juste comme une sorte de plateforme qu’on aménage au service des humains. - C'est un exercice qui n'est pas toujours évident. Et donc le principe de coopération du vivant nous a semblé assez intuitif pour se mettre ensemble au service d'un projet et de voir comment des points de vue différents de chacun, on pouvait faire émerger de nouvelles dynamiques ou des nouvelles solutions. C'est aussi ce qui va permettre quand on est aussi, notamment, dans un contexte de ressources manquantes, de générer par les interactions des solutions et pas d'aller puiser dans des ressources pour trouver des solutions. C'est un principe du vivant d'aller creuser dans ces interactions pour y trouver la ressource. Alors le Cerema, c'est donc un centre d'expertise public des collectivités et de l'Etat qui intervient sur des thématiques qui nécessitent une importante technicité. Donc ça peut être la question des routes, des infrastructures ferroviaires, mais aussi des risques d’inondations, l'aménagement du territoire, du paysage. Et il évolue également là, justement en partenariat avec le Territory Lab, sur comment on s'appuie sur cette expertise et on l'enrichit aussi d'une posture un peu différente d'écoute d'autres points de vue, ce qu'on n'a pas forcément l'habitude de faire. Et c'est valable aussi pour les services de l'Etat, comme la DREAL par exemple. - Là, on a des acteurs en fait avec nous qui vont être plutôt des acteurs territoriaux, des entreprises, des collectifs citoyens, des collectivités, des agents de l'Etat qui vont travailler ensemble à essayer de définir des nouvelles formes de projets de transition écologique et sociale des territoires. Par exemple, on les aide à travailler sur la bonne échelle territoriale. - Dans ces explorations, on a travaillé avec la commune de Saint-Pierreville en Ardèche, et plus largement au niveau du bassin versant autour de Saint-Pierreville, qui nous a permis de nous enrichir des regards des acteurs du territoire qui sont déjà vraiment très en avance sur ces questions-là. Et la dynamique qu'on a amorcée est en train de prendre forme autour des enjeux notamment de l'eau, la question de l'eau, du partage de la ressource, et puis la dimension aussi des communs, des communs territoriaux. - Aujourd'hui des enjeux de résilience portent sur les communs et les communs territoriaux qui peuvent être les matrices essentielles que sont l'eau, la terre et l'air. Mais qui vont être aussi des communs culturels. Alors on voit bien qu’on est dans un mouvement culturel de ces transformations qui peuvent être à différents niveaux, mais quand on touche à ces communs et qu'on en sort des savoirs, il y a un enjeu d'économie et de gouvernance des communs. L'homme, en prenant soin des territoires et en les régénérant à l'instar du vivant, a la capacité de les rendre plus résilients face au dérèglement climatique et à l'effondrement de la biodiversité.
Réalisation :
Victor Blondel, Thomas Marie
Production :
Universcience, La Belle Société Production, CNRS Images, MNHN, Ademe, Cerema, Région Normandie, Région Nouvelle-Aquitaine, Institut des Futurs souhaitables, Ceebios, DREAL Auvergne - Rhône - Alpes, avec la participation du Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires,
Année de production :
2023
Durée :
7min47
Accessibilité :
sous-titres français