L'attention est de nouveau braquée sur le Merapi, ce volcan indonésien culminant à plus de 2 900 mètres, situé dans l'île de Java à 30 kilomètres au nord de la ville de Yogyakarta, une des principales du pays. C'est l'un des plus puissants d'Indonésie, mais aussi l'un des plus actifs au monde. Calme depuis 2021, il est entré en éruption le 11 mars dernier, soufflant un petit vent de panique parmi les habitants de la région.
- Le Merapi est un stratovolcan andésitique, lié à une zone de subduction. C'est un volcan qui a une activité assez particulière, puisque les volcans à dôme produisent de la lave en surface de façon effusive et relativement calme. C'est-à-dire qu'ils construisent un dôme de lave. Au bout d'un moment, ce dôme a tendance à s'effondrer simplement par gravité Et c'est cette déstabilisation qui génère les nuées ardentes. C'est assez dangereux. C'est ce qu'on observe actuellement. Le Merapi a un rythme d'éruption qui est, sur le dernier siècle, d'une éruption tous les quatre à cinq ans. Et ça, ce sont des éruptions qui sont du type de celles qu'on est en train d'observer actuellement. Il y a eu une éruption beaucoup plus importante en 2010, qui est plutôt centennale. Et cette éruption a été très particulière puisqu'il y a une partie de l'édifice volcanique qui a disparu. Elle a nécessité l'évacuation de centaines de milliers de personnes. Et il y a eu plus de 350 morts. Donc c'était une éruption qui a marqué l'histoire récente du Mirapi. L'éruption qu'on observe depuis quelques jours, ce n'est pas une nouvelle éruption. Les phénomènes de surface sont simplement l'effondrement du dôme de lave qui s'est accumulé depuis plusieurs années, depuis début 2021; une partie avait déjà commencé en 2018. Ça a créé un grand volume de matériaux estimé à un ou deux millions de mètres cubes, c'est assez difficile à estimer... Donc c'est un gros volume de matériaux qui est stocké dans le cratère sommital et un peu sur les flancs. Ce matériel qui est de la lave relativement chaude, il y en a une partie qui s'est effondrée. Et en s'effondrant, le gaz qui est piégé à l'intérieur de la lave s'échappe et crée ce qu'on appelle les nuées ardentes, qui ont des distances assez modérées, jusqu'à 4 kilomètres. 4 kilomètres de distance pour une nuée ardente, c'est une distance assez modérée. En 2010, la nuée ardente avait dépassé 15 kilomètres. Les nuées ardentes, il y en a plusieurs dizaines par jour actuellement. Il y en a de moins en moins et elles vont de moins en moins loin. Plus les matériaux s'effondrent, plus le phénomène s'épuise. Le plus probable est que cette activité continue à décroître, qu'il y ait de moins en moins de nuées ardentes et qu'elles aillent de moins en moins loin. Mais ce qui est possible aussi - et c'est déjà arrivé par le passé - c'est que cette petite activité d'effondrement du dôme de lave déclenche une instabilité plus importante d'une autre partie du dôme. Et ça, c'est extrêmement difficile à prédire. C'est pour ça que la zone aujourd'hui est complètement interdite. L'Indonésie compte 127 volcans actifs dont un peu plus de la moitié sont surveillés avec des réseaux permanents. Et le Merapi a cette particularité d'être le plus surveillé de tous les volcans indonésiens. Non seulement c'est l'un des plus actifs - même s'il y en a d'autres qui sont aussi très actifs en Indonésie - mais il est aussi très proche de la ville de Yogyakarta. Il a un "rayon d'action" qui peut concerner pratiquement 2 à 3 millions de personnes. Donc le Merapi a des dizaines d'instruments qui sont installés, qui suivent de façon continue et permanente l'activité sismique, des mesures de concentration de gaz et de flux, les déformations qui sont mesurées par des GPS permanents et par des mesures laser sur des réflecteurs. Ce qui permet de mesurer des déformations qui sont dans les zones totalement inaccessibles du sommet et très dangereuses puisqu'elles sont très proches de la sortie de la lave. Tous ces instruments-là sont surveillés de façon routinière et donnent lieu à une interprétation permanente qui permet de réévaluer. À peu près tous les jours, il y a un rapport qui est publié, qui réévalue les risques pour la population et qui re-détermine les niveaux d'alerte et les zones qui doivent être interdites.
Jusqu'à présent, l'alerte de stade 3 sur 5, deuxième niveau le plus élevé depuis 2020, est toujours maintenue par l'agence de volcanologie nationale, appelant la région très peuplée à la vigilance.